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Les manuels que nous possédons suffisent pleinement, ce me semble, pour l'enseignement ordinaire de l'histoire de la philosophie, et il en existe de fort utiles pour toutes les nuances de systèmes ou d'opinions.

Une publication de plus ne peut être motivée que par les besoins d'une situation spéciale.

C'est à une de ces situations que doit répondre le présent volume: c'est un enseignement sinon dominé du moins légitimement influencé par le point de vue religieux qu'il doit offrir.

Toutefois, si j'ai écrit ces leçons pour une situation spéciale, ce n'est pas elle seule, c'est aussi mon point de vue personnel qui me les a dictées ainsi; et c'est ainsi que je les aurais professées devant toute espèce de public philosophique.

Ce n'est pas ici le lieu de m'expliquer sur les erreurs d'une séparation qui a trop longtemps régné dans les écoles de philosophie et dans les écoles de théologie; sur les périls d'une opposition qui n'a pu qu'affaiblir les unes et les autres. Je puis renvoyer à cet égard à mon Introduction. Mais ce que je puis affirmer bien simplement ici, c'est que le monde civilisé tout entier, du moins tout le public philosophique, est dans la même situation spéciale où je prends mon auditoire : il a besoin d'étudier l'histoire de la philosophie sous le point de vue religieux, et tant celle de la philosophie ancienne que celle de la philosophie moderne. La différence entre les deux est fondamentale, il est vrai, et chacun sait que depuis l'entrée du christianisme dans la pensée humaine, le rôle de la philosophie a changé, ses solutions se sont modifiées profondément. Chacun sait qu'entre la philosophie antérieure à cette grande révolution et la philosophie qui y est pos

térieure, il y a une différence telle qu'aucun autre fait n'en a produit de semblable. Et cependant l'étude de la philosophie ancienne, pour être bien comprise, demande désormais impérieusement comme celle de la philosophie moderne l'étude de la théologie contemporaine.

On n'en était pas là, il y a trente ans, quand j'ai débuté par cet enseignement; mais je crois être dans le vrai comme je suis dans la joie quand je constate cette transformation.

Elle n'étonnera aucun de ceux qui datent d'autres jours. Qui a vécu deux fois trente ans a vu bien des transformations; de plus éclatantes sans doute, de plus profondes, non.

Qu'elles soient plus fécondes aussi, et qu'elles en amènent de plus heureuses encore.

Prenant mon point de départ aux origines du christianisme, dans les enseignements qui l'ont amené, je trouve mon point d'arrêt bien naturel au christianisme rentrant dans les écoles.

J'espère qu'on m'approuvera, si, pour conserver à mes appréciations toute l'indépendance qu'elles demandent, je me suis arrêté devant les noms des vivants.

J'espère que cette règle, sacrée dans un cours, sera admise ici comme les deux dérogations apparentes que les doctrines de Hegel et de Jouffroy m'ont obligé d'y apporter à l'égard de deux penseurs vivants.

J'espère aussi qu'on approuvera le parti que j'ai pris, dans l'impossibilité d'indiquer les mémoires, les dissertations, les thèses et les traités spéciaux dont tant de personnages, de faits et de questions ont été les sujets, de n'en citer qu'un nombre très restreint. Il ne faut pas que l'histoire ressemble à un dictionnaire.

Qu'il me soit permis d'ajouter que le complément naturel de cet enseignement, la Philosophie de la religion, pourra paraître dans l'année.

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