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la Restauration et laissant un fils'. Mathurin-Pierre-Sébastien Le Goaësbe de Bellée, né à Ploërmel le 28 avril 1782 qui fut d'abord soldat d'artillerie de marine au Port-Louis, en 1799, sous les ordres de son oncle M. de Bruix, puis fut reçu licencié en droit à Paris en 1810, s'établit avocat à Ploërmel et devint suppléant du juge de paix de cette ville en 1808, juge suppléant du tribunal civil en 1811, juge titulaire en 1818 et président en 1828.

Le président de Bellée se maria deux fois et eut deux fils de Me Pringué des Fougerais, Gustave-Isidore, né à Ploërmel en 1812, mort inspecteur des contributions directes, père de M. Léon de Bellée peintre de paysage fort distingué, aujourd'hui seul représentant du nom; et de Me Dollé, Charles, né en 1817, qui est devenu conseiller à la cour de Rennes et n'a laissé que des filles.

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(Quimper, 17 sept. 1748.-Toulgoët, près Quimper, 24 février 1825)..

La famille Le Goazre, portant, d'après l'armorial de 1696, d'argent à la croix pattée de sinople, était une ancienne famille de robe de Cornouailles. Déboutée de ses prétentions à la noblesse à la réformation de 1669, bien qu'elle

Il avait eu neuf enfants. Ce fils et quatre filles lui survécurent (notes de M. F. Saulnier). Sa femme ne mourut que le 21 août 1831, à Ploërmel. Je ne connais aucune notice sur Le Goaësbe de Bellée.

portât les titres de Kermaonet en Cuzon,.de Kervélégan en Briec, de Penesquen en Plonéour, de Toulgoët en Penhars, et qu'elle comptât des conseillers et sénéchaux au présidial de Quimper, appelés à l'arrière-ban de Cornouailles depuis 1636', elle tenait l'un des premiers rangs parmi la bourgeoisie Quimpéroise. La branche de Kervélégan était la plus puissante. François Le Goazre de Kervélégan avait fourni en 1678 et 1680 de nombreuses déclarations, en particulier en Fouesnant et en Guengat, pour la réformation du domaine du roi'. Son petit-fils, conseiller au siège présidial de Quimper fut le père du futur député.

M. Th. de la Villemarqué qui a consacré dans la Biographie bretonne une notice enthousiaste à l'ami des Girondins, a raconté d'une manière fort touchante la cérémonie de son baptême. Le père et la mère, au lieu de donner, comme ils l'eussent pu facilement, de grands seigneurs pour protecteurs à leur fils, avaient voulu le confier à la garde sublime de l'indigence et du malheur : « Parrain et marraine ont été, dit l'acte de baptême, Guyon Féros et Jeanne Fagon, pauvres de cette ville ». La Providence, ajoute le narrateur, en le faisant tenir sur les fonds baptismaux par des mains plébéiennes, marquait ainsi du sceau populaire, dès sa naissance, celui qui devait être un jour l'ami et l'idole du peuple.

La première jeunesse de Kervélégan se passa au manoir de Toulgoět en Penhars, au grand air des prairies et des bois et en continuel contact avec les rudes campagnards qui devaient plus tard arracher le Girondin proscrit aux fureurs de la Montagne: puis on l'envoya au collège des jésuites de Quimper, où ses études souffrirent passable

1 Voy. le Nobiliaire breton de M. Pol de Courcy.

• Voy. Archives de la Loire-Inférieure, B. 576, 731 etc.

16 p.

Tirage à part en nouvelle édition, Quimperlé, Clairet, 1880, pet. in-18,

ment de la dispersion de 1763 et qu'il quitta à dix-sept ans, en 1765, pour suivre à Rennes les cours de l'école de droit.

Reçu avocat au Parlement, le jeune Augustin était, dès l'âge de vingt ans, reçu avocat du roi au présidial de Quimper, et sept ans plus tard, en 1774, il était élevé, par dispense d'âge, à la dignité de sénéchal et maire de Quimper, premier magistrat de Cornouailles.

La cérémonie de son installation fut une véritable fête publique, dont on a même gardé le souvenir dans une brochure de circonstance'. Les autorités civiles, suivies par une grande foule de peuple, se rendirent au devant de lui, à plusieurs lieues de Quimper pour le recevoir et le haranguer à l'entrée de la ville on avait élevé un arcde-triomphe en feuillage chargé de fleurs ; les maisons étaient pavoisées et de toutes les fenêtres pleuvaient sur lui des bouquets, pendant qu'il s'avançait au son de la musique et au bruit des acclamations. Comme ses émules, les Le Chapelier et les Lanjuinais, ce jeune triomphateur à peine agé de vingt-sept ans devait goûter encore pendant près de dix-sept années les joies éphémères d'une popularité sans égale, pour s'abreuver ensuite aux amertumes les plus cruelles de la proscription.

L'année même de son installation, il fut élu député aux Etats de Bretagne, membre de la Commission intermédiaire pour l'évêché de Quimper et de la grande députation des Etats près du roi; mais ce fut en 1788 que Kervélégan dessina le plus vigoureusement son attitude et prit la tête du mouvement populaire en Cornouailles, non pas d'abord contre la cour, mais contre le Parlement ceci est à remarquer, car il s'agissait d'un changement notable dans la constitution bretonne. Le ministère avait institué des grands

Lettre de M. l'abbé P... sur l'arrivée de M. Le Goazre de Kervélégan à Quimper, et sur son installation en la place de sénéchal au présidial de la même ville, le 31 août 1774.

bailliages, cours supérieures permettant de faciliter les appels des petits tribunaux. Quimper, qui devait être le siège d'un de ces bailliages exulta de joie mais le Parlement, qui voyait sa situation détruite, résista énergiquement et entreprit d'organiser des manifestations contraires aux projets ministériels: ayant réussi à Rennes, les protestataires crurent qu'ils auraient facilement raison de certaines résistances. locales et comme ils savaient que la commission intermédiaire de Cornouailles était favorable à leur opinion et que le sénéchal seul dirigeait l'oppostion, ils donnèrent mission au procureur général syndic des Etats, M. de Botherel, d'aller à Quimper pour obtenir l'adhésion générale. M. de Botherel arriva à Quimper le 15 août 1788, mais Kervélégan était parti la veille pour Versailles avec son greffier pour demander le maintien des grands bailliages et laissant à ses affidés des instructions pour recevoir selon son rang l'envoyé des Etats. On sait le reste et les émeutes ont été assez souvent décrites', pour que je n'ai pas besoin de rappeler ici comment M. de Botherel y fut bafoué aux cris de Vivent les grands bailliages, au diable le Parlement! Le marquis de Kersalaun, revenant de la Bastille, ne fut pas mieux reçu quelques semaines après lorsqu'il prétendit faire allumer des feux de joie en son honneur à Quimper, comme on l'avait fait sur d'autres points de la Bretagne pour fêter ses compagnons de captivité. Le parlement décréta aussitôt contre les fauteurs de ces troubles et en particulier contre Kervélégan qui les traitait bientôt dans une lettre rendue publique, de « petites espiègleries de Bas-Bretons. » Lorsque le roi rendit un arrêté de non-lieu, l'enthousiasme populaire ne connut plus de bornes.

Kervélégan, dit-on, en voyant la lutte établie entre la cour et les corps privilégiés, s'était vite aperçu que de cette lutte

Voyez en particulier du Châtellier, Hist. de la Révol. en Bret., I, 69 à 76; Pocquet, Origines de la Révol. en Bret., I, 267 à 269, etc.

il ne pouvait résulter aucun avantage pour le tiers-état, et que celui-ci en faisant cause commune, soit avec le parlement, soit avec la noblesse, ne récolterait que duperie. De là son attitude franchement hostile au parlement dès le milieu de l'année 1788. C'est voir les choses d'un point de vue élevé, et je veux bien qu'il en ait été ainsi : mais dans les époques troublées, les intérêts personnels ont malheureusement une grande part d'influence et de même que le parlement résistait à la cour, autant parce qu'il se voyait détruit que parce que la constitution bretonne était atteinte, de même Kervélégan résistait au parlement autant peut-être parce qu'il devait récolter les profits du grand bailliage que dans l'idée préconçue de favoriser un mouvement révolutionnaire La femme de César, dit un proverbe, ne doit jamais être soupçonnée. Il est fâcheux que Kervélégan, premier magistrat de Cornouailles, ait suscité de pareilles émeutes pour soutenir des projets ministériels qui devaient grandir encore sa propre situation.

Quoiqu'il en soit, le sénéchal fut, à partir de ce moment, l'idole des Quimpérois, qui lui ménagèrent une nouvelle entrée triomphale à son retour de Paris, justifiant dans une certaine mesure ce passage d'une lettre de Gillart de Keranflec'h à Pic de la Mirandole, en date du 3 novembre 1788: « Vous qui étiez dans un pays déjà asservi par Kervélégan1. » Asservi est exagéré, mais il n'y a qu'une nuance. J'ai cité ailleurs un échantillon des vers que lui adressait l'avocat Morvan pour fêter son retour2: l'ode n'est certes pas un chef-d'œuvre lyrique je dois cependant la mentionner à cause de l'intention.

Le 13 novembre, Kervélégan présenta à la communauté de ville de Quimper, au nom des corporations, une requête rédigée par lui et dans laquelle nous remarquons ces passages:

1 Du Châtellier Hist. de la Révol. en Bret., V, 197.

2 René Kerviler. Olivier Morvan, Saint-Brieuc, Prudhomme 1888, in-8.

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