Pour vos climats je quitte un ciel avare (Chansons, tome II, édit. Garnier frères.) BARTHÉLEMY ET MÉRY Auguste Barthélemy, né à Marseille en 1796, est mort à Paris le 23 août 1867. Élève des Oratoriens de Juilly, il écrivit d'abord dans le Drapeau blanc contre la liberté de la presse; il se préparait déjà à ces tristes palinodies qui ont terni sa vie et qui l'ont amené à mourir (châtiment terrible!) oublié, obscur, isolé, au milieu d'une indifférence qu'aucune curiosité publique ne vint réveiller. Après avoir publié avec son compatriote Méry des satires politiques de 1825 à 1830, et le grand poème de Napoléon en Égypte, 1829, il fit paraître seul la Némésis, 1831, fut attaché à l'Imprimerie royale, essaya vainement de ressaisir l'attention publique, qui s'était détournée de lui, et disparut du monde littéraire, où son nom même s'était évanoui depuis longtemps. Pourtant le vers de Barthélemy est admirable; sa poésie ou sa versification renferme une science profonde de la rime française et de la période harmonieuse. Elle a une pureté et une sonorité incomparables. Son vers se développe, tombe et se balance avec une régularité, une ampleur, une précision merveilleuses. Il a un éclat métallique, et il semble que l'auteur a fouillé jusqu'au fond toute la langue poétique, et en a découvert toutes les ressources, toutes les fibres intimes, tous les secrets les plus savants et les plus cachés. Outre les satires politiques, Napoléon en Égypte et la Némésis, Barthélemy a publié les Douze journées de la Révolution, 1832; la Nouvelle Némésis, 1844; divers petits poèmes qui n'ont rien ajouté à sa gloire. Il a traduit en vers l'Eneide de Virgile, 1835-1838, 4 vol. in-8. Joseph Méry, né près de Marseille le 21 janvier 1798, est mort à Paris le 17 juin 1866, un an avant Barthélemy, dont le nom en littérature est inséparable du sien, et qui avait dit de lui: Cet ami, de mon vers hémistiche vivant. Marseillais, poète et romancier, Méry, doué d'un caractère heureux, d'une verve éblouissante, d'une fécondité inépuisable, avait l'imagination d'un Provençal, l'érudition d'un homme du Nord, et une rare puissance d'assimilation dans toutes les branches du savoir humain. Séminariste éloquent, humaniste profond, journaliste infatigable, il écrivit des satires poétiques des plus vives, un grand poème dans la forme de l'épopée classique et un grand nombre de romans dont le style est coloré, le mouvement rapide, et où le pittoresque des descriptions le dispute à l'exposé dramatique et émouvant des événements racontés. Nous venons d'apprécier, en parlant de Barthélemy, leur versification sonore, pleine, majestueuse, bien timbrée. Les satires politiques dues aux deux amis eurent une vogue extraordinaire, mais, malheureusement, inspirées exclusivement par des faits de polémique contemporaine, elles ont perdu aujourd'hui la majeure partie de leur intérêt. On s'étonne de voir revêtus de magnifiques formes littéraires des incidents publics qui, n'étant plus compris par la génération présente, paraissent mesquins et sans valeur. Parmi les poésies qui appartiennent à Méry seul, citons seulement les Mélodies poétiques, 1853, in-18, et Napoléon en Italie, 1859, gr. in-8. Parmi ses nombreux romans, citons les Scènes de la vie italienne, 1837, 2 vol. in-8; les Nuits de Londres, 1840, 2 vol. in-8. La Guerre du Nizam, 1847, 3 vol. in-8; enfin plusieurs comédies et drames. NAPOLÉON EN ÉGYPTE EXPOSITION Puissent les souvenirs de cette grande histoire Suivons aux bords du Nil leurs gigantesques pas, Qu'a brunis le soleil de ses feux africains; Jusqu'au jour où, chargés des palmes d'Aboukir, Et le drapeau d'Arcole et le grand capitaine. (Chant Ier.) LE DÉSERT L'élite de l'armée en cinq corps se partage, Quelque temps nos soldats adressent leurs regrets Solitude infertile, où l'homme est seul debout! L'œil distingue parfois, isolé dans la plaine, Où les champs de bataille étaient des champs de fleurs? Elle suit du désert la route désignée; Et les jeunes soldats cherchent aux premiers rangs Il marche le premier : son plumet tricolore AUGUSTE BARBIER Auguste Barbier, né à Paris le 28 avril 1805, est mort à Nice le 1er février 1882. Ses goûts et la révolution de 1830 l'enlevèrent bientôt aux études du droit, qu'il avait cependant achevées. Il avait écrit avec Alphonse Royer un roman, les Mauvais garçons, satire très vive des mœurs du XVe siècle. Sa première poésie, la Curée, parut au mois d'août 1830 dans la Revue de Paris. Il avait emprunté à André Chénier la forme de l'ïambe, si énergique, si ample et si harmonieuse à la fois. Cette pièce, dont le retentissement fut immense, donna d'ailleurs toute la mesure de son talent. Le Lion, Quatre-vingt-treize, l'Émeute, la Popularité, l'Idole surtout, présentent la même énergie, le même élan, le même enthousiasme, la même conviction sincère. Ces diverses pièces furent réunies en un volume, fréquemment. réimprimé, 1830-1831. Les autres œuvres, d'un caractère plus calme, eurent moins de succès les circonstances n'étaient plus les mêmes; ce n'était plus de la poésie politique. Il a publié il Pianto, 1832; Lazare, 1833; Erostrate 1837; Chants civils et religieux, 1841; Rimes héroïques, 1843; Chansons et Odelettes, 1851; Silves, 1864, et un nouveau volume de Satires, 1865. LA CURÉE Mais, ô honte! Paris, si beau dans sa colère, Dans ce jour de tempête où le vent populaire Paris, si magnifique avec ses funérailles, Ses débris d'hommes, ses tombeaux, Paris, cette cité de lauriers toute ceinte Que les peuples émus appellent tous la sainte, Paris n'est maintenant qu'une sentine impure, |