En tête du convoi qui passe, Au bord de la fosse avec peine, Et la gloire y jette son maître, Gardien du tertre funéraire, Et fuyant la main qui l'attire, Quand sur ces touffes d'immortelles Son œil se ranime, il se dresse, Au vent des nuits, quand la couronne Il veut que son maître l'entende; C'est là qu'il attend d'heure en heure, Quel fut son nom? C'est un mystère : Passant, que ton front se découvre : (Édit. Firmin Didot.) GUIRAUD Alexandre Guiraud, membre de l'Académie française (1826), né à Limoux le 25 décembre 1788, est mort à Paris le 24 février 1847. D'abord lauréat, comme Victor Hugo, mais bien avant lui, de l'Académie des Jeux Floraux de Toulouse dans plusieurs concours poétiques, il vint à Paris et publia divers recueils de poésies qui furent remarqués. Son poème le Petit Savoyard eut un grand succès; et il le méritait par la naïveté touchante du sujet, par l'honnêteté des sentiments, par l'élégance simple et pure de la versification. Guiraud a composé plusieurs tragédies : les Macchabées, le Comte Julien, Pélage; il a écrit aussi un roman philosophique dans le sens de l'école catholique libérale, Flavien ou Rome au désert, Paris, 1835, 2 vol. in-8. Ses œuvres ont été réunies en 6 vol. in-8, Paris, 1845. LE PETIT SAVOYARD LE DÉPART Pauvre petit, pars pour la France. Que te sert mon amour? je ne possède rien. Tant que mon lait put te suffire. Tant qu'un travail utile à mes bras fut permis, Heureuse et délassée en te voyant sourire, Renonce aux baisers de ton fils. Mais je suis veuve; on perd sa force avec la joie. Où mendier pour toi? chez des pauvres aussi ! Mais, si loin que tu sois, pense au foyer absent, Vois-tu ce grand chêne, là-bas? Je pourrai jusque-là t'accompagner, j'espère. Encor, s'il était là pour guider ton enfance, Que feras-tu, mon fils, si Dieu ne te seconde? Mais Dieu le veut ainsi : nous devons nous soumettre. Porte au seuil des palais un visage content, Chante, tant que la vie est pour toi moins amère; Si ma force première encor m'était donnée, Maintenant de ta mère entends le dernier vœu : II. 17 Prie, et demande au riche: il donne au nom de Dieu Mais le soleil tombait des montagnes prochaines, LE RETOUR Avec leurs grands sommets, leurs glaces éternelles, Tout dans leurs frais vallons sert à nous enchanter, Quel est ce voyageur que l'été leur renvoie, Seul, loin dans la vallée, un bâton à la main? Bientôt de la colline il prend l'étroit sentier. Et dans son sac de toile blanche Est un pain de froment qu'il garde tout entier. Pourquoi tant se hâter, à sa course dernière? Les voilà... Tels encore qu'il les a vus toujours, Tout joyeux il arrive et regarde..... Mais quoi! La porte cède; il entre; et sa mère attendrie, Son fils est dans ses bras, qui pleure et qui l'appelle Et depuis quelques jours je te l'ai fait savoir, Mais lui « De votre enfant vous étiez éloignée, Nous sommes riches pour longtemps. Et les mains de l'enfant, des siennes détachées, Sa mère l'embrassait et respirait à peine; Suspendu devant elle et par le temps noirci. « C'est lui, je le savais, le Dieu des pauvres mères C'est le Christ du foyer, que les mères implorent, Nous gardons nos agneaux, et nos loups les dévorent; Toi, mon fils, maintenant me seras-tu fidèle? Ta pauvre mère infirme a besoin de secours; Elle mourrait sans toi. » L'enfant, à ce discours, Grave et joignant ses mains, tombe à genoux près d'elle, BÉRANGER Jean-Pierre de Béranger est né le 19 août 1780 à Paris où il est mort le 16 juillet 1857. D'abord compositeur dans une imprimerie à Péronne, il voulut écrire et s'essaya sans succès dans divers genres. Le prince Lucien Bonaparte vint à son aide en 1803; puis il entra dans les bureaux de l'Université et put se consacrer avec plus de loisir et de tranquillité d'esprit à ses travaux littéraires. Vers 1813 il se |