CURIACE, gentilhomme d'Albe, amant de Camille. PROCULE, soldat de l'armée de Rome. ACTE PREMIER. [La scène est à Rome, dans une salle de la maison d'Horace. Sabine, Julie et Camille s'entretiennent des malheurs qui les menacent. La guerre a éclaté entre Rome et Albe. De quelque manière qu'elle se termine, leurs familles en souffriront. Ce qui sera la joie de l'une sera le deuil de l'autre. Camille voit déjà son mariage avec Curiace brisé. Curiace arrive. Il apporte des nouvelles rassurantes. On est convenu que trois guerriers des deux partis combattront pour tous, et la victoire appartiendra au parti dont les champions seront vainqueurs. Dans deux heures on saura qui les dieux auront désigné.] ACTE SECOND, [Le choix de Rome est connu: les trois frères Horace combattront pour elle. Curiace en félicite son beau-frère Horace. Arrive Flavian, porteur d'une importante nouvelle.] Scène II.-HORACE, CURIAce, Flavian. Curiace. "Albe de trois guerriers a-t-elle fait le choix ? Flavian. Je viens pour vous l'apprendre. Curiace. Flavian. Vos deux frères et vous. Curiace. Flavian. Eh bien, qui sont les trois? Qui? Vous et vos deux frères. Mais pourquoi ce front triste et ces regards sévères ? Ce choix vous déplait-il? Curiace. Non, mais il me surprend: Je m'estimais trop peu pour un honneur si grand. F. Dirai-je au dictateur dont l'ordre ici m'envoie, Que vous le recevez avec si peu de joie? Če morne et froid accueil me surprend à mon tour. C. Dis lui que l'amitié, l'alliance et l'amour Ne pourront empêcher que les trois Curiaces Ne servent leur pays contre les trois Horaces. F. Contre eux! Ah, c'est beaucoup me dire en peu de mots! C. Porte lui ma réponse et nous laisse en repos. Scène III. C. Que désormais le ciel, les enfers et la terre Unissent leurs fureurs à nous faire la guerre, Que les hommes, les dieux, les démons et le sort Préparent contre nous un général effort: Je mets à faire pis, en l'état où nous sommes, H. Le sort, qui de l'honneur nous ouvre la bar rière, Offre à notre constance une illustre matière; Il épuise sa force à former un malheur, Pour mieux se mesurer avec notre valeur, Et, comme il voit en nous des âmes peu communes, L'éclat de son grand nom lui fait peu de jaloux, C. Il est vrai que nos noms ne sauraient plus périr, A quelque prix qu'on mette une telle fumée, Encor qu'à mon devoir je coure sans terreur, Ce triste et fier honneur m'émeut sans m'ébranler: N'admet point de faiblesse avec sa fermeté, C. Je vous connais encor, et c'est ce qui me tue; Mais cette âpre vertu ne m'était pas connue, Comme notre malheur elle est au plus haut point, Souffrez que je l'admire et ne l'imite point. H. Non, non, n'embrassez pas de vertu par contrainte, Et, puisque vous trouvez plus de charme à la plainte, En toute liberté goûtez un bien si doux: Voici venir ma sœur pour se plaindre avec vous. Je vais revoir la vôtre et résoudre son âme [Camille supplie Curiace de ne pas accepter l'honneur d'un combat fratricide. Le brave Albain croirait manquer au plus sacré des devoirs. Avant d'appartenir à Camille il appartient à son pays, et il fera ce qu'Albe attend de lui. Tout aussi vaines que les prières de Camille sont celles de Sabine qui arrive avec Horace son époux. Les deux guerriers ont peine à se défendre contre la vivacité de leur langage et contre leurs larmes, quand le vieil Horace arrive et dit:] Qu'est-ce ci, mes flammes ? Scène VII. enfants? écoutez-vous vos Et perdez-vous encor le temps avec des femmes ? Elles vous feraient part enfin de leur faiblesse: [Sabine et Camille se retirent en pleurant. Horace recommande à son père de les retenir, de les surveiller. Il le promet, et, en prenant congé de son fils et du fiancé de sa fille, il leur dit:] Pour vous encourager ma voix manque de termes, Mon cœur ne forme point de pensers assez fermes ; Moi-même en cet adieu j'ai les larmes aux yeux; Faites votre devoir et laissez faire aux dieux. ACTE TROISIÈME. [Tous les cœurs sont partagés entre l'espérance et la crainte. Il a été convenu qu'avant d'engager |