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Foulait aux pieds ses ennemis vaincus:

Je n'ai fait que passer, il n'était déjà plus.

Tout le chœur. L'aimable Esther a fait ce grand

ouvrage.

Une Israelite seule. De l'amour de son Dieu son cœur s'est embrasé ;

Au péril d'une mort funeste
Son zèle ardent s'est exposé:

Elle a parlé; le ciel a fait le reste.

Deux Israelites. Esther a triomphé des filles des Persans.

La nature et le ciel à l'envi l'ont ornée.

L'une des deux. Tout ressent de ses yeux les charmes innocents.

Jamais tant de beauté fut-elle couronnée!

L'autre. Les charmes de son cœur sont encor plus puissants.

Jamais tant de vertu fut-elle couronnée ?

Toutes deux. Esther a triomphé des filles des
Persans:

La nature et le ciel à l'envi l'ont ornée.
Une seule. Ton Dieu n'est plus irrité :
Réjouis-toi, Sion, et sors de la poussière,
Quitte les vêtements de ta captivité,

Et reprends ta splendeur première.
Les chemins de Sion à la fin sont ouverts:
Rompez vos fers,

Tribus captives;
Troupes fugitives

Repassez les monts et les mers;
Rassemblez-vous des bouts de l'univers.

Une autre. Que le Seigneur est bon; que son joug est aimable!

Heureux qui dès l'enfance en connaît la douceur ! Jeune peuple, courez à ce maître adorable:

Les biens les plus charmants n'ont rien de comparable

Aux torrents de plaisirs qu'il répand dans un cœur.
Que le Seigneur est bon; que son joug est aimable!
Heureux qui dès l'enfance en connaît la douceur !
Une autre. Il s'apaise, il pardonne;

Du cœur ingrat qui l'abandonne
Il attend le retour;

Il excuse notre faiblesse ;

A nous chercher même il s'empresse.
Pour l'enfant qu'elle a mis au jour

Une mère a moins de tendresse.
Ah! qui peut avec lui partager notre amour?
Trois Israelites. Il nous fait remporter une illustre
victoire.

L'une des trois. Il nous a révélé sa gloire.

Toutes trois. Ah! qui peut avec lui partager notre amour?

Tout le chœur. Que son nom soit béni; que son nom soit chanté;

Que l'on célèbre ses ouvrages
Au delà des temps et des âges,
Au delà de l'eternité !

VERS SENTENCIEUX ET POPULAIRES DE RACINE.

L'amour n'est pas un feu qu'on renferme en une âme

Tout nous trahit, la voix, le silence, les yeux.

Au travers des périls un grand cœur se fait jour.

La douleur qui se tait n'en est que plus funeste.

L'amour peut-il si loin pousser sa barbarie!

(Andromaque.)

Toujours la tyrannie a d'heureuses prémices.

Dans une longue enfance ils l'auraient fait vieillir.

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Dans le simple appareil D'une beauté qu'on vient d'arracher au sommeil. (Britannicus.)

Tandis que vous vivrez le sort, qui toujours change, Ne vous a point promis un bonheur sans mélange. (Iphigénie.)

Est-ce un malheur si grand que de cesser de vivre?

La mort aux malheureux ne cause point d'effroi.

Le crime d'une mère est un pesant fardeau.

Ainsi que la vertu le crime a ses degrés.

Toujours les scélérats ont recours au parjure.

Détestables flatteurs, présent le plus funeste
Que puisse faire aux rois la colère céleste.

(Phèdre.)

La vengeance trop faible attire un second crime. L'honneur seul peut flatter un esprit généreux.

Il est des contre-temps qu'il faut qu'un sage essuie. Les malheurs sont souvent enchaînés l'un à l'autre.

On peut des plus grands rois surprendre la justice.

Un noble cœur ne peut soupçonner en autrui
La bassesse et la malice

Qu'il ne sent point en lui.

(Esther.)

Celui qui met un frein à la fureur des flots
Sait aussi des méchants arrêter les complots.

La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère ?
Souvent d'un grand dessein un mot nous fait juger.

Dieu laissa-t-il jamais ses enfants au besoin?

Aux petits des oiseaux il donne leur pâture,
Et sa bonté s'étend sur toute la nature.

Le bonheur des méchants comme un torrent s'écoule.

Sur l'avenir insensé qui se fie! De nos ans passagers le nombre est incertain. Hâtons-nous aujourd'hui de jouir de la vie : Qui sait si nous serons demain ?

(Athalie.)

BOSSUET.

Né à Dijon en 1627; mort en 1794.

Le XVIIe siècle marque l'apogée de l'autorité royale. Louis XIV la concentra dans sa personne. Il en fit le principe du gouvernement et n'entendait pas qu'on la discutât. La liberté de la parole n'existait pas en matière politique. Elle resta exclusivement le privilège de la chaire. Là le roi lui laissa pleine carrière. Les orateurs, que leur ministère y appelait, purent l'exercer sans contrainte, et nul n'y apporta plus de génie et d'éloquence que Jacques Bénigne Bossuet.

Il débuta de très-bonne heure étonnant ceux qui l'écoutèrent. Les beaux-esprits de l'hôtel de Rambouillet * ayant voulu l'entendre, il y prêcha un soir un sermon qui fit dire à l'un d'eux (Voiture) “qu'il n'avait jamais entendu prêcher ni si tôt ni si tard." Il faisait allusion au jeune âge de l'orateur et à l'heure avancée de la soirée.

Quand le roi l'eut entendu il écrivit à son père pour le féliciter d'avoir un tel fils. Il ne tarda pas à lui donner un témoignage plus substantiel de sa

* L'hôtel de Rambouillet, rendez-vous de l'élite de la société dans le salon de Catherine de Vivonne, marquise de Rambouillet, espèce de cour littéraire qui exerça une grande influence sur le goût et la langue de cette époque. Le nom passa du lieu à la société.

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