LA MATRONE D'EPHESE. S'il eft un Conte ufé, commun & rebattu, C'eft celui qu'en ces Vers j'accommode à ma guife. Et pourquoi donc le choifis-tu ? Qui t'engage à cette entreprise ? N'a-t-elle point déjà produit affez d'écrits? Quelle grace aura ta (1) Matrone Au prix de celle de (2) Pétrone? Comment la rendras-tu nouvelle à nos efprits? Sans répondre aux cenfeurs, car c'eft chofe infinie, Voyons fi dans mes Vers je l'aurai rajeunie. Dans (3) Ephefe il fut autrefois C'étoit l'honneur du fexe : heureuse fa patrie! Son mari l'aimoit d'amour folle. N'étoit plein que de legs qui l'auroient confolée, (1) Une Dame. (2) Auteur Latin, qui a fait le Conte de la Matrone d'Ephefe. (3) Ville célébre d'Afie. II. Partie. (4) Famille chimérique, d'où l'on fuppofe que font defcendues toutes les fauffes prudes. Mm Si les biens réparoient la perte d'un Mari Mainte Veuve pourtant fait la déchevelée, Un bruit, & des regrets à percer tous les cœurs, Elle entre dans fa (5) tombe, en ferme volonté Prête, je m'entens bien, c'est-à-dire, en un mot, Comme l'Esclave avoit plus de fens que la Dame, (5) Efpece de Tombeau, comme une petite cave.. Dans l'ordinaire train des communs fentimens. Notre Veuve choifit pour fortir d'ici-bas. Contre les Dieux, le Sort & la Nature. Si la douleur doit s'exprimer fi bien. Encore un autre Mort faifoit fa réfidence Le gardoit avec vigilance. Mais la publique utilité Défendoit que l'on fît au Garde aucune grace. Pendant la nuit il vit aux fentes du tombeau Briller quelque clarté, spectacle affez nouveau. Curieux, il y court, entend de loin la Dame Rempliffant l'air de fes clameurs. Il entre, eft étonné, demande à cette femme, Pourquoi cette maison noire & mélancolique ? Le Mort pour elle y répondit. La Dame s'enterroit ainfi toute vivante. Se trouvoit un peu rallentie. Vous n'en mourrez pas moins. Un tel tempérament Une permiffion d'apporter fon foupé, Madame, Si par votre trépas vous l'aviez prévenu? Non, Madame, il voudroit achever fa carriére. |