N'en dormit de plus de fix mois. Du Monarque des Dieux enfin implore l'aide, Leur ennemi changea de note, Sur la Robe du Dieu fit tomber une crotte: D'abandonner fa Cour, d'aller vivre au défert: Avec mainte autre extravagance, Devant fon Tribunal l'Efcarbot comparut, On fit entendre à l'Aigle enfin qu'elle avoit tort. (2) Bel enfant, aimé de Jupiter, qui l'enleva fur fon Aigle, FABLE IX. Le Lion & le Moucheron. VA-t-en, chétif infecte, excrément de la terre. C'eft en ces mots que le Lion L'autre lui déclara la guerre. Penfes-tu, lui dit-il, que ton titre de Roi Le (1) quadrupéde écume, & fon œil étincelle : Eft l'ouvrage d'un Moucheron. Un avorton de Mouche en cent lieux le harcelle, Tantôt pique l'échine, & tantôt le museau, Tantôt entre au fond du nazeau. La rage alors fe trouve à font faîte montée. Il y rencontre auffi fa fin. Quelle chofe par-là nous peut être enseignée? J'en vois deux, dont l'une eft qu'entre nos ennemis Les plus à craindre font fouvent les plus petits: (1) Une bête à quatre où le moucheron fut pris. (2) Une toile d'Araignée L'autre pieds. L'autre, qu'aux grands périls tel a pú fe fouftraire, Qui périt pour la moindre affaire. FABLE X. L'Ane chargé d'éponges, & l'Ane chargé de fel. U N Anier, fon (1) fceptre à la main, Deux (2) Courfiers à longues oreilles. L'un d'éponges chargé marchoit comme un courier; Et l'autre fe faifant prier (3) Portoit, comme on dit, les bouteilles. Sa charge étoit de fel. Nos gaillards pélerins Au gué d'une riviere à la fin arriverent, L'Anier, qui tous les jours traversoit ce gué-là, Camarade Epongier prit exemple fur lui, (1) Son fouet, ou fon bâton. (2) On donne le nom de Courfier à de beaux & bons chevaux ici ce font deux Anes, dont les oreilles font, à proportion beaucoup plus longues que celles des che vaux. (3) Marchoit lentement, comme s'il eût porté les bouteilles. D Comme un Mouton qui va deffus la (1) foi d'autrui. Tous trois bûrent d'autant: l'Anier & le Grifon Et de tant d'eau s'emplit d'abord, Que l'Ane fuccombant ne put gagner le bord. (4) Fait fottement ce qu'il voit faire à d'autres. (5) Se remplirent d'eau comme l'éponge. I L faut, autant qu'on peut, obliger tout le monde. De cette vérité deux Fables feront foi, Tant la chofe en preuves abonde. Entre les pattes d'un Lion, Un Rat fortit de terre affez à l'étourdie. Qu'un Lion d'un Rat eût affaire? Dont fes rugiffemens ne le purent défaire. Font plus que force ni que rage. 'Autre exemple eft tiré d'animaux plus petits. Un brin d'herbe dans l'eau par elle étant jetté, Paffè un certain (3) Croquant qui marchoit les piéds nuds: Ce Croquant, par hazard, avoit une arbalête. Dès qu'il voit (4) l'Oiseau de Vénus, Le (s) Vilain retourne la tête. (1) La grande mer, par rapport à la Fourmi. (2) Pointe de terre ou de roche qui avance dans la mer. (3) Un Payfan. En 1637. fous Louis XIII. il fe fit un foulevement de quelques Communes dans le Perigord & la Xaintonge, qui, fous prétexte de liberté, ne vouJoient plus payer de fubfi des; & fe nommoient Croquans. De là ce nom a été employé pour défigner en général un pauvre Paysan, un Villageois. (4) La Colombe. (5) Mot ancien, qui fignifie un Payfan. De Villa, Maifon de campagne, a été formé Villanus, qui n'eft que de la baffe latinité. (6) S'envole au plus vite |