AMPHITRYON. Ah! sur le fait dont il s'agit, L'erreur simple devient un crime véritable, De semblables erreurs, quelque jour qu'on leur donne, Et la raison bien souvent les pardonne ARGATIPHONTIDAS. Je n'embarrasse point là dedans ma pensée ; Et que les gens de cœur n'approuveront jamais : Argatiphontidas ne va point aux accords 1. Pour des hommes d'honneur n'est point un coup à faire : Et l'on doit commencer toujours, dans ses transports, De l'épée au travers du corps. Oui, vous verrez, quoi qu'il advienne, Allons! AMPHITRYON. SOSIE. Je viens, monsieur, subir à vos genoux Et je n'en dirai pas un seul mot contre vous. AMPHITRYON. Lève-toi. Que fait-on ? SOSIE. L'on m'a chassé tout net; Et, croyant à manger m'aller comme eux ébattre 2, Je m'attendais là pour me battre. Oui, l'autre moi, valet de l'autre vous, a fait 1. Ne cherche pas la conciliation. 2. Ébaltre: : se réjouir. Suis-moi. La rigueur d'un pareil destin, Comme on vous des-Amphitryonne. AMPHITRYON. SOSIE. N'est-il pas mieux de voir s'il vient personne ? SCÈNE VIII CLEANTHIS, NAUCRATÈS, POLIDAS, SOSIE, AMPHITRYON, ARGATIPHONTIDAS, POSICLÈS. O ciel ! CLÉANTHIS. AMPHITRYON. Qui t'épouvante ainsi ? Quelle est la peur que je t'inspire ? Las! vous êtes là-haut, et je vous vois ici ! Ne vous pressez point; le voici Pour donner devant tous les clartés qu'on désire, SCÈNE IX MERCURE, CLÉANTHIS, NAUCRATÈS, POLIDAS, SOSIE, AMPHITRYON, ARGATIPHONTIDAS, POSICLÈS. MERCURE. Oui, vous l'allez voir tous, et sachez par avance Qui, ne sachant que faire, ai rossé tant soit peu Mais de s'en consoler il a maintenant lieu, SOSIE. Ma foi, monsieur le dieu, je suis votre valet. MERCURE. Je lui donne à présent congé 1 d'être Sosie. 1. Congé permission. Et je m'en vais au ciel, avec de l'ambroisie, SOSIE. (Il vole dans le ciel.) Le ciel de m'approcher t'ôte à jamais l'envie ! Un dieu plus diable que toi. SCÈNE X JUPITER, CLÉANTHIS, NAUCRATÈS, POLIDAS, SOSIE, AMPHITRYON, ARGATIPHONTIDAS, POSICLÈS. JUPITER, dans une nue. Regarde, Amphitryon, quel est ton imposteur, Et rétablir chez toi la paix et la douceur. N'a rien du tout qui déshonore ; Et sans doute il ne peut être que glorieux Qui, tout dieu que je suis, dois être le jaloux. Que Jupiter, orné de sa gloire immortelle, N'a par son cœur ardent été donné qu'à toi. SOSIE, à part. Le seigneur Jupiter sait dorer la pilule. JUPITER. Sors donc des noirs chagrins que ton cœur a soufferts, Chez toi doit naître un fils qui, sous le nom d'Hercule, Fera connaître à tous que je suis ton support 2, 1. Aucun lieu aucune raison. 2. Ton appui, ton protecteur. Et je mettrai tout le monde Sont des arrêts des destinées. (Il se perd dans les nues.) NAUCRATÈS. Certes je suis ravi de ces marques brillantes... SOSIE. Messieurs, voulez-vous bien suivre mon sentiment ? Dans ces douceurs congratulantes : Et, d'une et d'autre part, pour un tel compliment Le grand dieu Jupiter nous fait beaucoup d'honneur, D'une fortune en mille biens féconde. Et chez nous il doit naître un fils d'un très grand cœur, Et que chacun chez soi doucement se retire : Sur telles affaires toujours Le meilleur est de ne rien dire. 1. Sans seconde sans pareille. |