Page images
PDF
EPUB

Un Flavien, évêque de Constantinople, lui soutint qu'il fallait absolument qu'il y eût deux natures en Jésus. On assemble un concile nombreux à Éphèse, en 449; celui-là se tint à coups de bâton, comme le petit concile de Cirthe, en 355, et certaine conférence à Carthage. La nature de Flavien fut moulue de coups, et deux natures furent assignées à Jésus. Au concile de Chalcédoine, en 451, Jésus fut réduit à

une nature.

Je

passe des conciles tenus pour des minuties, et je viens au sixième concile général de Constantinople, assemblé pour savoir au juste si Jésus, qui, après n'avoir eu qu'une nature pendant quelque temps, en avait deux alors, avait aussi deux volontés. On sent combien cela est important pour plaire à Dieu.

Ce concile fut convoqué par Constantin-le-Barbu, comme tous les autres l'avaient été par les empereurs précédents : les légats de l'évêque de Rome eurent la gauche; les patriarches de Constantinople et d'Antioche eurent la droite. Je ne sais si les caudataires à Rome prétendent que la gauche est la place d'honneur. Quoi qu'il en soit, Jésus, de cette affaire-là, obtint deux volontés.

La loi mosaïque avait défendu les images. Les peintres et les sculpteurs n'avaient pas fait fortune chez les Juifs. On ne voit pas que Jésus ait jamais eu de tableaux, excepté peut-être celui de Marie, peinte par Luc. Mais enfin Jésus-Christ ne recommande nulle part qu'on adore les images. Les chrétiens les adorèrent pourtant vers la fin du quatrième siècle, quand ils se furent familiarisés avec les beaux-arts. L'abus

fut porté si loin au huitième siècle, que Constantin Copronyme assembla à Constantinople un concile de trois cent vingt évêques, qui anathématisa le culte des images, et qui le traita d'idolâtrie.

L'impératrice Irène, la même qui depuis fit arracher les yeux à son fils, convoqua le second concile de Nicée en 787: l'adoration des images y fut rétablie. On veut aujourd'hui justifier ce concile, en disant que cette adoration était un culte de dulie, et non de latrie.

Mais, soit de latrie, soit de dulie, Charlemagne, en 794, fit tenir à Francfort un autre concile qui traita le second de Nicée d'idolâtrie. Le pape Adrien IV y envoya deux légats, et ne le convoqua pas.

Le premier grand concile convoqué par un pape fut le premier de Latran, en 11391; il y eut environ mille évêques; mais on n'y fit presque rien, sinon qu'on anathématisa ceux qui disaient que l'Église était trop riche.

Autre concile de Latran, en 1179, tenu par le pape Alexandre III, où les cardinaux, pour la première fois, prirent le pas sur les évêques : il ne fut question que de discipline.

Autre grand concile de Latran, en 1215. Le pape Innocent III y dépouilla le comte de Toulouse de tous ses biens, en vertu de l'excommunication. C'est le premier concile qui ait parlé de transsubstan

tiation.

En 1245, concile général de Lyon, ville alors im

1 Voltaire, page 144, n'en parle que comme d'un second concile ; il avait, même page, parlé du premier, tenu en 1123. B.

périale, dans laquelle le pape Innocent IV excommunia l'empereur Frédéric II, et par conséquent le déposa, et lui interdit le feu et l'eau: c'est dans ce concile qu'on donna aux cardinaux un chapeau rouge, pour les faire souvenir qu'il faut se baigner dans le sang des partisans de l'empereur. Ce concile fut la cause de la destruction de la maison de Souabe, et de trente ans d'anarchie dans l'Italie et dans l'Alle

magne.

Concile général à Vienne en Dauphiné, en 1311, où l'on abolit l'ordre des Templiers, dont les principaux membres avaient été condamnés aux plus horribles supplices, sur les accusations les moins prou

vées.

En 1414, le grand concile de Constance, où l'on se contenta de démettre le pape Jean XXIII, convaincu de mille crimes, et où l'on brûla Jean Hus et Jérôme de Prague, pour avoir été opiniâtres, attendu que l'opiniâtreté est un bien plus grand crime que le meurtre, le rapt, la simonie, et la sodomie.

En 1431, le grand concile de Basle, non reconnu à Rome, parcequ'on y déposa le pape Eugène IV, qui ne se laissa point déposer.

Les Romains comptent pour concile général le cinquième concile de Latran, en 1512, convoqué contre Louis XII, roi de France, par le pape Jules II; mais ce pape guerrier étant mort, ce concile s'en alla en fumée.

Enfin, nous avons le grand concile de Trente, qui n'est pas reçu en France pour la discipline; mais le dogme en est incontestable, puisque le Saint-Esprit

arrivait de Rome à Trente, toutes les semaines, dans la malle du courrier, à ce que dit Fra-Paolo Sarpi; mais Fra-Paolo Sarpi sentait un peu l'hérésie 1.

CONFESSION 2.

Le repentir de ses fautes peut seul tenir lieu d'innocence. Pour paraître s'en repentir, il faut commencer par les avouer. La confession est donc presque aussi ancienne que la société civile.

On se confessait dans tous les mystères d'Égypte, de Grèce, de Samothrace. Il est dit dans la Vie de MarcAurèle, que lorsqu'il daigna s'associer aux mystères d'Éleusine, il se confessa à l'hiérophante, quoiqu'il

1 Dans l'édition de 1767 du Dictionnaire philosophique, cet article était signé: Par M. Abausit le cadet. B.

2 Cet article parut pour la première fois dans une édition de 1765 du Dictionnaire philosophique. Il commençait alors ainsi :

« C'est encore un problème si la confession, à ne la considérer qu'en po«litique, a fait plus de bien que de mal.

« On se confessait dans les mystères d'Isis, d'Orphée et de Cérès, devant << l'hierophante et les initiés; car puisque ces mystères étaient des expiations, «< il fallait bien avouer qu'on avait des crimes à expier.

"

Les chrétiens adoptèrent la confession dans les premiers siècles de «l'Église, ainsi qu'ils prirent peu à peu les rites de l'antiquité, comme << les temples, les autels, l'encens, les cierges, les processions, l'eau lustrale, << les habits sacerdotaux, et plusieurs formules de mystères; le Sursum corda, l'Ite missa est, et tant d'autres. Le scandale de la confession pu«blique d'une femme, arrivé à Constantinople au quatrième siècle, fit abo«lir la confession.

[ocr errors]
[ocr errors]

«

«La confession secrète qu'un homme fait à un autre homme ne fut admise dans notre Occident que vers le septième siècle. Les abbés commen«cèrent par exiger que leurs moines, etc. >>

La version actuelle parut en 1771 dans la quatrième partie des Questions sur l'Encyclopédie, sauf quelques alinéa qui furent ajoutés en 1774. B.

fût l'homme du monde qui eût le moins besoin de confession.

Cette cérémonie pouvait être très salutaire; elle pouvait aussi être très dangereuse: c'est le sort de toutes les institutions humaines. On sait la réponse de ce Spartiate à qui un hiérophante voulait persuader de se confesser: A qui dois-je avouer mes fautes? est-ce à Dieu ou à toi?—C'est à Dieu, dit le prêtre. Retire-toi donc, homme. (Plutarque, Dits notables des Lacédémoniens.)

[ocr errors]

Il est difficile de dire en quel temps cette pratique s'établit chez les Juifs, qui prirent beaucoup de rites de leurs voisins. La Mishna, qui est le recueil des lois juives", dit que souvent on se confessait en mettant la main sur un veau appartenant au prêtre, ce qui s'appelait la confession des veaux.

Il est dit dans la même Mishna", que tout accusé qui avait été condamné à la mort, s'allait confesser devant témoins dans un lieu écarté, quelques moments avant son supplice. S'il se sentait coupable, il devait dire: «Que ma mort expie tous mes pé<«< chés »; s'il se sentait innocent, il prononçait : « Que << ma mort expie mes péchés, hors celui dont on m'ac

«<<cuse. >>>

Le jour de la fête que l'on appelait chez les Juifs l'expiation solennelle, les Juifs dévots se confessaient les uns les autres, en spécifiant leurs péchés. Le confesseur récitait trois fois treize mots du psaume LXXVII,

Alinéa ajouté en 1774. B.

a Mishna, tome II, page 394.- Tome IV, page 134.- Synagogue judaïque, ch. xxxv.

« PreviousContinue »