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dans l'excès contraire. Chacun veut penfer d'après foi, & compte pour rien tout ce qui a été pensé par les plus grands hommes qui l'ont précédé. Dans ces circonftances j'ofe vous dire, Monseigneur, qu'il eft de l'intérêt public, que les défenfeurs des anciennes maximes, même fur les matiéres que je traite, trouvent un appui qui ̧ les foutienne & qui les encourage. Tout fe tient dans les chofes humaines: & respecter ce qui eft fagement établi, eft une façon de penfer qui importe au maintien de la tranquillité & de la paix.

Que j'aimerois, MONSEI GNEUR, à préfenter ici au bon goût des Lettres chancelant parmi nous, & menacé d'une chûte prow chaine, l'heureuse & fûre ressource que vous lui promettez ! Que j'aimerois à faire voir, combien vous étes capable de le confoler & de l'affermir! Mais vous me défendez tout éloge, & votre ordre exprès

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me force de me taire. La folidité d'efprit, qui feule mérite la vraie louange, apprend à fe contenter de la gloire de bien faire. Je renferme donc en moi-même tout ce qu'il ne m'eft point permis de manifefter au dehors: & je vous donne mon obéissance pour preuve du parfait dévouement & du profond respect avec lesquels j'ai l'honneur d'étre,

MONSEIGNEUR;

Votre très-humble & très-obéiffant ferviteur, J. B. L. CREVIER, Profeffeur Emérite de Rhétorique en l'Univerfité de Paris,

PREFACE.

E

fuivre, dans

tion d'une

Ariftote

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N donnant au Public Néceffité de une Rhétorique, je ne la compofiprétens point lui offrir Rhétorique, un Ouvrage nouveau Cicéron, & pour le fond des chofes; & fi Quintilica j'avois cette pensée, je craindrois de lui faire un mauvais préfent. La Rhétorique eft un Art ancien, qui roule fur des matiéres fenfibles & à la portée de tous les efprits, qui a été traité dans l'Antiquité par les plus habiles mains. Ainfi tout ce qu'il y a de bon à dire touchant cet Art eft trouvé depuis longtems : & en écrivant fur une matiére fur laquelle ont travaillé Ariftote, Cicéron, & Quintilien, fommes dans le cas de la maxi

nous

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me fi judicieusement établie par le dernier de ces Auteurs : Quand le bon eft trouvé, qui » cherche autre chose cherche >>le mauvais. »Je renonce donc à la gloire d'être inventeur, pour me rendre vraiment utile. Je ne donne point du nouveau : mais j'évite le faux, & je marche fûrement d'après des guides qui ne peuvent point m'égarer.

Je ne crains point de m'exprimer avec cette pleine & parfaite confiance dans les lumiéres des grands maîtres de l'Antiquité. Leur autorité eft confa'crée l'eftime de tous les par fiécles. Il n'eft point queftion 'maintenant d'éxaminer fi Ariftote Cicéron & Quintilien ont bien penfé & bien écrit fur la Rhétorique. C'est un fait conf tant & avéré. Notre unique affaire eft de bien entrer dans leur efprit, & de bien prendre leur penfée.

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J'infifte avec force fur ce point, parce qu'aujourdhui, dans la maniére dont nous jugeons de l'Antiquité, nous ne favons pas affez éviter l'excès oppofé à celui que l'on a peut-être juftement reproché à nos péres. Lorf qu'après d'épaiffes ténébres la lumiére de la belle Littérature commença à renaître à nos yeux, l'éclat des beautés qui nous frappérent dans les écrits des Orateurs, des Poëtes, des Philofophes Grecs & Latins nous enchanta d'une admiration bien fondée fans doute, mais qui alla jufqu'à nous éblouir. L'impreffion de cette admiration pour leurs fublimes efprits fut fi forte, qu'elle nous fit prefque oublier que nous avions nous-mêmes une raifon capable de nous éclairer. Nous crûmes qu'il ne nous étoit permis de marcher que fous leur conduite directe & immédiate, comme

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