SAINTE-BEUVE-NÉ EN 1803. Ce critique plein de sens et de délicatesse dans les Causeries du Lundi, est aussi un poète charmant dans les Consolations, sa plus jolie œuvre poétique. Là c'est un ami qui vous entretient familièrement de ses impressions intimes, et sait répandre de l'intérêt sur les scènes les plus ordinaires et les objets les plus humbles de la vie commune. Ses vers ressemblent au doux murmure d'un ruisseau qui s'écoule sans fracas à travers des lieux connus, dont chaque aspect, chaque arbre, chaque fleur éveille un souvenir ou un sentiment que votre cœur savoure. MME. EMILE DE GIRARDIN-NÉE EN 1805. Delphine Gay, devenue Madame de Girardin, obtint, à dix-sept ans, un prix de l'Académie Française pour les vers qu'elle fit sur le dévouement des médecins et des sœurs de Ste. Camille, dans la peste de Barcelone. Ce succès l'encouragea, et elle nous a donné depuis des pièces diverses, telles que ses Essais Poétiques, Le Dernier Jour de Pompéi, Napoline, etc. Dans toutes elle déploie une brillante imagination, et charme surtout par une sensibilité et une grâce exquise.-Mourut en 1855. Parmi les poètes de notre époque se font encore remarquer ALFRED DE MUSSET, dont les fantaisies d'une folle et bizarre imagination s'offrent embellies de toutes les grâces de l'esprit le plus sémillant. EMILE DESCHAMPS, qui dans maints endroits de ses Études Françaises et Étrangères (recueil de pièces originales et de traductions), et son poème de Rodrigue, dernier roi des Goths, a de la verve outre l'esprit qu'il fait briller partout. ANTONY DESCHAMPS, frère du précédent, plus énergique et plus mâle, digne traducteur du Dante. TURQUETY. Ses premières inspirations, recueillies sous le titre de Primavera, et les Odes et Elégies qui les suivirent, sont pleines d'âme, et d'une exquise mélodie. BARBIER. Ses œuvres principales sont les Tambes, La Curée, satires politiques dont la force et le mouvement font quelquefois oublier la rudesse de l'expression; le voyage en Italie, intitulé Il Pianto, dont les vers sont plus doux. THEOPHILE GAUTIER, qu'on serait tenté d'appeler un habile artiste en vers plutôt qu'un poète; car sa poésie, toute matérielle et de surface, rend chaque œuvre de son talent semblable à un beau fruit vermeil qui manque de saveur ; l'on peut dire encore, à un arbre dont la sève est glacée, mais dont les branches et le sommet couverts de frimas étincellent de mille feux éblouissants aux rayons d'un beau soleil d'hiver. DIX-NEUVIÈME SIÈCLE. MORCEAUX CHOISIS. LA FEUILLE. (ARNAULT.) De ta tige détachée, Où vas-tu? Je n'en sais rien. Et la feuille de laurier. LA PAUVRE FILLE. (SOUMET.) J'ai fui ce pénible sommeil Qu'aucun songe heureux n'accompagne, J'ai dévancé sur la montagne Les premiers rayons du soleil. S'éveillant avec la nature, Le jeune oiseau chantait sur l'aubépine en fleurs; Mes yeux se sont mouillés de pleurs. Pourquoi ne suis-je pas semblable au jeune oiseau Rien ne m'appartient sur la terre, Je n'ai pas même de berceau, Loin de mes parents exilée, Ne m'appellent jamais leur sœur ! Le joyeux laboureur ne m'invite à m'asseoir, Autour du sarment qui pétille, Vers la chapelle hospitalière, En pleurant j'adresse mes pas, Où je ne sois pas étrangère, La seule devant moi qui ne se ferme pas! Souvent je contemple la pierre Où commencèrent mes douleurs Qu'en m'y laissant, peut-êt.e, y répandit ma mère. Souvent aussi mes pas errants Au milieu des cercueils ainsi que sur la terre! LA PRIÈRE. (LAMARTINE, MÉDITATIONS POÉTIQUES.) Le Roi brillant du jour, se couchant dans sa gloire, gazon, Voilà le sacrifice immense, universel! L'univers est le temple, et la terre est l'autel; Sont les sacrés flambeaux pour ce temple allumés. Jusqu'au trône du Dieu que la nature adore. Mais ce temple est sans voix. Où sont les saints concerts? Tout se tait mon cœur seul parle dans ce silence. |