M. Scr. Mais laissez-moi donc lire. Si vous pleurez toujours, je ne pourrai rien dire. Son susdit testament en la forme qui suit. Gér. De tout ce préambule, et de cette légende, S'il m'en souvient un mot, je veux bien qu'on me pende. Lis. C'est votre léthargie. Ce Cris. Ah, je vous en réponds. que c'est que de nous! moi, cela me confond. M. Scr. (lisant.) Je veux premièrement qu'on acquitte mes dettes. Gér. Je ne dois rien. M. Scr. Voici l'aveu que vous en faites. Je dois quatre cents francs à mon marchand de vin, Gér. Je dois quatre cents francs? C'est une fourberie. Je ne sais pas au vrai si vous les lui devez; Mais il me les a, lui, mille fois demandés. Gér. C'est un maraud qu'il faut envoyer aux galères. Cris. Quand ils y seraient tous, on ne les plaindrait guères. M. Scr. (lisant.) Je fais mon légataire unique, universel, Eraste mon neveu. Era. Se peut-il, juste ciel! M. Scr. (lisant.) Déshéritant, en tant que besoin pourrait étre, Parents, nièces, neveux, nés aussi bien qu'à naître. Gér. A cet article-là je vois présentement Que j'ai bien pu dicter le présent testament. M. Scr. (lisant.) Item, je donne et légue en espèce sonnante, Monsieur, en vérité, pour peu Non-jamais-car-enfin-ma bouche-quand j'y pense, Je me sens suffoqué par la reconnaissance. (A Lisette.) Parle donc. Lis. (embrassant Géronte.) Ah! monsieur . . . Qu'est-ce à dire cela? Quoi! déjà, je vous prie, Gér. Lis. M. Scr. Item, je donne et légue Et l'on va me jeter M. Scr. (lisant.) Ah! c'est mon tour enfin. A Crispin Gér. (regardant Crispin qui se fait petit.) A Crispin ? M. Ser. (lisant.) Pour tous les obligeants, bons et loyaux services Qu'il rend à mon neveu dans divers exercices, Et qu'il peut bien encor lui rendre à l'avenir Gér. (à part.) Où donc ce beau discours doit-il enfir venir? Voyons. M. Scr. (lisant.) Quinze cents francs de rentes viagères, Pour avoir souvenir de moi dans ses prières. Cris. (se prosternant aux pieds de Géronte.) Gér. Non ferai-je, parbleu! Que veut dire ceci? M. Scr. Quel éclaircissement voulez-vous qu'on vous donne? Eh, je n'écris jamais que ce que l'on m'ordonne. Gér. Quoi! moi, j'aurais légué sans aucune raison, Gér. Ne m'a-t-on pas volé mes billets dans mes Je tremble du malheur dont je sens les approches : Era. (à part.) Quel funeste embarras! (Haut.) Vous les cherchez en vain, vous ne les avez pas. Gér. Où sont-ils donc ? Réponds. Era. Tantôt pour Isabelle, Je les ai par votre ordre exprès portés chez elle. Gér. Par mon ordre ? Je ne m'en souviens point. Oh, je veux sur ce point Cris. C'est votre léthargie. Gér. DIX-HUITIÈME SIÈCLE. POÈTES ILLUSTRES. VERS le COMMENCEMENT de ce siècle, sous les règnes de Louis XIV. et de Louis XV., florissaient, DANCOURT-NÉ EN 1661. Poète comique. Son talent était de peindre les ridicules du jour. Il sut une fois seulement tracer des caractères, et développer une intrigue; ce fut dans Le Chevalier à la mode. Ses pièces, en général, offrent de petits tableaux champêtres, où il ne manque pas de faire intervenir des paysans: le dialogue en est vif, léger, plein de gaîté et de saillies. On distingue, avec celle dont nous venons de parler, Les Trois Cousines, Le Mari Retrouvé, La Foire de Bezançon, Colin Maillard, Le Galant Jardinier, Le Tuteur. Mourut en 1726. DUCHÉ NÉ EN 1668. Il donna au théâtre français trois tragédies sacrées, dont une seule, Absalon, mérite qu'on en fasse mention; et au théâtre de l'opéra plusieurs drames lyriques, qui sont tombés dans l'oubli.-Mourut en 1704. J. B. ROUSSEAU-NÉ EN 1671. Jean Baptiste Rousseau est encore le plus fameux de nos poètes lyriques, quoiqu'il n'en soit pas demeuré le plus par fait. Ce n'est pas l'enthousiasme, ni aucun des mouvements d'une âme ardente et passionnée que l'on admire dans ses Odes, ses Cantates, et ses Psaumes, mais seulement l'éclat du style, le tour élégant de la phrase et la savante harmonie des vers. Il s'exerça en outre dans l'épigramme, où personne jusqu'à présent ne l'a surpassé.-Mourut en 1741. DANCHET-NÉ EN 1671. Poète dramatique. Il s'exerça dans la tragédie et dans l'opéra, mais il ne réussit que dans le dernier genre, où il n'obtint même qu'un succès assez faible.-Mourut en 1748. LA MOTTE-NÉ EN 1672. La Motte Houdart est plus célèbre dans l'histoire de notre littérature par ses paradoxes et les querelles qu'ils lui attirèrent, que par ses ouvrages, bien qu'il se soit exercé dans tous les genres. Doué seulement d'un esprit souple, fin et délicat, mais incapable de sentir vivement et de se passionner, il n'a produit que des œuvres froides. On a de lui des odes, des églogues, des tragédies, des opéras, des comédies, des fables, des discours académiques, &c., mais de tout cela on ne lit plus guère aujourd'hui que ses fables. Mourut en 1731. BOISSY-NÉ EN 1674. Poète comique. De toutes ses comédies, qui sont en assez grand nombre, trois seulement se sont soutenues au théâtre par leur gaîté, ce sont: le Français à Londres, L'Homme du Jour, et Le Babillard -Mourut en 1758. CRÉBILLON-NÉ EN 1674. Tout en respectant les lois de la scène qui avaient guidé Corneille, Racine et tous leurs imitateurs, Crébillon se fraya une route nouvelle. Nous intéresser à l'héroïsme, à la vertu ou au malheur, remplir notre cœur tour à tour d'espé |