Déjà, pour la saisir, Calchas lève le bras: VERS SUR FONTENAI. (CHAULIEU.) Désert, aimable solitude, Quoi! j'aurai tant de fois chanté, Aux tendres accords de ma lyre, Et plein de la reconnaissance De tous les biens que tu m'as faits, Tes agrémens et tes bienfaits? C'est toi qui me rends à moi-même; Tu calmes mon cœur agité : Et de ma seule oisiveté Tu me fais un bonheur extrême! Parmi ces bois et ces hameaux, Emplois, grandeurs tant désirécs. J'ai connu vos illusions; Je vis loin des préventions Qui forgent vos chaînes dorées. La cour ne peut plus m'éblouir; Libre de son joug le plus rude, J'ignore ici la servitude De louer qui je dois haïr. Fils des dieux, qui de flatteries Ne s'entend que dans nos prairies. Grotte, d'où sort ce clair ruisseau, De mousse et de fleurs tapissée, N'entretiens jamais ma pensée. Que du murmure de ton eau. Bannissons la flatteuse idée Des honneurs que m'avaient promis D'une condition commune; Ah! quelle riante peinture Quel plaisir de voir les troupeaux, Quand le midi brûle l'herbette, Rangés autour de la houlette, Chercher l'ombre sous les ormeaux! Ouïr répondre les échos, Et retentir tous nos coteaux De hautbois et de chansonnettes! Déjà la vieillesse s'avance, Fontenai, lieu délicieux, Muses qui dans ce lieu champêtre Beaux arbres, qui m'avez vu naître, Cependant du frais de votre ombre Où des arbres dont tout exprès, Ormeaux, young elms; musettes, bagpipes; bocage, grove. SCÈNE DU LÉGATAIRE (COMÉDIE). (REGNARD.) Géronte, vieillard, étant malade, avait envoyé chercher M. Scrupule, notaire, pour lui dicter son testament. Lorsqu'il arrive, Crispin, valet d'Eraste, neveu de Géronte, s'enveloppe `dans la robe de chambre de ce dernier, et, de concert avec Eraste et Lisette, servante, dicte un faux testament sous le nom du vieillard. M. Scrupule prend ses notes, s'en retourne rédiger l'acte, et revient pour le lire à Géronte et le lui faire signer. Géronte. Ici depuis longtemps vous êtes attendu. M. Scrupule. Certes, je suis ravi, monsieur, qu'en moins d'une heure, Vous jouissiez déjà d'une santé meilleure. Gér. Gér. Quel papier, s'il vous plait? pourquoi, pour quelle affaire ? M. Scr. C'est votre testament que vous venez de faire. Gér. J'ai fait mon testament! M. Scr. Oui, sans doute, monsieur. Je frissonne de peur. Lisette (bas.) Crispin, le cœur me bat. Gér. Eh, parbleu! vous rêvez, monsieur, c'est pour le faire, Que j'ai besoin ici de votre ministère. M. Scr. Je ne rêve, monsieur, en aucune façon ; Monsieur était présent aussi bien que madame. Lis. (bas.) Cris. (bas.) Juste ciel! Gér. Eraste était présent! M. Scr. Me voilà confondu. Oui, monsieur, je le jure. Gér. Est-il vrai, mon neveu? parle, je t'en conjure. Era. Ah! ne me parlez point, monsieur, de testament, C'est m'arracher le cœur trop tyranniquement. Gér. Lisette, parle donc ! Lis. Crispin, parle à ma place. Je sens dans mon gosier que ma voix s'embarrasse. Cris. Je pourrais là-dessus vous rendre satisfait; Nul ne sait mieux que moi la vérité du fait ! Gér. J'ai fait mon testament! Cris. On ne peut pas vous dire Qu'on vous l'ait vu tantôt absolument écrire ; Mais je suis très certain qu'au lieu que vous voilà, Un homme à peu près mis comme vous êtes là, Assis dans un fauteuil auprès de deux notaires, A dicté mot à mot ses volontés dernières. Je n'assurerai pas que ce soit vous, pourquoi ? C'est qu'on peut se tromper; mais c'était vous ou moi. M. Scr. Rien n'est plus véritable, et vous pouvez m'en croire. Gér. Il faut donc que mon mal m'ait ôte la mémoire, Et c'est ma léthargie. Cris. Oui, c'est elle en effet. Lis. N'en doutez nullement, et, pour prouver le fait, Ne vous souvient-il pas que, pour certaine affaire, Vous m'avez dit tantôt d'aller chez le notaire ? Gér. Oui. Lis. Qu'il est arrivé dans votre cabinet; Lis. C'est votre léthargie. Cris. Ne vous souvient-il, monsieur, bien nettement, Et des airs insolents, chez vous vous faire insulte? Cris. Que pour vous venger de leur emportement Cris. C'est votre léthargie. Gér. Je crois qu'ils ont raison, et mon mal est réel. Lis. Ne vous souvient-il pas que monsieur Clistorel . . . Era. Pourquoi tant répéter cet interrogatoire ? Monsieur convient de tout, du tort de sa mémoire, Du notaire mandé, du testament écrit. Gér. Il faut bien qu'il soit vrai, puisque chacun le dit, Mais voyons donc enfin ce que j'ai fait écrire. Cris. (à part.) Ah! voilà bien le diable. M. Scr. le lire ? Il faut donc vous Fut présent devant nous, dont les noms sont au bas, Que tout est ici bas fragile et transitoire . Cris. Ah! quel cœur de rocher, et quelle âme assez noire, Ne se fendrait en quatre en entendant ces mots ? Gér. En les voyant pleurer mon âme est attendrie. Là, là! consolez-vous, je suis encore en vie. M. Scr. (continuant de lire.) Considérant que rien ne resie en même état, Ne voulant pas aussi décéder intestat Cris. Intestat Lis. |