Ministres du Seigneur, ayez toujours les yeux. Abn. (à Josabeth.) Princesse, assurez-vous, je les prends sous ma garde. Ath. O ciel, plus j'examine, et plus je le regarde . . . C'est lui! D'horreur encor tous mes sens sont saisis. (Montrant Joas.) Épouse de Joad, est-ce la votre fils? Jos. Qui? Lui madame? Ath. Jos. Lui. Je ne suis point sa mère. (Montrant Zacharie.) Voilà mon fils. Ath. (à Joas.) Jeune enfant, répondez. Jos. Et vous, quel est donc votre père? Le Ciel jusqu'aujourd'hui.. Ath. (à Josabeth.) Pourquoi vous pressez-vous de répondre pour lui? C'est à lui de parler. Jos. Dans un âge si tendre, Quel éclaircissement en pouvez-vous attendre? Laissez-le s'expliquer sur tout ce qui le touche. Jos. (bas, à part.) Daigne mettre, grand Dieu, ta sagesse en sa bouche! Entre les bras de Dieu jeté dès ma naissance, Et qui de mes parens n'eus jamais connaissance. Ils m'ont abandonné. Joas. Depuis que je suis né. Ath. Ne sait-on pas au moins, quel pays est le vôtre ? Joas. Ce temple est mon pays, je n'en connais point d'autre. Ath. Où dit-on que le sort vous a fait rencontrer? Joas. Parmi des loups cruels, prêts à me dévorer. Une femme inconnue, Joas. Ath. Mais de vos premiers ans quelles mains ont pris soin? Aux petits des oiseaux il donne leur pâture, Et sa bonté s'étend sur toute la nature. Tous les jours je l'invoque, et d'un soin paternel, Ath. Quel prodige nouveau me trouble et m'embarrasse! Succéder... Je serais sensible à la pitié! Abn. Madame, voilà donc cet ennemi terrible! Vous avez entendu sa fortune. Sa présence à la fin pourrait être importune. Ath. Non. Revenez. Quel est tous les jours votre emploi ? Joas. J'adore le Seigneur. On m'explique sa loi. Dans son livre divin on m'apprend à la lire, Et déjà de ma main je commence à l'écrire. Ath. Que vous dit cette loi? Joas. Que Dieu veut être aimé ; Qu'il venge tôt ou tard son saint nom blasphémé; Qu'il est le défenseur de l'orphelin timide: Qu'il résiste au superbe, et punit l'homicide. Ath. J'entends. Mais tout ce peuple, enfermé dans ce lieu, A quoi s'occupe-t-il? Joas. Il loue, il bénit Dieu. Ath. Dieu veut-il, qu'à toute heure on prie, on le contemple? Joas. Tout profane exercice est banni de son temple. Joas. Quelquefois à l'autel Je présente au Grand-Prètre ou l'encens ou le sel, Je vois l'ordre pompeux de ses cérémonies. Ath. Hé quoi, vous n'avez point de passe-temps plus doux ? Je plains le triste sort d'un enfant tel que vous, Joas. Moi, des bienfaits de Dieu je perdrais la mémoire ! Joas. Vous ne le priez point. Ath. Vous pourrez le prier. Joas. Je verrais cependant en invoquer un autre. Ath. J'ai mon Dieu, que je sers. Vous servirez le vôtre. Ce sont deux puissans Dieux. Joas. Il faut craindre le mien, Lui seul est Dieu, Madame, et le vôtre n'est rien. Ath. Les plaisirs près de moi vous chercheront en foule. Joas. Le bonheur des méchans comme un torrent s'écoule. Ath. Ces méchans, qui sont-ils ? Jos. Un enfant Hé, Madame, excusez Ath. (à part.) J'aime à voir comme vous l'instruisez. Enfin, Eliacin, vous avez su me plaire, Vous n'êtes point sans doute un enfant ordinaire. Je veux vous faire part de toutes mes richesses, Je prétends vous traiter comme mon propre fils. Ath. (à Josabeth.) Sa mémoire est fidèle; et dans tout ce qu'il dit, De vous et de Joad je reconnais l'esprit. Voilà, comme infectant cette simple jeunesse, Vous employez tous deux le calme où je vous laisse. Vous cultivez déjà leur haine et leur fureur. Vous ne leur prononcez mon nom qu'avec horreur. Jos. Peut-on de nos malheurs leur dérober l'histoire ? Tout l'Univers les sait. Vous-même en faites gloire. Ath. Oui, ma juste fureur, et j'en fais vanité, A vengé mes parens sur ma postérité. J'aurais vu massacrer et mon père et mon frère, (Quel spectacle d'horreur!) quatre-vingts fils de rois; Et pourquoi? Pour venger je ne sais quels Prophètes, Et moi, Reine sans cœur, fille sans amitié, Je n'aurais pas du moins, à cette aveugle rage Comme on tratait d'Achab les restes malheureux ! Qu'il vous donne ce Roi promis aux nations, Cet enfant de David, votre espoir, votre attente . . . J'ai voulu voir, j'ai vu. Abn. (à Josabet.) Je vous l'avais promis. Je vous rends le dépôt que vous m'avez commis. SCÈNE VIII. Joad, Josabeth, Joas, Zacharie, Abner, Salomith, Lévites, le Chœur. Jos. (à Joad.) Avez-vous entendu cette superbe Reine Seigneur! Joad. J'entendais tout et plaignais votre peine. Ces Lévites et moi, prêts à vous secourir, Nous étions avec vous résolus de périr. (à Joas, en l'embrassant.) Que Dieu veille sur vous, enfant, dont le courage SCÈNE IX. Le Chœur. Une des filles du Chœur. Quel astre à nos yeux vient de luire ? Quel sera quelque jour cet enfant merveilleux ? Une autre. Pendant que du Dieu d'Athalie Une autre. Qui nous révélera ta naissance secrète, Cher enfant? Es-tu fils de quelque saint Prophète ? Il devint des Hébreux l'espérance et l'oracle. Une autre. L'enfant que le Seigneur aime, Qui de bonne heure entend sa voix, Et que ce Dieu daigne instruire lui-même! Et du méchant l'abord contagieux Tout le Chœur. Heureuse, heureuse l'enfance Croît, à l'abri de l'Aquilon, Un jeune lys, l'amour de la nature. Loin du monde élevé, de tous les dons des cieux Et du méchant l'abord contagieux Tout le Chour. Heureux, heureux mille fois |