Allez chercher vos fous qui vous donnent à rire, (à Elmire.) Et sans . . . Adieu, ma bru; je ne veux plus rien dire. Sachez que pour céans j'en rabats de moitié, Et qu'il fera beau temps quand j'y mettrai le pié. (donnant un soufflet à Flipote.) Allons, vous, vous rêvez, et bayez aux corneilles. Je saurai vous frotter les oreilles. Marchons, gaupe, marchons. Qu'elle ne vous ouît tenir un tel langage: Elle vous dirait bien qu'elle vous trouve bon, Clé. Comme elle s'est pour rien contre nous échauffée ! Et que de son Tartufe elle paraît coiffée ! Dor. Oh! vraiment, tout cela n'est rien au prix du fils: Il l'appelle son frère, et l'aime dans son âme Il le choie, il l'embrasse; et pour une maîtresse Les bons morceaux de tout, il faut qu'on les lui cède; Il l'admire à tous coups, le cite à tous propos; Lui, qui connaît sa dupe, et qui veut en jouir, Son cagotisme en tire, à toute heure, des sommes, Il vient nous sermonner avec des yeux farouches, SCÈNE III. Elmire, Mariane, Damis, Cléante, Dorine. Elm. (à Cléante.) Vous êtes bien heureux de n'être point venu Au discours qu'à la porte elle nous a tenu. Mais j'ai vu mon mari; comme il ne m'a point vue, Clé. Moi, je l'attends ici pour moins d'amusement; SCÈNE IV. Cléante, Damis, Dorine. Dam. De l'hymen de ma sœur touchez-lui quelque chose. J'ai soupçon que Tartufe à son effet s'oppose, Dor. . Il entre. Or. SCÈNE V. Orgon, Cléante, Dorine. Ah! mon frère, bon jour. Clé. Je sortais, et j'ai joie à vous voir de retour. La campagne à présent n'est pas beaucoup fleurie. (à Cléante.) Mon beau-frère, attendez, Vous voulez bien souffrir, pour m'ôter de souci, Que je m'informe un peu des nouvelles d'ici. (à Dorine.) Tout s'est-il, ces deux jours, passé de bonne sorte? Qu'est-ce qu'on fait céans? comme est-ce qu'on s'y porte? Dor. Madame eut avant-hier la fièvre jusqu'au soir, Avec un mal de tête étrange à concevoir. Or. Et Tartufe? Dor. Tartufe! il se porte à merveille, Gros et gras, le teint frais, et la bouche vermeille. Or. Le pauvre homme! Dor. Le soir, elle eut un grand dégoût, Et ne put, au souper, toucher à rien du tout. Or. Et Tartufe? Dor. Il soupa, lui tout seul, devant elle; Et fort dévotement il mangea deux perdrix, Dor. Dor. Dor. Dor. Dor. Tous deux se portent bien enfin ; Et je vais à madame annoncer, par avance, La part que vous prenez à sa convalescence. SCÈNE VI. Orgon, Cléante. Clé. A votre nez, mon frère, elle se rit de vous: Et se peut-il qu'un homme ait un charme aujourd'hui ? Or. Alte-là, mon beau-frère; Vous ne connaissez pas celui dont vous parlez. Clé. Je ne le connais pas, puisque vous le voulez ; Mais enfin, pour savoir quel homme ce peut être Or. Mon frère, vous seriez charmé de le connaître, Et vos ravissements ne prendraient point de fin. C'est un homme . . . qui ah!. un homme. un homme enfin Qui suit bien ses leçons, goûte une paix profonde, Et je verrais mourir frère, enfants, mère, et femme, Clé. Les sentiments humains, mon frère, que voilà! Or. Ah! si vous aviez vu comme j'en fis rencontre, Vous auriez pris pour lui l'amitié que je montre. Chaque jour à l'église il venait, d'un air doux, Tout vis-à-vis de moi se mettre à deux genoux. Il attirait les yeux de l'assemblée entière Par l'ardeur dont au ciel il poussait sa prière; Il faisait des soupirs, de grands élancements, Et baisait humblement la terre à tous moments: Et, lorsque je sortais, il me dévançait vîte Pour m'aller, à la porte, offrir de l'eau bénite. Instruit par son garçon, qui dans tout l'imitait, Et de son indigence, et de ce qu'il était, Je lui faisais des dons: mais, avec modestie, Il me voulait toujours en rendre une partie. C'est trop, me disait-il, c'est trop de la moitié; Et quand je refusais de le vouloir reprendre, Et depuis ce temps-là tout semble y prospérer. Clé. Parbleu! vous êtes fou, mon frère, que je croi. Or. Mon frère, ce discours sent le libertinage: Clé. Voilà de vos pareils le discours ordinaire: Les bons et vrais dévots, qu'on doit suivre à la trace, Entre l'hypocrisie et la dévotion? Vous les voulez traiter d'un semblable langage, Confondre l'apparence avec la vérité, |