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134 INTRODUCTION A L'ÉTUDE DE LA PHILOSOPHIE.

de Dieu, et fait servir à la perdition des hommes le feu céleste qu'il avait reçu pour leur faire du bien! Aucun malheur n'est comparable à celui-là; et l'imagination elle-même ne peut mesurer le tourment qu'il doit faire éprouver à la conscience d'un mourant. L'agonie du chrétien, au contraire, est tranquille, et le sentiment de son mérite ne lui cause point de remords. Le souvenir des priviléges qu'il avait reçus ne le trouble point, mais lui inspire un humble sentiment de confiance et de gratitude; parce que, s'il abandonne le champ qu'il a cultivé, il sait qu'il emporte avec lui les fruits de ses sueurs et de ses fatigues, et il compte les offrir, comme un bon ouvrier, à un maître juste et miséricordieux, qui a promis une éternité de récompenses ineffables à un verre d'eau donné pour l'amour de lui.

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NOTES.

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3

NOTES

DU TOME PREMIER.

NOTE 1.

Si les amateurs qui se donnent pour des Aristarques, joignent à ce défaut la splendeur de la naissance et de la fortune, toute discussion dans laquelle les hommes vraiment studieux voudront entrer avec eux, devra paraître une folie (*). Car, comment un homme pauvre et obscur, bien que savant et plein de génie, pourrait-il jamais avoir raison, dans le temps où nous sommes, contre celui qui possède vingt mille écus de rentes, par exemple, et qui a des titres de noblesse? Ces avantages ont en effet deux résultats : en premier lieu, ils donnent le privilége de parler de tout sans savoir grand chose ou même rien du tout, et d'être très érudit

(*) Elle doit le paraitre toujours, et quelquefois elle peut en ètre une en effet.

et

sans le moindre travail. En second lieu, les riches et les heureux du monde professent d'ordinaire les opinions que l'usage courant a établies, parce que leur manière de penser est le fruit de lectures sans suite et frivoles, de la conversation, et non pas d'études choisies ni de profondes méditations. Ils sont dans une sorte de satisfaction bienheureuse d'euxmêmes, qui leur fait croire qu'ils ont atteint le faîte de la sagesse humaine, quand leurs opinions sont gouvernées sur la mode. Il en résulte que, si l'homme studieux s'écarte des idées communes, comme cela arrive le plus souvent, professe des doctrines ou neuves et qui lui sont propres, ou anciennes et en apparence vieillies et surannées, il a contre lui toutes ces vraisemblances qui guident le jugement du vulgaire riche et noble, et son opinion ne peut prévaloir, à moins d'un miracle. Il ne faut donc pas s'étonner si les puissants de nos jours, au lieu de favoriser noblement, comme cela se pratiquait quelquefois chez les anciens, l'homme qui préfère la nature à la fortune, de ces services que l'on peut rendre sans en souffrir et recevoir sans honte, font tout leur possible pour l'avilir, l'étouffer, l'anéantir, à moins qu'il ne rachète par les flatteries le tort grave d'être plus savant ou moins ignorant qu'eux. Ne croyez pas cependant que ces singuliers et aimables Mécènes agissent ainsi par mauvaise foi, et par la malignité d'une ame ignoble et abjecte; ils pensent tout au contraire servir par là la civilisation du siècle. Leur tort vient de leur intelligence, qui n'étant pas toujours noble comme leur sang, les porte à croire qu'ils sont de bons juges des parties les plus éminentes du savoir, et à penser que le proverbe, si tant est qu'ils entendent le latin, ultrà crepidam, est fait seulement pour les cordonniers et non pas pour eux (*).

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(*) Si ce proverbe paraît insolent et plébéien à ceux qui sont dans le cas de se le voir appliquer, je leur propose cet autre à la place: ne sus Minervam ; lequel, à en juger des prétentions par les habitudes, ne devrait offenser aujourd'hui la délicatesse de personne.

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