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AUTOMNE DU CŒUR.

Voici que j'ai pleuré, Chère, de votre amour,
Voici que j'ai pleuré d'une tristesse immense
Et que vous sanglotez tout bas à votre tour.

Pourquoi cette douleur, pourquoi cette démence ?
Et nos derniers baisers pourquoi sont-ils moins fous ?
Serait-ce donc l'automne du cœur qui commence ?

Notre amour est si vieux ! si vieux! Souvenez-vous !
Il nous ramène au temps d'une jeunesse folle
Et c'est bien de regret que pleurent vos yeux doux !

Hélas! Pourquoi faut-il qu'un tel bonheur s'envole!

LA GRAPHOLOGIE

NOTES PAR M. MAILCAILLOZ

Je dois d'abord m'excuser, Messieurs, de n'avoir, pour la première fois que j'ai l'honneur de vous faire une communication, à vous présenter que de simples notes et réflexions recueillies au jour le jour sur une science qui n'est point nouvelle, mais qui est devenue plus spécialement à la mode, depuis quelques années, la graphologie. Je compte beaucoup moins sur moi-même pour vous intéresser à cette étude que sur l'attrait d'inconnu qui se dégage toujours de toute science de divination.

Cet amour du mystérieux, si habilement exploité de tous les temps, est particulièrement caractéristique à notre époque où il devient en quelque sorte une réaction contre le matérialisme à outrance qui a sévi sur nous depuis la fin du second empire. Dégoûtés, écœurés par les basses réalités de l'heure présente, nos contemporains ont, plus que personne, éprouvé le besoin de se reporter vers l'avenir, ou même vers le domaine des esprits, cet au delà si attirant pour certaines âmes inquiètes. De là est venu le regain de vogue dont ont joui de nos jours toutes les sciences occultes, même, ou plutôt surtout, les moins précises et les moins sérieuses:

le magisme, mise en action de l'influence que l'homme possède sur la nature, réaction de la volonté sur la vie; le magnétisme, action d'un homme sur un autre, absorption d'une volonté faible par une autre plus forte; le spiritisme, manifestation de l'esprit de l'homme se mettant après sa mort en communication avec les vivants; puis toutes les sciences ayant pour but de révéler le passé et de dévoiler l'avenir par tel ou tel procédé plus ou moins curieux ou bizarre l'astrologie, la chiromancie, la cartomancie; enfin celles plus modestes qui se contentent de découvrir l'homme intérieur par certains signes extérieurs étant en lui ou émanant de lui, et c'est dans cette dernière catégorie qu'il faut ranger la graphologie, à côté de la phrénologie et de la physiognomonie.

Toutes ces sciences ou prétendues sciences ont vu de nos jours renaître leurs succès les moins contestables. Niera-ton l'influence du magisme sur le public quand on aura vu, grâce à lui, arriver à la célébrité un écrivain dont le talent n'était pas sensiblement supérieur à celui de beaucoup d'autres restés au second plan, j'ai nommé l'illustre Sâr Joséphin Péladan? Par lui le magisme s'est introduit partout, dans la littérature, dans la musique, dans la peinture même, avec les Rose-Croix et leur salon annuel.

Il me paraît inutile d'insister sur l'importance qu'a prise le magnétisme dans les travaux les plus sérieux de nos savants. A vrai dire, les phénomènes qu'il sert à désigner ont été assez étudiés pour ne plus conserver d'occulte que le principe qui peut les provoquer.

Le spiritisme est pour ses fidèles presque une religion. Il forme l'objet de toute une littérature spéciale dont GilbertAugustin Thierry et Jules Lermina sont les représentants les plus counus et les plus lus.

Si la prédiction de l'avenir par les astres, les cartes ou

les lignes de la main n'ose plus guère se montrer sous la forme de science positive, comme avec Desbarolles ou Etteila, elle a retrouvé de nouveaux adeptes dans le domaine populaire où elle est tombée, et la crédulité humaine est assez grande pour que les nombreux charlatans qui l'exploitent soient assurés encore d'y trouver une source de profits certains.

Sans doute l'étude des caractères par la configuration du crâne, l'examen des traits du visage ou des lignes de l'écriture, passionne moins les esprits parce qu'elle donne des résultats moins surprenants et moins merveilleux; mais elle gagne en certitude ce qu'elle perd en mystère et, entreprise actuellement par des gens dont on ne peut nier ni la bonne foi ni l'intelligence, elle paraît donner des résultats encourageants pour ceux qui s'y livrent avec discernement et mesure. L'un des derniers ouvrages parus il y a quelques jours est un Traité de la physionomie humaine, et son auteur, M. Ledos, qui l'a mûri pendant trente ans et y a mis toute la chaleur de sa conviction, est en ce moment le sujet de tous les articles de journaux, le but de toutes les interviews.

Notre temps est, en effet, porté vers la psychologie. En littérature, elle s'est introduite dans le roman avec Bourget et s'y déguise à peine sous la forme d'une intrigue d'une simplicité élémentaire chez Edouard Rod et Maurice Barrès. Il me suffira de rappeler que les opéras de Wagner sont des opéras psychologiques, où la musique ne prétend plus accompagner une action, mais procurer une émotion correspondante à un état d'âme. Nos magistrats et nos criminalistes font, eux aussi, de la psychologie et se trouvent amenés à se poser le redoutable problème de la responsabilité humaine.

Il ne faut donc pas s'étonner si le psychologue a eu recours à tous les moyens propres à faciliter ses recherches

et ses études et, croyant trouver dans les signes de l'écriture un indice du tempérament et de la valeur intellectuelle et morale d'un individu, a, pour donner un corps à sa découverte, inventé une nouvelle science qu'il a appelée la graphologie.

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La graphologie est fondée sur cette croyance que, non point par les pensées qui s'y trouvent, mais par sa matérialité même, constante pour chacun, inconsciente chez tous, l'écriture d'un homme est le « graphique de son caractère. Son inventeur est l'abbé Michon, mort maintenant, mais qui a laissé à ses disciples un gros traité où il a résumé le résultat de ses recherches et de ses découvertes. Aujourd'hui, la science de l'abbé Michon a de nombreux adeptes dont l'un des plus connus est le docteur Poggi; mais elle ne me paraît pas appelée à un bien grand avenir, à raison des procédés mécaniques d'écriture qui tendent et tendront de plus en plus à remplacer le manuscrit.

La première question qui se pose, à propos de graphologie, est de savoir comment l'abbé Michon a été amené à faire cette invention et sur quelles bases sérieuses elle repose. Il me semble que sa découverte n'est ni purement rationnelle, ni purement expérimentale; mais qu'elle est fondée à la fois sur la déduction et sur l'induction.

Je ne voudrais pas vous fatiguer par l'énumération du sens d'un trop grand nombre de caractères de l'écriture, ce qui serait nécessaire pourtant pour vous montrer comment leur signification a pu être établie. Mais je vous demanderai seulement la permission de vous indiquer quelques grandes lignes. Il suffit de réfléchir un instant pour tomber d'accord qu'une écriture épaisse, fortement appuyée, doit émaner d'un homme plus matériel, plus positif, que celui qui trace des pattes de mouche sans corps ni consistance. De même celui qui ponctuera soigneusement, fera des marges et des alinéas

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