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de Lazare. Eh bien, nous l'avouerons franchement : jamais, ni en Italie ni en France, nous n'avons rencontré une plus grande indulgence, jamais nous n'avons obtenu un plus complet succès. Notre auditoire de femmes, dès le premier dimanche, se convertit, en grande partie, en auditoire d'hommes sérieux. Nous en avons été très-heureux; car cela nous a révélé un fait bien important, bien consolant pour le zèle d'un ministre de l'Église : c'est que, dans Paris catholique, le SENS DE JÉSUS-CHRIST, dont parle saint Paul, y est bien profond, le goût pour la nourriture solide de l'Évangile y est universel. Aussi on nous a engagé de tous les côtés à publier, dans un volume à part, ces huit Homélies sur les Femmes de l'Evangile; et c'est ce que nous allons faire présentement, avant même d'entreprendre la publication de notre troisième volume de Conférences.

Telle est la série des travaux auxquels nous nous proposons de consacrer exclusivement la santé et la vie que Dieu, dans sa miséricorde, vient de nous rendre.

En attendant, et en revenant à nos Conférences, nous devons ici dire quelques mots en réponse aux quelques critiques que, ainsi qu'on devait s'y attendre, on nous a faites à leur sujet.

$5. On ne croit pas devoir répondre à des critiques portant les caractères de la malveillance, ou de l'ignorance de la question.

Nous ne nous arrêterons pas un seul instant à celles de ces critiques que, comme les ANNALES DE PHILOSOPHIE (Avril 1852, pag. 302-307) l'ont si bien prouvé,

à notre insu, on nous a faites sans nous avoir lu, ou en nous ayant lu mal, dans l'intention manifeste, dans l'envie fort peu bienveillante de nous trouver en défaut; ou en faussant, avec une intrépidité déplorable, nos citations, en isolant nos phrases, et en nous faisant dire précisément le contraire de ce que nous avons dit. On ne doit que l'oubli et le pardon à de pareilles critiques; on ne doit pas discuter avec le parti pris, la haine et la mauvaise foi.

Nous ne nous arrêterons pas davantage à ces philo sophes de salons qui, pour faire parler d'eux comme savants, puisqu'on ne peut plus parler d'eux comme hommes d'État, viennent de se mettre à faire de la science, avec le même bonheur qu'ils avaient jadis fait de la politique; et qui, pour se donner l'air d'avoir lu saint Thomas, viennent de nous accuser d'avoir cité à contre-sens ce grand docteur. Cette découverte ne leur appartient pas; ils l'ont copiée d'un journal de l'année dernière, et l'ont empruntée au critique, de la bonne foi duquel l'honorable M. Bonnetty avait fait complétement justice, à l'endroit des ANNALES que nous venons de citer.

Ils nous ont reproché aussi de n'avoir jugé les anciens philosophes que sur l'autorité de Cicéron, qui n'était pas philosophe lui-même. Mais ceux qui nous ont lu savent bien que nos appréciations des systèmes des anciens philosophes sont fondées sur d'autres écrivains aussi que nous avons cités; et que nous n'avons pas cité Cicéron comme un grand philosophe luimème, mais comme un témoin de la philosophie des autres, et comme un témoin dont la fidélité et la com

pétence, comme nous l'avons prouvé dans notre Essai (§ 2, p. 88), ne peuvent être raisonnablement suspectes à personne. Enfin, si nous voulions être aussi sévère envers ces critiques qu'ils le sont envers Cicéron, nous pourrions affirmer, et peut-être avec bien plus de raison, que, n'étant pas du tout philosophes, ils n'ont pas le droit à la parole dans des discussions purement philosophiques.

Nous aurions bien voulu continuer à regarder ces critiques comme des hommes aussi sérieux qu'ils sont honorables. Mais, à notre grand regret, nous ne le pouvons plus, puisqu'ils viennent de se révéler euxmêmes au monde comme des esprits fort superficiels; raisonnant des choses philosophiques sans en connaître les premiers mots; abordant les plus graves questions avec une légèreté inouïe; se croyant philosophes parce qu'ils sont des littérateurs distingués ; et oubliant que, à des hommes voulant traiter des thèses philosophiques touchant les plus hauts problèmes de la raison humaine, rien ne saurait faire pardonner la disette de la vraie science, la misère de la pensée, la pauvreté des idées. Nous avouons que nous en avons été humiliés pour eux. Or, à des critiques venant de pareils esprits, comme à des traits décochés par de faibles mains, Telum imbelle sine ictu, on ne doit que de l'indulgence. On ne peut pas plus discuter philosophie avec des grammairiens, que théologie avec des avocats.

D'ailleurs, dans notre brochure Sur la vraie et la fausse philosophie (Paris, 1852, chez Gaume), nous avons répondu d'avance à ces élégants Aristarques. Nous n'avons qu'à les y renvoyer: ils y verront ce que

nous pourrions dire d'eux aussi, et avec plus de droit, et que nous ne voulons pas dire par discrétion.

Mais il n'en est pas de même de quelques observations que des personnes sérieuses nous ont fait parvenir, dans l'intérêt de la vérité et de la religion que nous défendons, et qu'elles défendent, aussi, comme nous et mieux que nous. Des observations venant de ces côtés ont droit à des explications de notre part, que nous nous empressons de donner.

§ 6. Réponse à l'observation: QUE L'AUTEUR DES CONFÉRENCES A TRAITÉ DUREMENT LES PHILOSOPHES. Témoignages de M. Jouffroy sur les horribles ravages que ces philosophes ont faits dans la jeunesse. Ces ravages justifient toute sévérité par rapport à leurs auteurs.

On nous a trouvé d'abord trop sévère et même fort peu charitable dans notre manière d'apprécier les philosophes modernes. Mais si l'on veut nous juger d'après l'esprit plutôt que d'après la lettre, d'après l'ensemble plutôt que d'après les mots isolés de notre polémique, on s'apercevra que notre « sévérité » porte sur la fausse philosophie bien plus que sur les philosophes, sur les erreurs bien plus que sur les personnes. Or, doit-on de la charité, de l'indulgence, des égards aux erreurs? Saint Augustin ne nous a-t-il pas avertis que, dans toute polémique avec les errants, tout en ne cessant pas d'aimer les personnes, on doit être inexorable à combattre, à flétrir, à tuer les erreurs? Diligite homines; interficite errores.

C.

En second lieu, nous ne déprécions pas tous ceux qui ont inauguré en France l'éclectisme et le rationalisme, et qui l'y ont patronné et propagé à l'ombre et sous le prestige de leurs noms et de leur génie. Nous savons que partout, et particulièrement dans ce pays-ci, bien souvent les hommes valent mieux que leurs doctrines, qu'ils finissent par désavouer; et nous ne désespérons pas de voir quelques-uns de ces chefs de l'éclectisme et du rationalisme français, lorsque le moment du désillusionnement sera arrivé, revenir tout bonnement au dogme chrétien, où seulement les grands esprits et les nobles âmes sont parfaitement à leur place et à leur aise.

Troisièmement, on trouve parmi ces philosophes des hommes de bonne foi, égarés par l'ignorance des vraies doctrines ou par un enseignement déplorable, mais désirant et cherchant sincèrement la vérité et dignes de la rencontrer. Pour ces hommes-là, nous n'avons que des égards, de l'estime et de la compassion. Nous ne déprécions, nous ne combattons que ceux qui, avec une mauvaise foi insigne, avec un acharnement infernal, s'obstinent à arracher, de l'esprit et du cœur des jeunes gens, des âmes simples et honnêtes, toute croyance religieuse qu'ils ont désertée, et à leur inspirer, imposer des doctrines funestes, auxquelles ils ne croient pas et dont ils se moquent eux-mêmes.

Semblables aux vendeurs de jeux d'enfants sur les boulevards, ils vous crient à l'oreille, eux aussi : Au choix, au choix! Mais, au moins, les vendeurs de jeux ne vous proposent que le choix d'objets très-innocents qui peuvent amuser l'homme, au lieu que les philoso

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