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philosophique, et s'est reposée, tranquille et heureuse de ses véritables conquètes et de ses progrès, au sein de la plus grande certitude.

Nous avons ensuite abordé la grande question de l'Église (Conférences 4 et 5), et là aussi nous avons prouvé que rien n'est plus raisonnable ni plus légitime que l'hommage que lui rend la raison catholique, et que rien n'est plus injuste ni plus insensé que le dédain avec lequel la raison philosophique se défie de son témoignage et repousse son enseignement.

Après ces aperçus sur les aptitudes et les conditions de ces deux raisons par rapport à la vérité en général, nous avons voulu qu'on les vit à l'œuvre dans leurs différentes appréciations et dans leurs travaux en particulier, touchant les principaux dogmes du christianisme. Nous avons entrepris une exposition large et approfondie de ces dogmes; et, à l'aide des lumières, du savoir des Pères et docteurs de l'Église, ces grands flambeaux de la science catholique, nous avons été assez heureux, à ce qu'on nous assure, pour présenter les dogmes du Dieu TRINE et UN, de l'HOMME et de sa destinée, de JÉSUS-CHRIST et de son Incarnation, comme des dogmes aussi conformes à la raison qu'ils sont grands, sublimes, majestueux, et supérieurs à la raison (Conférences 6, 7, 8° et 9o).

Ce furent les sujets de la première station de nos Conférences et du premier volume de la Raison philosophique et la raison catholique, qui les contient.

L'exposition du dogme de la CRÉATION aurait dù suivre immédiatement celui de l'auguste Trinité; mais ce sujet étant trop vaste pour pouvoir être épuisé dans

deux ou trois conférences, nous l'avons réservé pour la station de 1852, que nous lui avons, en effet, consacrée tout entière.

Nous avons dû démontrer d'abord l'importance de ce dogme capital, de ce premier des articles du Symbole, de ce fondement de toute science et de toute religion, et en même temps la nécessité de traiter à fond aujourd'hui un pareil sujet. C'est ce que nous avons fait dans nos dixième et onzième conférences, en constatant, l'histoire de la philosophie ancienne et moderne à la main, la vérité de la remarque de Lactance et de Bossuet, que TOUTES LES ERREURS, en matière de religion et de philosophie, n'ont été dans tous les temps et ne seront toujours que la conséquence logique, nécessaire, de la négation du dogme de la création.

Mais il n'était pas possible, dans ces deux conférences, de donner à cette thèse tout le développement qu'elle demandait. Nous y avons donc ajouté un Essai sur la philosophie ancienne, que, dans l'impression de ce volume-ci, nous avons placé au milieu de ces mêmes conférences, pour servir d'éclaircissement à l'une et à l'autre, et à toutes celles qui suivent. Dans cet Essai, nous avons démontré, par leurs propres aveux, que les anciens philosophes, ayant tous nié le dogme primitif et traditionnel de la création, sont tombés dans l'athéisme en fait de religion, dans le cynisme en fait de morale, dans le scepticisme en fait de philosophie. Nous n'avons pas manqué de constater que plusieurs de ces philosophes, Platon, Aristote, et Cicéron en particulier, — lorsqu'ils ne faisaient que développer les croyances communes du genre humain, ont écrit de magnifiques

pages sur Dieu, sur l'homme, sur les devoirs. Ils jouaient alors le rôle de théologiens et d'expositeurs. Mais nous avons remarqué aussi que lorsque, en s'isolant des traditions, ils ont voulu établir la vérité par leur raison, lorsqu'ils ne jouaient que le rôle de philosophes, la vérité leur échappait, ne laissant dans leur esprit que quelques idées vagues, incertaines, changeantes; de simples opinions plus ou moins probables, plus ou moins sérieuses, et point de croyances certaines, conslantes, inėbranlables sur ces mêmes sujets; et que ces mêmes hommes, qui avaient si bien parlé de Dieu et de la morale, n'avaient en réalité ni morale ni Dieu.

En nous appuyant sur les argumentations sans réplique de Cicéron chez les anciens, et de Descartes chez les modernes, nous avons particulièrement insisté, dans cet Essai, sur l'impossibilité d'éviter le scepticisme, si l'on ne commence par admettre que l'homme est l'œuvre d'un Dieu créateur. Nous prions notre lecteur de s'arrêter un peu au paragraphe 19 du même écrit; et il ne sera pas médiocrement surpris d'y voir Descartes pressant l'athée, et le défiant de pouvoir être certain de la plus petite chose, en niant le Dieu créateur de l'homme; il ne sera pas médiocrement surpris de voir que Descartes, qu'on regarde comme le premier promoteur du rationalisme moderne, n'établissait cependant que sur la foi au Dieu créateur, le fondement de toute certitude.

L'on sait qu'en partant de la négation du dogme du monde créé du néant, la raison philosophique ancienne et moderne n'a imaginé, n'a pu imaginer que trois hypothèses pour s'expliquer l'existence du monde: ou

1o Que Dieu n'a pas CRÉÉ le monde du néant, mais qu'il l'a FORMÉ d'une matière préexistante, incréée, éternelle comme lui-même; et c'est le DUALISME de Platon et d'Aristote, ou la doctrine des deux principes également éternels, et, par conséquent, également Dieu; ou 2o Que Dieu n'a fait le monde que de sa propre substance; et c'est le PANTHÉISME, ou la doctrine qu'il n'y a qu'une seule substance réelle, celle de Dieu, et que Dieu est tout, et que tout est Dieu; ou, 3° Que Dieu n'a été pour rien dans la formation du monde; mais que le monde est le résultat du mouvement éternel, essentiel à la matière, ou des agglomérations fortuites des alomes; et c'est L'ATOMISME ou le MATÉRIALISME.

Or, dans nos conférences 12°, 13 et 14o, nous attaquons ces trois hypothèses. Nous prouvons d'abord qu'elles ne sont point du tout, comme on le prétend, des inventions, des développements de la raison philosophique moderne, du progrès humanitaire; mais que ce sont de pitoyables erreurs que la raison philosophique ancienne, par des organes bien autrement sérieux que nos philosophes, opposa au dogme catholique de la création, dans les premiers siècles du christianisme, et qui ont été, d'une manière péremptoire, terrassées, pulvérisées, balayées par la puissance du génie des Pères de l'Église. Puis donc que ces erreurs sont si anciennes, il nous a été facile, en second lieu, de les réfuter par des arguments anciens; et ce sont les mêmes Pères de l'Église qui nous ont fourni les armes pour combattre ces mêmes erreurs sous la nouvelle parure avec laquelle elles se sont reproduites de nos jours. Nous avons enfin prouvé, en troisième lieu,

que ces trois erreurs mènent, par des voies différentes, tout droit à l'athéisme et au scepticisme, ou bien qu'elles ne sont que l'athéisme et le scepticisme mêmes, ou l'anéantissement de toute vérité et de toute raison; et que, par conséquent, renouvelées par le rationalisme moderne au nom de la raison, elles sont tout ce qu'on peut imaginer de plus funeste, et en même temps de plus pitoyable, de plus absurde, de plus déraisonnable, et de plus contraire à la raison.

Mais, après avoir détruit, il fallait édifier; après avoir démontré que les systèmes par lesquels la raison philosophique a prétendu remplacer le dogme de la création sont énormément déraisonnables, il fallait démontrer que ce même dogme est au contraire éminemment conforme à la raison, et le seul système que la raison puisse admettre sans se dégrader, pour se rendre compte de l'existence de l'univers.

C'est cette démonstration que, en nous appuyant sur le grand saint Thomas, nous avons donnée dans la quinzième conférence; nous y prouvons que la création du monde du néant est, 1o POSSIBLE, 2o RAISONNABLE, et 3° que, inimaginable par la phantasie, elle est même CONCEVABLE par l'intelligence: saint Paul ayant dit que, par la considération des créatures visibles, les attributs invisibles de Dieu, et particulièrement sa puissance, sont concevables par la raison humaine Invisibilia Dei, per ea quæ facta sunt INTELLECTA conspiciuntur; sempiterna quoque Dei virtus et divinitas (Rom., I).

Enfin, la seizième et dernière conférence de ce volume présente les preuves du même dogme tirées des Livres saints, et l'on y apprend que cette Révélation,

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