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tranquille, à la rencontré de nouvelles ruines. Voyez, en particulier, l'indifférence, l'intrépidité, l'insolence avec lesquelles la raison philosophique de nos jours nie le grand dogme de la CREATION, et se moque de la raison catholique qui lui est restée fidèle.

Hélas! sous ce rapport, on dirait que la science a complétement apostasié la foi. Nos prétendus savants, à de rares exceptions près, ne croient plus que Dieu a créé le monde par la seule puissance de sa parole. Et de là la série épouvantable, mais logique, de toutes les erreurs qui ont entraîné au bord de l'abîme notre vieille société : Filia med male a dæmonio vexatur.

3. Il vaut donc bien la peine de s'occuper de ce dogme divin. Le développer, c'est confondre la raison philosophique qui le rejette; c'est venger la raison catholique qui en fait son bonheur; c'est affermir de plus en plus les esprits sérieux, les àmes dociles, dans leur croyance aux dogmes de la vraie religion.

C'est, M. T. C. F., ce que je me proposé de faire dans le cours de la prédication que j'entreprends aujourd'hui.

Après vous avoir parlé, l'année dernière, de la raison philosophique et de la raison catholique, de leurs principes respectifs, de leurs méthodes, de leurs résultats, touchant la vérité en général, j'avais

commencé à les considérer, ces deux raisons, en particulier, dans leurs rapports avec les principaux dogmes du christianisme. Maintenant, en poursuivant la même marche, je vais vous faire assister à leur travail touchant le dogme de la CRÉATION.

Et, d'abord, c'est de l'importance de ce dogme auguste que je vais vous entretenir importance résultant de l'horrible histoire des erreurs dans les. quelles s'est abîmée la raison philosophique de tous les temps, pour l'avoir nié. Ensuite je traiterai des attaques qu'on lui a livrées, des principes rationnels sur lesquels il repose, de la magnificence avec laquelle il a été révélé, et enfin, de la résurrection des corps humains, qui en est le complément.

Aujourd'hui, c'est des égarements de la raison. philosophique ancienne, ignorant ou voulant ignorer le dogme de la CRÉATION, que nous devons nous occuper. C'est dans la prochaine conférence que nous tracerons le tableau des égarements de la raison philosophique moderne, niant le même dogme.

Vous voyez donc, M. F., que je vais reprendre mes conférences au point où je les ai interrompues au printemps dernier, pour les continuer avec la même méthode, et,-j'ose l'espérer, dans la protection d'en haut et dans votre docilité, avec le même succès et avec le même profit pour vos âmes. Heureux de vous revoir ici m'environnant de vos sympathies et de votre bienveillance, dont je

suis fier, dont je vous suis très-reconnaissant, je pas besoin de vous en demander la continuation. Mais j'ai bien besoin,

n'ai

de et vous aussi, demander à Dieu qu'il vous éclaire de sa lumière, qu'il vous touche par sa grâce, pendant que je vous ferai entendre ma parole, bien simple, vous le savez, mais bien affectueuse et bien intéressée à votre bonheur spirituel. Implorons donc ce secours par l'intercession de Marie : Ave Maria.

4.

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PREMIÈRE PARTIE.

Es choses de la terre, les faits de l'homme peuvent être connus aux archives de l'homme par le témoignage de l'homme; mais les choses du ciel, les faits de Dieu, ne peuvent être connus, dit Lactance, que par la révélation de Dieu : Scientia rerum cœlestium non potest esse in homine, nisi Deo docente, percepta (Institut. lib. VII, c. 12).

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Or, le fait le plus grand, le plus éclatant, le plus magnifique de Dieu, après celui de l'INCARNATION DU VERBE, qui a été le sujet de mes deux dernières Conférences, - est le fait de la CRÉATION DU MONDE. Ce fait a précédé d'ailleurs l'origine, la naissance de l'homme. L'homme n'a donc pu le connaître que parce que Dieu a daigné le lui manifester Non potuit esse, nisi Deo docente, perceptum.

Pour ceux qui ont le bonheur de connaître, par

ce moyen divin, cette grande vérité : Que tout ce qui existe hors de Dieu, jadis n'existait pas, et n'a commencé à exister que par la volonté et la puissance de Dieu, il est facile de se rendre compte de cette même vérité, d'en voir la convenance, la nécessité, en la considérant dans ses rapports avec les attributs de l'Être infini; il est facile de se la démontrer; et, comme nous le verrons plus tard, il est, en quelque manière, facile même de la comprendre.

Mais pour l'homme étranger à la divine révélation de ce dogme, il n'est pas possible de l'atteindre, au moins d'une manière claire et certaine, par le seul moyen du raisonnement. N'ayant aucune idée d'un agent qui puisse faire la moindre chose de rien, l'homme, livré à lui-même, ne se doute pas même que Dieu ait pu créer, que Dieu ait créé en effet le monde de rien. Il croit même bien raisonner en appliquant à l'opération divine, à la puissance infinie, l'axiome: Rien ne se fait de rien, qui n'est vrai que dans son application à la puissance finie, à l'opération humaine, et qui, comme je le démontrerai ailleurs, n'est, par rapport au sujet qui nous occupe, qu'un sophisme et une absurdité. L'homme, en dehors de l'enseignement divin, ne peut former que des conjectures plus ou moins arbitraires, des hypothèses plus ou moins chimériques, des systèmes plus ou moins absurdes; mais il n'est jamais parvenu, il ne parviendra jamais à saisir la vérité précise, la vérité certaine sur l'o

rigine des choses; vérité si simple en elle-même, mais en même temps si sublime, si élevée et si audessus de toutes les idées et de toutes les conceptions humaines : Non potest esse,nisi Deo docente, percepta.

5. Or, c'est précisément cela qui est arrivé aux anciens philosophes.

Dieu avait lui-même révélé aux premiers hommes que l'univers, avec tous les êtres qu'il renferme, est son ouvrage, et qu'il l'a tiré du néant par la seule énergie de sa volonté, par la seule puissance de son Verbe. Et c'est par cette révélation, répandue dans le monde au moyen du langage et de la tradition, que la foi d'un Dieu créateur et gouverneur du monde s'était établie dans le monde.

L'idolâtrie avait altéré, obscurci cette grande vérité, comme elle avait altéré et obscurci toutes les autres vérités de la révélation primitive; mais elle n'avait pas pu la détruire tout à fait, Plongés dans les ténèbres de la superstition, les anciens peuples n'ont jamais cessé (1) de reconnaître, de

(1) « Les connaissances primitives des vérités morales ne « tardèrent pas à s'altérer; mais elles ne purent jamais s'effa«cer entièrement. La grande idée de la CAUSE PREMIÈRE et « de l'origine des choses ne sortit jamais de la société; et toujours le genre humain fut tourmenté du désir ou plutôt « du besoin de connaître ce principe de toute vérité première, objet de toute philosophie (DE BONALD, Recherches, vol. 1, e. 1). Voyez aussi la note à la fin de cette conférence.

a

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