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les Onesti, au Muséum Clémentin, au Capitole, est emporté, pillé, perdu ou vendu. Les Anglais en ont eu leur part, et des commissaires français, soupçonnés de ce commerce, sont arrêtés ici. Mais cette affaire n'aura pas de suite. Des soldats, qui sont entrés dans la bibliothèque du Vatican, ont détruit, entre autres raretés, le fameux Térence de Bembo, manuscrit des plus estimés, pour avoir quelques dorures dont il était orné. 2. A MONSIEUR N.

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A Plaisance, le... mai 1804.

Nous venons de faire un empereur, et pour ma part je n'y ai pas nui. Voici l'histoire. Ce matin, d'Anthouard nous assemble et nous dit de quoi il s'agissait, mais bonnement, sans préambule ni péroraison. Un empereur ou la république, lequel est le plus de votre goût? comme on dit rôti ou bouilli, potage ou soupe, que voulez-vous? Sa harangue finie, nous voilà tous à nous regarder, assis en rond. »Messieurs, qu'opinez-vous?«< Pas le mot. Personne n'ouvre la bouche. Cela dura un quart d'heure ou plus et devenait embarrassant pour d'Anthouard et pour tout le monde, quand Maire, un jeune homme, un lieutenant que tu as pu voir, se lève et dit: »S'il veut être empereur, qu'il le soit; mais, pour en dire mon avis, je ne le trouve pas bon du tout. Expliquez-vous, dit le colonel, voulez-vous, ne voulez-vous pas? Je ne le veux pas, répond Maire. A la bonne heure.<<< Nouveau silence. On recommence à s'observer les uns les autres, comme des gens qui se voient pour la première fois. Nous y serions encore si je n'eusse pris la parole. >Messieurs, dis-je, il me semble, sauf correction, que ceci ne nous regarde pas. La nation veut un empereur, est-ce à nous d'en délibérer?«< - Ce raisonnement parut si fort, si lumineux, si ad rem... que veux-tu? j'entraînai l'assemblée. Jamais orateur n'eut un succès si complet. On se lève, on signe, on s'en va jouer au billard. Maire me disait: »Ma foi, commandant, vous parlez comme Cicéron; mais pourquoi voulez-vous donc tant qu'il soit empereur, je vous prie? Pour en finir, et faire notre partie de billard. Fallait-il rester là tout le jour? Pourquoi, vous, ne le voulezvous pas ? Je ne sais, me dit-il, mais je le croyais fait pour quelque chose de mieux.<< Voilà le propos du lieutenant, que je ne trouve point tant sot. En effet, que signifie, dis-moi.... un homme comme lui, Bonaparte, soldat, chef d'armée, le premier capitaine du monde, vouloir qu'on l'appelle Majesté? Être Bonaparte, et se faire sire! Il aspire à descendre: mais non, il croit monter en s'égalant aux rois. Il aime mieux un titre qu'un nom. Pauvre homme! ses idées sont au-dessous de sa fortune. Je m'en doutai quand je le vis donner sa petite sœur à Borghèse, et croire que Borghèse lui faisait trop d'honneur. 3. A MONSIEUR LE GÉNÉRAL GASSENDI, A PARIS.

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Tivoli, le 12 septembre 1810.

On m'assure, mon général, que vous ou le ministre demandez de mes nouvelles, et que vous voulez savoir ce que je suis devenu, depuis que j'ai quitté le service.

Ma démission acceptée par Sa Majesté, je vins de Milan à Paris, où, après avoir mis quelque ordre à mes affaires, me trouvant avec des officiers de mes anciens amis qui passaient de l'armée d'Espagne à celle An expression borrowed from Corneille, v. page 34, note 1.

du Danube, je me décidai bientôt à reprendre du service. J'allai à Vienne avec une lettre du ministre de la guerre qui autorisait le général Lariboissière à m'employer provisoirement. Cette lettre fut confirmée par une autre du major général de l'armée, portant promesse d'un brevet, et on me plaça dans le quatrième corps, toujours provisoirement. Quelque argent que j'attendais m'ayant manqué pour me monter, j'eus recours au général Lariboissière, dont j'étais connu depuis longtemps. Il eut la bonté de me dire que je pouvais compter sur lui pour tout ce dont j'aurais besoin; et comptant effectivement sur cette promesse, j'achetai au prix qu'on voulut l'unique cheval qui se trouvât à vendre dans toute l'armée. Mais, quand pour le payer je pensais profiter des dispositions favorables du général Lariboissière, elles étaient changées. Je gardai pourtant ce cheval et m'en servis pendant quinze jours, attendant toujours de Paris l'argent qui me devait venir. Mais enfin mon vendeur, officier bavarois, me déclara nettement qu'il voulait être payé ou reprendre sa monture. C'était le 4 juillet, environ midi, quand tout se préparait pour l'action qui commença le soir.' Personne ne voulut me prêter soixante louis, quoiqu'il y eût là des gens à qui j'avais rendu autrefois de ces services. Je me trouvai donc à pied quelques heures avant l'action. J'étais outre cela fort malade. L'air marécageux de ces îles m'avait donné la fièvre ainsi qu'à beaucoup d'autres; et n'ayant mangé de plusieurs jours, ma faiblesse était extrême. Je me traînai cependant aux batteries de l'île Alexandre, où je restai tant qu'elles firent feu. Les généraux me virent et me donnèrent des ordres, et l'Empereur me parla. Je passai le Danube en bateau avec les premières troupes. Quelques soldats, voyant que je ne me soutenais plus, me portèrent dans une baraque où vint se coucher près de moi le général Bertrand. Le matin, l'ennemi se retirait, et, loin de suivre à pied l'état-major, je n'étais pas même en état de me tenir debout. Le froid et la pluie affreuse de cette nuit avaient achevé de m'abattre. Sur les trois heures aprèsmidi, des gens, qui me parurent être les domestiques d'un général, me portèrent au village prochain, d'où l'on me conduisit à Vienne.

Je me rétablis en peu de jours, et, faisant réflexion qu'après avoir manqué une aussi belle affaire, je ne rentrerais plus au service de la manière que je l'avais souhaité, brouillé d'ailleurs avec le chef sous lequel j'avais voulu servir, je crus que, n'ayant reçu ni solde ni brevet, je n'étais point assez engagé pour ne me pouvoir dédire, et je revins à Strasbourg un mois environ après en être parti. J'écrivis de là au général Lariboissière pour le prier de me rayer de tous les états où l'on m'aurait pu porter; j'écrivis dans le même sens au général Aubry, qui m'avait toujours témoigné beaucoup d'amitié; et quoique je n'aie reçu de réponse ni de l'un ni de l'autre, je n'ai jamais douté qu'ils n'eussent arrangé les choses de manière que ma rentrée momentanée dans le corps de l'artillerie fût regardée comme non avenue.

Depuis ce temps, mon général, je parcours la Suisse et l'Italie. Maintenant je suis sur le point de passer à Corfou, pour me rendre de là, si rien ne s'y oppose, aux îles de l'Archipel; et, après avoir vu l'Égypte et la Syrie, retourner à Paris par Constantinople et Vienne.

The principal action of the battle of Wagram was fought on July the 5th and 6th 1809.

BÉRANGER.

SKETCH OF HIS LIFE AND WORKS.1

PIERRE-JEA IERRE-JEAN DE BÉRANGER was born at Paris in 1780. He was descended from an ancient family of soldiers, who though they had fallen into poverty, still bore with some pride the de indicative of their noble descent. Béranger has often made a jest of this distinction, yet he never abandoned it. The boy was brought up very modestly, first at the house of his grandfather, who was a tailor at Paris, next at that of his aunt, who kept an inn at Péronne. There he read some of the best French authors, among others Fénelon, Racine and Voltaire; the latter especially exercised a great influence on the boy's mind. Being fourteen years old he was apprenticed to a printer who taught him the elements of grammar. At the same time he attended at Péronne the lectures of the Patriotic Institute, which had been organized in accordance with Rousseau's ideas on education, and there imbibed thoroughly Republican principles.

At the age of sixteen Béranger returned to Paris, where his father had founded a bank. He showed some ability in business, but already his poetical vocation was becoming apparent, and he began to try his hand at various kinds of poetry.

Béranger's first songs (chansons) were composed at the time of Bonaparte's expedition to Egypt (1798-1799). A few years later the youthful poet, who had fallen into most abject poverty found a patron in Lucien Bonaparte,2 a brother of the first consul, who settled on him the salary he received as member of the French Institute. In 1809 Béranger obtained a clerkship in the office of the University (Ministry of Public Instruction) with the modest annual wages of 1000 francs. However, this pittance was enough to free him from care, and he set himself once more to write songs. A great number of the merriest and most light-hearted pieces of his first recueil belong to this period. This appeared in 1815 and was the cause of his receiving a severe reprimand from his superiors. When in 1821 he published the second, he took good care not to present himself at the office again. This second recueil is distinguished from the first by the great number of patriotic songs it contains, some of which like the Marquis de Carabas and the Requête présentée par les chiens de qualité are biting epigrams on the Bourbon government.

The popularity which these productions had earned for Béranger was further stimulated by persecution. He was prosecuted and sentenced to three months' imprisonment and a fine of five hundred francs. When in prison, he began his third recueil, which appeared in 1825 and for which he was not prosecuted. The fourth which he brought out in 1828 caused him to be condemned to imprisonment for nine months and a fine of 10,000 francs, in spite of the remarkable speech which his counsel, the famous Dupin made in his defence. After the revolution of July, Béranger joined his friends Lafitte and Lafayette in supporting Louis-Philippe as a candidate for the We have followed Vapereau, Dictionnaire des Contemporains. 2 Lucien Bonaparte, prince de Canino (1775-1840).

throne. But he refused every appointment and every mark of distinction which he was offered. He preferred independence to place, an independence which he showed once more in his fifth and last recueil, which he published in 1833.

After the February revolution of 1848 Béranger was elected a representative for the city of Paris by over 200,000 votes. It was in vain that the aged poet declined this honour; the National Assembly singularly enough refused unanimously to entertain his resignation, and did not accept it, till he had repeatedly insisted on it, saying with great good sense that a man may be a very good writer of songs and a very bad maker of laws. Béranger, who had long lived in retirement, first at Passy, then at Fontainebleau and Paris, died in the capital in 1857. After his death, two volumes of his Posthumous works were published, containing his Autobiography, which ends with the year 1850, and his Last Songs, only a few of which are worthy of the productions of his prime.

Béranger is one of the greatest of the French poets of the 19th century. His style is pure, vigorous and concise. It is matter for regret that a great many of his songs offend against morality and religion.

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PRÉSENTÉE PAR LES CHIENS DE QUALITÉ,

POUR OBTENIR QU'ON LEUR RENDE L'entrée libre AU JARDIN DES TUILERIES. (Juin 1814.)

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bis.

Puisque le tyran est à bas,
Laissez-nous prendre nos ébats.
Aux maîtres des cérémonies
Plaise ordonner que, dès demain,
Entrent sans laisse aux Tuileries
Les chiens du faubourg Saint-Germain.1
Des chiens dont le pavé se couvre
Distinguez-nous à nos colliers.

On sent que les honneurs du Louvre
Iraient mal à ces roturiers.

Quoique toujours, sous son empire,
L'usurpateur nous ait chassés,
Nous avons laissé sans mot dire
Aboyer tous les gens pressés.

Quand sur son règne on prend des notes,
Grâce pour quelques chiens félons!
Tel qui longtemps lécha ses bottes
Lui mord aujourd'hui les talons.
Nous promettons, pour cette grâce,
Tous, hors quelques barbets honteux,
De sauter pour les gens en place,
De courir sur les malheureux.

The greater number of the mansions of the old nobility are situated in the Faubourg St. Germain; it is the Legitimist quarter.

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Dans ce Paris plein d'or et de misère,
En l'an du Christ mil sept cent quatre-vingt,
Chez un tailleur, mon pauvre et vieux grand-père,
Moi, nouveau-né, sachez ce qui m'advint.

Rien ne prédit la gloire d'un Orphée

A mon berceau, qui n'était pas de fleurs,

Mais mon grand-père, accourant à mes pleurs,
Me trouve un jour dans les bras d'une fée.
Et cette fée, avec de gais refrains,
Calmait le cri de mes premiers chagrins.

1 Vavassal or vavasseur the vassal of a vassal.

2 Vilain was the contrary of gentil; the vilains hommes or simply vilains i. e. the roturiers (burghers and peasants) being distinguished from the gentilshommes, the nobility.

3 Blason v. p. 357, n. 1.

The droit de tabouret, v. p. 140, n. 1.

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