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Auteurs à consulter : Duguald-Stewart, Esquisses, p. 147–157. - V. Cousin, Fragments, p. 280 et 287. — Id., Cours d'histoire de la philosophie, année 1829, leç. 25, p. 536-538.

CHAPITRE X.

Destinée de l'homme. Preuves de l'immortalité de l'âme.

I. Dans l'ordre de la création, chaque être a sa fin qui lui est assignée; et chaque être aussi, en tendant à cette fin qui lui est propre et qu'il doit atteindre, concourt pour sa part à la fin de l'ensemble.

Parmi les êtres, les uns, et c'est le plus grand nombre, tendent à leur fin et l'accomplissent sans avoir, en aucune façon, ni l'intelligence de cette fin, ni la conscience des moyens qui leur sont donnés de l'atteindre. Telle est la condition du minéral enseveli au sein de la terre, et de la fleur qui s'élève à sa surface. Passé ces deux degrés inférieurs de la création, il n'en va pas tout-à-fait ainsi; et bien que nous ayons contre nous l'autorité d'un grand nom, nous n'oserions pas refuser à l'animal une sorte de conscience, aussi confuse et aussi vague que l'on voudra, mais réelle, pourtant, de la fin qui est la sienne, et nous croyons que cette fin, qui n'est autre

que le bien-être, lui est suffisamment indiquée el révélée par ses instincts.

S'il y avait doute pour ce qui regarde l'animal, il n'en saurait y avoir pour l'homme. L'homme a aussi des instincts révélateurs de la fin vers laquelle il doit tendre; tous les penchants de sa nature le font aspirer au bien-être, au bonheur.

Mais il n'en est pas absolument de l'homme comme de l'animal à qui l'instinct seul révèle sa destinée. L'homme est encore doué de raison, et la raison lui prescrit aussi de tendre au bienêtre, avec cette différence, toutefois, que la sensibilité le pousse à ce but par toutes les voies, per fas et nefas, tandis que la raison lui impose la rigoureuse et imprescriptible obligation de n'y arriver que par le mérite et la vertu.

Il y a donc dans l'esprit humain une liaison intime, indissoluble, entre les idées de vertu, de mérite et de bonheur. La destinée de l'homme est donc d'arriver au mérite par l'accomplissement du devoir, et par le mérite au bonheur.

II. D'autre part, le principe absolu du juste est dans l'esprit humain. Or, ce principe moral transporté de l'homme à l'être absolu, à Dieu, que nous avons obtenu à l'aide des quatre principes métaphysiques de causalité, d'intentionnalité, d'unité et de substance, nous conduit irrésistiblement à reconnaître en Dieu un nou

veau caractère, celui d'un être doué de l'absolue justice, et qui, en conséquence de cet attribut, juge la vertu digne de bonheur et le vice digne. de châtiment.

Or, ce bonheur et ce châtiment se réalisent-ils en ce monde? Il est trop vrai que non; car, souvent, le vice triomphe, tandis qu'à la vertu sont réservées les inquiétudes, les tortures de la lutte morale, les déchirements de l'ame résultats de cette lutte, les calomnies, les persécutions. Il faut donc, de toute nécessité, que l'ordre bouleversé ici-bas trouve ailleurs son redressement; car, autrement, Dieu ne serait plus juste, ce qui serait contradictoire; et d'un autre côté, l'homme n'atteindrait pas la fin qui lui est assignée, ce qui ne saurait se concevoir davantage. De là, nécessité d'une autre vie, immortalité de l'ame. « La loi du mérite et du démérite me » donne l'immortalité de l'ame, comme le principe moral me donne la justice divine; et la >> conception d'une vie à venir et de la réalisa» tion future de l'harmonie légitime de la vertu >> et du bonheur me fait consentir sans peine » aux misères de cette vie. Je conçois que cet >> ordre de choses est un acte passager, et que » l'ordre éternel que révèlent les principes ab» solus de la justice et du mérite sera rétabli » dans un autre monde, où l'absolu vivra enfin

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» de la vie pure de l'absolu. » (COUSIN, Frag. philos.)

III. On pourrait trouver une autre preuve encore de l'immortalité de l'ame dans la croyance universelle. Sans doute, ce dogme de l'immortalité, le même chez tous, quant au fond, cesse de l'être quant à la forme, et varie sous ce dernier rapport suivant les lumières de chaque époque et de chaque peuple. Mais il faut reconnaître, toutefois, que partout et toujours a existé et s'est maintenue la croyance en cette immortalité; et cela, non pas seulement à tel ou tel degré de civilisation, mais à tous les degrés possibles. Or, une telle croyance porte avec elle tous les caractères de la vérité.

Auteurs à consulter: Platon, Phedon, traduction de M. Cousin, avec l'Argument. - Duguald-Stewart, Esquisses de philosophie morale, p. 157-169. V. Cousin, Fragments, p. 282-290 de la Id., Argument du Gorgias.

troisième édition.

Jouffroy

Mélanges philosophiques, article Du problême de la destinée Schon, Philosophie transcendantale d'Emmanuel

humaine.

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Kant, P.

314-315.

CHAPITRE XI.

Morale religieuse, ou devoirs de l'homme envers Dieu.

I. Les devoirs de l'homme envers lui-même constituent la morale individuelle; les devoirs

de l'homme envers ses semblables, la morale sociale; les devoirs de l'homme envers Dieu, la morale religieuse.

Les devoirs de ce dernier genre sont tout aussi réels ceux que que l'homme a à remplir envers lui-même ou envers ses semblables. Seulement, comme ces devoirs supposaient préalablement démontrée l'existence de Dieu, nous avons dû en renvoyer l'examen à la fin de la théodicée.

On voit d'abord que se soumettre en tous points à la loi morale, ou accomplir tous les devoirs envers ses semblables et envers soimême, c'est en même temps se soumettre à la loi de Dieu.

Mais il y a encore pour l'homme quelques devoirs spéciaux à remplir envers la divinité. Ces devoirs se résument ainsi qu'il suit : culte intérieur, culte extérieur, culte public.

Le culte intérieur se compose de l'amour et de la reconnaissance pour la bonté de Dieu, de la soumission à ses décrets, du respect envers sa toute-puissance, de la crainte envers sa justice, de l'hommage et de l'adoration envers son intelligence et sa sagesse infinies.

Le culte extérieur consiste dans la manifestation des sentiments dont l'énumération vient d'être faite. La prière mentale est certainement chose bonne; mais elle ne saurait suffire. Livrée

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