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CHAPITRE VIII.

Des principaux attributs de Dieu, de la divine providence et du plan de l'univers.

I. Les attributs de Dieu peuvent, comme son existence, être déterminés par une double méthode, savoir, la méthode à priori, et la méthode à posteriori.

II. L'esprit humain conçoit l'infini en même temps que le fini. L'un lui est donné dans l'autre par une indissoluble association. Or, l'infini, c'est la réunion de toutes les perfections possibles au plus haut degré possible. Donc cette conception qui est en nous, de l'infini, équivaut à la perception d'un être infiniment parfait, c'est-à-dire infiniment puissant et intelligent, infiniment sage, infiniment bon, infiniment juste; et c'est ici la preuve à priori des attributs de Dieu.

L'intelligence qui conçoit tout, la puissance qui fait tout, la sagesse, qui règle tout, la bonté qui dispense les bienfaits, la justice qui récom pense ou punit, s'expriment par un seul nom, celui de providence ; et voilà démontrée ainsi, à priori, l'existence de la providence divine.

Mais elle peut l'être encore à posteriori, pourvu

qu'on veuille bien arrêter ses regards sur le plan de cet univers. Dans l'ordre établi parmi tous les éléments qui le composent, on ne peut nier qu'un dessein ne se manifeste qui porte en soi tous les 'caractères de l'unité, de l'intelligence, de la sagesse, de la puissance, de la bonté. Les points suivants peuvent fournir à ce sujet matière à réflexion :

L'appropriation de la conformation organique et des instincts des animaux aux lois du monde matériel ;

L'appropriation de la conformation et des instincts des animaux aux climats et aux zones de température sous lesquels ils doivent vivre ;

Les rapports entre la nature physique ou intellectuelle de l'homme et les circonstances extérieures au milieu desquelles il est placé ;

Enfin, les analogies que nous pouvons remarquer entre toutes les parties de l'univers qui tombent sous nos sens.

III. Toutes ces considérations, qui pourraient servir au besoin de preuves à l'existence de Dieu, si des preuves spéciales n'avaient déjà été données, démontrent en même temps sa puissance, son intelligence, sa sagesse, sa bonté. Quant à la justice de Dieu, elle ne peut être démontrée à posteriori; car, il faut en convenir, nous n'avons que trop souvent en ce monde le spectacle de la

vertu malheureuse et du vice triomphant. Toutefois, la preuve à priori de la justice de Dieu reste inattaquable, et ainsi l'existence de la Providence divine se trouve démontrée par le concours de deux genres d'arguments, les uns déduits de principes indépendants de l'expérience, les autres s'appuyant sur l'ordre systématique des choses et sur les rapports des moyens à la fin.

Auteurs à consulter : Duguald-Stewart, Esquisses, p. 144-145. - V. Cousin, Fragments, p. 312 et suiv. de la troisième édition.

CHAPITRE IX.

Examen des objections tirées du mal physique et du mal moral.

I. Quelques philosophes ont cru trouver, dans l'existence du mal physique et du mal moral, incompatibilité avec la bonté, la justice, la sagesse et la puissance de Dieu, et de-là ont été conduits à lui contester ces attributs.

II. Le mal physique et le mal moral existentils? Oui. Leur existence détruit-elle en Dieu la puissance, la sagesse, la bonté, la justice? Nous ne le pensons pas.

Nous ne dirons pas avec quelques uns que

tout est au mieux, ni avec d'autres que les maux particuliers concourent à produire le bien général; la première assertion trouverait son démenti dans l'expérience, la seconde dans la

raison.

Mais nous constaterons d'abord un fait: c'est que les maux physiques et moraux sont loin d'être aussi nombreux et aussi graves que certains esprits chagrins ou subtils ont paru le croire. Peut-être, au reste, l'homme est-il naturellement porté à s'exagérer le mal et à ne point prendre garde au bien. On note, dit Voltaire, un jour de tempête, mais on ne tient pas compte de cent jours de beau temps. A toute époque on a beaucoup déclamé contre les misères de toute espèce qui assiégent l'existence, et, de tout temps aussi, on a cherché à prolonger cette existence autant que possible; ce qui semblerait prouver qu'elle n'était pas aussi déplorable qu'on voulait bien le dire, et que si elle n'était pas heureuse de tout point, elle était du moins supportable. C'est toujours le pauvre bûcheron qui appelle la mort, et qui, lorsque la mort vient, la prie en grâce de vouloir bien l'aider à recharger son fardeau.

III. A cette fin de non-recevoir opposée aux exagérations trop fréquemment avancées et aussi trop légèrement adoptées en cette matière, nous

joindrons quelques judicieuses et consolantes réflexions empruntées à M. Cousin, lesquelles nous paraissent une réponse satisfaisante à l'objection, renfermée dans les limites de la vérité.

« La fin de l'homme et le but de l'existence >> humaine n'étant pas seulement le bonheur, » mais le bonheur dans la vertu et par la vertu, » la vertu en ce monde est la condition du >> bonheur dans l'autre vie; et la condition >> inévitable de la vertu dans ce monde est la » souffrance. Otez la souffrance, plus de rési>> gnation, d'humanité, plus de vertus pénibles, >> plus de sublime morale. Nous sommes sen»sibles, c'est-à-dire soumis à la souffrance >> parce que nous devons être vertueux, et parce » que nous ne pouvons être vertueux que par >> le sacrifice de la sensibilité à la raison morale.

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S'il n'y avait pas de mal, il n'y aurait plus de » dévouement moral, et ce monde serait mal adapté à la destination de l'homme. Les dé>> sordres accidentels et les maux imprévus qui » en résultent ne sont pas des désordres et des » maux échappés à la puissance et à la bonté de >> Dieu; Dieu non-seulement les permet, mais » il les veut. Il veut qu'il y ait dans le monde physique, pour l'homme, un grand nombre » de sujets de peines, afin qu'il y ait pour lui » des occasions de résignation et de courage. ».

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