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vation attentive, scrupuleuse, impartiale et complète, à la recherche des faits, sans en imaginer, en négliger ou en altérer aucun. Ce premier travail une fois fait, sur ces phénomènes ainsi recueillis et constatés, elle base une induction, moyennant laquelle elle pose les lois générales qui président à la constitution de l'esprit humain; tout comme, dans l'ordre physique, on applique aux faits sensibles, observés et constatés, un procédé de généralisation comparative, d'où l'on tire la formule des lois qui gouvernent l'univers matériel. Tel est, à notre avis, la vraie méthode philosophique.

VI. La question de la méthode une fois résolue, il nous reste, pour achever ces prolégomènes, à déterminer de quelles parties se compose l'étude de la philosophie morale, et dans quel ordre relatif ces parties doivent être disposées.

La philosophie morale, ainsi que nous l'avons établi, a pour objet, d'une part, l'étude de l'esprit humain considéré dans ses modes, ses puissances, la légitimité de ses facultés, sa fin en cette vie et sa destinée future; et, d'autre part, l'étude de Dieu dans son existence, ses attributs, son action providentielle sur le monde et sur l'homme.

Eh bien! la partie de cette science qui a pour

objet de déterminer l'existence des facultés ou puissances de l'esprit humain, moyennant la recherche préalable de ses différents modes, c'est la psychologie.

La partie qui traite de la légitimité des facultés cognitives, c'est la logique.

La partie qui traite de la légitimité des facultés actives, c'est la morale.

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La partie qui traite de Dieu, de son existence, de ses attributs et de sa providence, c'est la théodicée.

Lorsqu'on a arrêté quelque temps son attention sur les problêmes que nous venons de mentionner, il est naturel, nécessaire même, de se demander quelles ont été, sur ces mêmes questions, les opinions des divers philosophes et des écoles auxquelles ils appartiennent; de quelles manières ces questions ont été, par eux, exposées et discutées; sous quels points de vue semblables ou différents, elles ont été envisagées et résolues. Eh bien ! l'exposé des opinions des diverses écoles, relativement à ces problêmes philosophiques, constitue une dernière partie, appelée histoire de la philosophie.

Quant à l'ordre dans lequel ces parties doivent être disposées, cet ordre nous paraît être celui-là même qui vient d'être indiqué, à savoir: psychologie, logique, morale, théodicée, his

toire de la philosophie. Et cet ordre ne peut être rationnellement interverti. Car, par exemple, débuter par l'histoire de la philosophie, ne serait-ce pas aller du plus complexe au moins complexe ? et n'est-ce là pas là m un procédé évidemment réprouvé par le bon sens et par toute bonne logique ? On ne saurait non plus rationnellement débuter par la théodicée. Car la théodicée a pour objet le non-moi, et l'on ne saurait aller légitimement du non-moi au moi. Restent donc la morale, la logique et la psychologie. Mais qui ne sait, d'une part, qu'on ne peut légitimement aborder la science du bien qu'après avoir traversé celle du vrai, et, d'autre part, qu'on ne saurait envisager les facultés soit actives, soit cognitives, dans leur légitimité, avant d'avoir, par des procédés scientifiques, déterminé et constaté leur existence et leurs caractères. La logique doit donc venir avant la morale, et la psychologie doit les précéder toutes deux.

Auteurs à consulter : Tennemann 1, Manuel de l'histoire de la philosophie, trad. 45-56. V. Cousin, introduction, p. par Reid, œuvres complètes, publiées par M. Jouffroy, t. 3, p. 56, des hypothèses. - Duguald-Stewart, Esquisses de philosophie morale, introduction. Matthiæ, Manuel de philosophie, trad. de l'alle

à

Dans cette note et dans les suivantes nous nous sommes attachés

ranger suivant l'ordre chronologique les noms des auteurs à

consulter.

mand par M. Poret, préface de l'auteur et introduction. - V. Cousin, Premiers fragments, essai d'une classification des questions et des systèmes philosophiques. Id., ibid., p. 313 et suiv. — Id., préface de la deuxième édition des Premiers fragments, p. 6-12. Id., préface de la première édition des Premiers fragments, 3-11. Id., Introduction à l'histoire de la philosophie, ann. 1828, première et deuxième leçons. Damiron, Cours de psychologie, préface.

P.

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I. La psychologie a pour objet de constater les phénomènes qui se passent au sein de l'esprit, de ranger ces phénomènes en différents ordres, suivant les rapports de similitude ou de dissimilitude qu'ils offrent entr'eux, et de déterminer l'existence des facultés ou puissances de l'âme, qui sont le principe de ces diverses classes de phénomènes.

II. Dans l'ordre des études relatives à l'esprit humain, la psychologie doit nécessairement occuper la première place, et venir avant la morale et même avant la logique. « En effet,

» que peut être la logique, c'est-à-dire la con>> naissance des règles qui doivent diriger l'esprit

»

humain, sans la connaissance de ce qu'il s'agit » de diriger, savoir, l'esprit humain lui-même? >> Et que peut être la morale, c'est-à-dire la con»> naissance des règles de nos actions, sans celle » du sujet même de toute morale, de l'agent » moral, de l'homme lui-même? Il faut donc » reconnaître que la psychologie, sans être assu» rément toute la philosophie, en est le fonde» ment et le point de départ. » (COUSIN '.)

>>

III. Maintenant, y a-t-il réellement une science psychologique? En d'autres termes, peut-on arriver à la connaissance des phénomènes du for intérieur? Oui, on le peut, moyennant l'exercice du sens intime ou de la conscience, et nous entendons par-là cette faculté dont jouit l'esprit humain d'être incessamment averti de ce qui se passe dans ses profondeurs. << La conscience, dit M. Jouffroy, c'est le sentiment. >> que le principe intelligent a de lui-même. Ce principe se sent, et parce qu'il se sent, il a >> conscience de tous les changements, de toutes » les modifications qu'il subit. Les seuls phéno

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P.

› Cours de l'histoire de la philosophie, t. 2, P. 98.

Préface des Esquisses de philosophie morale de Stewart, 22-23.

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