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Laert.

laiffe pas de porter fon nom: l'art de difputer fur toutes chofes, fans prendre jamais d'autre parti que de fufpendre fon jugement, s'appelle Pyrrhonifme. Les difciples de Pyrrhon s'appelloient auffi Sceptiques, d'un mot grec To- qui fignifie confiderer, examiner, parce que c'étoit là où terminoit tout leur travail.

L'indifference de Pyrrhon est étonmante; & fi tout ce que Diogéne de Laerce en rapporte eft vrai, elle alloit jufqu'à la folie. Cet Hiftorien dit, qu'il ne préferoit rien à rien, qu'un chariot & un précipice ne l'obligeoient point à faire un pas en arriere ou à côté, & que fes amis qui le fuivoient lui fauverent fort fouvent la vie. CepenAriftocles dant un jour il prit la fuite pour se ga apud Eu- rantir d'un chien qui le poursuivoit, feb. Prap. Et comme on le railloit fur cette crainEvang. te contraire à fes principes, & indicap. 18. gne d'un Philofophe: Il est difficile, répondit-il, de dépouiller entierement l'homme.

lib. 14.

Laert.

Anaxarque fon maître étant tombé dans un foffé, il paffa outre fans daigner lui tendre la main. Loin qu'Anaxarqe lui en fût mauvais gré, il bla ina ceux qui reprochoient à Pyrrhon

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une dureté fi inhumaine, & loua fon difciple de cet efprit indifférent & qui n'aimoit rien. Que deviendroit la focieté & le commerce de la vie avec de tels Philofophes ?

Pyrrhon foutenoit qu'il n'importe Stobaus pas plus de vivre que de mourir, ou fermone, de mourir que de vivre. Pourquoi donc 118. ne mourez-vous pas ? lui demanda-t-on. C'est à cause de cela même, répondit-il : parce que la vie la mort font égale

ment indifférentes.

Il enfeignoit ce dogme abomina- Laërt. ble, & qui ouvre la porte à tous les crimes Que l'honneur & l'infamie des actions, leur juftice & leur injustice, dépendoient uniquement des loix humaines & de la coutume: en un mot, qu'il n'y avoit rien en foi-même d'honnête & de honteux, de jufte & d'injufte.

Sa patrie le confidera extrêmement, Laërte lui conféra la dignité de Pontife, & en fa faveur, accorda une exemtion des tributs à tous les Philofophes : conduite bien finguliere à l'égard d'un homme que l'on combloit d'honneurs, pendant qu'il ne lui étoit dû que des fupplices!

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Laert.

AN. M. 3663.

Lairt.

AN. M, 3399.

De Finib.

lib. I. n.

65.

§. IV.

Secte Epicurienne.

EPICURE, l'un des plus grands Philofophes de fon fiécle, naquit à Gargettium dans l'Attique, la troifiéme année de la CIXe Olympiade. Son pere Néoclès, & fa mere Chereftrata, furent du nombre des habitans de l'Attique que les Athéniens envoierent dans l'ile de Samos. C'est ce qui fit. qu'Epicure paffa dans cette Ile les années de fon enfance.

Il ne revint à Athénes qu'à l'âge de dix-huit ans. Ce ne fut pas pour s'y fi xer: car quelques années après il alla trouver fon pere qui demeuroit à Cclophon; & depuis il féjourna en diférens endroits. Ce ne fut qu'environ à l'âge de trente-fix ans qu'il s'établit pour toujours à Athènes.

Il y érigea une Ecole dans un beau jardin qu'il avoit acheté. Une foule incroiable d'auditeurs vint bientôt de toutes les villes de la Gréce, de l'Afie, & de l'Egypte même, pour rece voir fes leçons. Si l'on en croit Torquatus, ardent défenfeur de la fecte Epicurienne, les difciples d'Epicure

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vivoient en commun avec leur Maître dans une union parfaite. Et au lieu que, dans toute l'antiquité, à peine comptoit-on pendant plufieurs fiécles trois couples de vrais amis, Epicure avoit fû en réunir des troupes nombreufes dans une affez petite maifon. Eufeb. Prap. Le philofophe Numénius, qui vivoit Evangel. dans le fecond fiécle, remarque qu'à lib. 14. travers les difcordes & les divifions cap. 5. qui regnoient dans chacune des autres fectes, l'union des difciples d'Epicure s'étoit confervée jufqu'à fon tems. Son Ecole ne fe divifa jamais: on y fuivit toujours fa doctrine comme un ora- Plin. lib. cle. Son jour natal étoit encore fo. 34.cap.2. lennifé du tems de Pline le Naturalif te, c'est-à-dire plus de quatre cens ans après fa mort on fètoit meme le mois entier de fa naiffance. Son portroit fe trouvoit par tout.

Epicure compofa un grand nombre de livres, on les fait monter à plus de trois cens il fe piquoit de n'y rien citer, & de tirer tout de fon propre fond. Quoiqu'il ne nous en refte

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a Epicurus una in domo, & ea quidem angusta, quàm magnos, quantaque amoris confpiratione confentientes tenuit amicorum greges! Cic

aucun, il n'y a point d'ancien Philofophe dont les fentimens foient plus connus que les fiens. On en eft fur tout redevable, fans parler de Ciceron dans fes œuvres Philofophiques, au poëte Lucréce, & à Diogéne Laërce. Le favant Gaffendi a ramaffé avec beaucoup d'exactitude tout ce qui fe trouve fur la doctrine & fur la perfonne d'Epicure dans les anciens livres.

Il mit dans une extrême reputation le fyftême des Atomes. Nous verrons qu'il n'en étoit pas l'inventeur, mais qu'il y changea feulement quelques chofes. Son dogme fur le fouverain bonheur de l'homme, qu'il met dans le plaifir, contribua beaucoup à décrier fa fecte, & à la faire valoir: il en fera auffi parlé dans la fuite, comme de fes fentimens fur la nature des dieux, fur la Providence, & fur le destin.

L'éloge que fait d'Epicure Lucréce fon fidele Interprête, nous marque ce qu'on doit penfer du fyftème de ce Philofophe. Il le repréfente comme le premier des humains qui ait eu le -courage de s'élever contre les préjugés qui aveugloient l'univers, & de fecouer le jong de la Religion qui jufqu'à lui avoit tenu tous les hom

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