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s'emparaffent, pour ainfi dire, de leurs oreilles comme d'une place encore vacante, à travers laquelle le vice & la vertu peuvent également pénétrer juf qu'au fond du cœur ; & que ces fages & vertueux difcours, comme de fidéles gardiens en tinffent l'entrée févérement fermée à toutes les paroles capables d'altérer le moins du monde la pureté des mœurs, jufqu'à ce que, par une longue habitude, ils euffent fortifié les jeunes gens, & mis leurs * oreilles en fureté contre le fouffle empefté des mauvaifes converfations.

Plut. de

Selon Xénocrate, il n'y a de vérita- virt.moral bles Philofophes que ceux qui font de pag. 446. bon gré & de leur propre mouvement, ce que les autres ne font que par la crainte des loix & de la punition.

Il compofa plufieurs ouvrages, l'un Diog.

entr'autres fur la maniére de bien re

A a 2 . gner:

* Il emploie une comparaison tirée des Athletes qui fe battoient à coups de poings, & qui couvroient leur tête & leurs ore lies d'une efpece de calote, pour amortir la violence des coups. Il dit que cette précaution of bien p'us néceffaire aux jeunes gens. Cartout le rijque que courent les Athletes, c' d'avoir les oreil les déchirées, au itu que les autres courentrif que de perdre leur innocence, & ae je perdre gux.mêmes.

Laert.

Ding. Laërt.

gner: du moins Alexandre le lui avoit demandé.

Il ne perdoit guéres de tems en vi fites. Il aimoit beaucoup la retraite du cabinet, & méditoit beaucoup. On le voioit très rarement dans les rues : mais quand il y paroiffoit, la jeuneffe débauchée n'ofoit y refter, & s'écartoit pour éviter fa rencontre.

Un jeune Athénien, plus vicieux que tous les autres, & abfolument Val. Max. décrié pour fes déréglemens dont il lib. 6. c. 9. faifoit gloire, (il s'appelloit Polémon)

n'eut pas la même retenue. Au fortir d'une partie de débauche, paffant devant l'Ecole de Xénocrate, & en aianţ trouvé la porte ouverte, il y entra, plein de vin, tout parfumé d'effence & portant une couronne fur la tête & prit féance parmi les auditeurs moins pour écouter que pour infulter. Toute l'affemblée fut étrangement furprife & indignée. Xénocrate, fans fe démonter, fans changer de vifage, changea feulement de difcours, & fe mit à parler fur la tempérance & la fobriété, dont il fit valoir tous les avantages, en leur oppofant la honte & la turpitude des vices oppofés à ces vertus. Le jeune libertin

qui écoutoit avec attention, ouvrant les yeux fur la difformité de fon état eut honte de lui-même. La a couronne lui tombe de deffus la tête, il baif fe les yeux, s'enferme fous fon manteau, & au lieu de cet air enjoué & pétulant qu'il avoit montré en entrant dans l'école, il paroit férieux & réveur. Enfin il fe fit un entier changement en lui; & guéri abfolument de fes paffions par un feul difcours, d'infame débauché qu'il étoit, il devint un excellent Philofophe, & répara heureusement les defordres de fa jeuneffe par une vie fage & réglée, qui ne fe démentit jamais.

Xénocrate mourut âgé de 82 ans la AN. M. 1ere, année de la CXVIe Olympiade. 3683. Av. J. C

POLEMON. CRATES. CRANTOR. 316.

JE JOINS ces trois Philofophes fous un même titre, parce qu'on connoit peu de chofes de leur vie.

POLEMON remplit dignement la chaire de Xénocrate fon Maître, &

a

~A a 3
Facias-ne quod olim

ne

Mutatus Polemon? Ponas infignia morbi,
Fafciolas, cubital, focalia; potus ut ille
Dicitur ex collo furtim carpfifle coronas,
Poftquam eft impranfi correptus voce magiftri.
Horat. Jatyr. 3. lib. 3.

1

ne s'écarta jamais de fes fentimens, ni des exemples de fageffe & de fobrieté qu'il lui avoit donnés. Il renonlib. 2. pag. ça tellement au vin depuis l'âge de

Athen.

44.

Horat.
Epift.

2. lib. I.

trente ans, qui fut l'époque du changement célébre qui arriva dans fa conduite, qu'il ne but plus que de l'eau tout le refte de fa vie.

CRATES qui lui fuccéda, eft peu connu, & doit être diftingué d'un philofophe Cynique qui porta le même nom, & dont il fera parlé dans la fuite.

CRANTOR fut plus célébre. Il étoit de Soli en Cilicie. Il quitta fon pays natal pour fe rendre à Athénes, où il fut difciple de Xénocrate avec Polémon. Il a paffe pour l'un des piliers de la fecte Platonique. Ce qu'en dit Horace, en faifant l'éloge d'Homére, marque le cas qu'on faifoit de ce Philofophe, & combien fes principes de morale étoient eftimés.

Qui quid fit pulchrum quid turpe, quid utile, quid non,

Pleniùs ac melius Chryfippo & Crantore dicit

On n'en peut pas dire autant de ses

princia Crantor ille, qui in noftra Academia vel in primis fuit nobilis. Cic. Tufc. Quest lib. 3. n. 12.

principes fur la nature de l'ame, comme nous le verrons dans fon lieu..

pag. 104.

Il avoit fait un Livre de Confolation Plut. de qui s'eft perdu: il étoit adreffé à Hip. Confol. poelès, à qui une mort promte avoit enlevé tous fes enfans. On a en parloit comme d'un Livre tout d'or, & qui méritoit d'ètre appris par cœur mot pour mot. Ciceron en avoit fait grand ufage dans un Traité qui portoit le même titre. Il eut pour difciple Arcéfilas, auteur de la moienne Acadé mie.

§. II.

De la moienne Académie.

ELLE eft ainfi appellée, parce qu'elle fe trouve entre l'ancienne établie par Platon, & la nouvelle qui le fera bientôt par Carnéade.

ARCESILA S.

ARCESILAS naquit à Pitane dans Diog. l'Eolie. Etant venu à Athénes, il fe Laert. in rendit le difciple des plus habiles phi

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a Legimus omnes Crantoris, veteris Academici, de luctu: eft enim non magrus, verùm aureolus, &, ut Fuberoni Panætius præcipit, ad verbum edifcendus libellus.. Acad. Queft. lib. 4. n. 135.

Arcefil.

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