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HYPERIDE.

a

HYPERIDE avoit été d'abord anditeur & difciple de Platon. Il fe tourna enfuite du côté du barreau, & il y fit admirer fon éloquence. Son * ftile avoit beaucoup de douceur & de délicateffe: mais il n'étoit propre que pour les petites caufes. Il fe trouva uni avec Lycurgue pour le maniement des affaires publiques, dans le tems qu'AJexandre attaqua les Grecs, il fe déclara toujours ouvertement contre ce Prince. Après la perte de la bataille près de Cranon, les Athéniens étant prêts de le livrer à Antipater, il s'enfuit à Egine, & étant parti de là, il fe fauva dans un temple de Neptune, d'où il fut arraché, & conduit à Corinthe vers Antipater, qui le fit appliquer à une cruelle queftion pour tirer de lui quel ques fecrets & quelques éclairciffe mens dont il avoit befoin. Mais, dans la crainte d'être forcé par la violence de la douleur à trahir fa patrie & fes amis, il fe coupa la langue avec les dents, & expira dans les tourmens.

DI

• Dulcis in primis & acotus Hyperides: fed minoribus caufis, ut non dixerim utiliora magis par, Quintil. lib. 1. cap. I.

DINARQUE.

DINARQUE, natif de Corinthe Plut. in felon quelques-uns vint s'établir à Dis. Athénes dans le tems qu'Alexandre pouffoit fes conquêtes dans l'Afie. П fut difciple de Théophrafte qui avoit pris la place & l'Ecole d'Ariftote, & fit auffi une liaison particuliére avec Démétrius de Phalére. Il ne plaidoit pas par lui- mème, mais compofoit des plaidoiers pour ceux qui avoient des procès. Il fe propofa pour modéle Hypéride, ou plutôt felon d'autres Démofthéne, dont le ftile vif & véhément convenoit mieux à fon caractére.

Changement arrivé chez les Grecs
dans l'Eloquence.

L'ESPACE qui s'est écoulé depuis Périclès jufqu'à Démétrius de Phalére dont nous allons parler, a été le beau tems de l'Eloquence chez les Grecs: efpace eft à peu près de cent trente

cet

ans.

Avant Périclès la Grèce avoit eu

beaucoup de grands hommes pour le
gouvernement, pour la politique,
pour la guerre; & l'on y avoit vù une
foule d'excellens Philofophes :
Q 6

mais

P'Elo

l'Eloquence étoit peu connue. Ce fut lui, comme je l'ai déja obfervé qui le premier la mit en honneur, qui en montra la force & le pouvoir, & qui en fit naître le goût. Ce goût ne fut pas commun à toute la Grèce. Parlet-on dans ces tems-là de quelque Orateur Argien, Corinthien, ou Thébain? Il fe renferma dans Athénes qui porta dans les cinquante derniéres années de l'efpace dont je parle ce grand nombre d'illuftres Orateurs, dont le méri te lui a fait tant d'honneur, & a rendu fa réputation immortelle. Tout ce tems-là fut comme le régne de la faine & de la vraie Eloquence, qui ne connoit & n'admet d'autre parure qu'une !Brut. in beauté naturelle & fans fard. Hac atas effudit hanc copiam; &, ut opinio mea fert, fuccus ille & fanguis incorrup tus ufque ad hanc ætatem oratorum fuit, in quo naturalis ineffet non fucatus nitor

26.

Tandis que l'on fe propofa ces grands Orateurs pour modéles, & que l'on fut fidéle à les imiter, le goût de la bonne Eloquence, c'eft-à-dire d'une Eloquence mále & folide, fe conferya dans toute fa pureté. Mais quand après leur mort, on eut commencé à

les

les perdre infenfiblement de vue, & à fuivre d'autres routes, une Eloquence d'un nouveau genre, plus parée & plus embellie, fuccéda à l'ancienne, & la fit bientôt difparoitre. Ce fut Démétrius de Phalére qui caufa ce changement; & c'est de lui qu'il me reste à parler.

DEMETRIUS DEPHALERE. DEMETRIUS dont il s'agit, Fut furnommé le Phalerien du nom de Phalére fa patrie, qui étoit un des ports d'Athénes. Il eut pour maître le célébre Théophraste.

Je ne raporterai point ici fon hiftoire, qui eft traitée avec affez d'étendue dans le VII. Volume. On y voit comment Art. I. Caffandre, s'étant rendu maître d'A- §. V. thénes quelque tems après la mort d'Alexandre le Grand, en confia le gouvernement à Démétrius, qui le conferva pendant dix ans, & s'y conduisit avec tant de fageffe, que le Peuple lui dreffa trois cent foixante ftatues: com- §. VII. ment enfuite elles furent renversées & lui obligé de fe retirer en Egypte, où Ptolémée Soter le reçut fort bien : enfin comment, fous Ptolémée Phila- Art. II. delphe fils de Soter, il fut mis en prison, §. V.

où il mourut d'une morfure d'afpic Je ne confidére maintenant Démé trius de Phalére que comme Orateur, & je dois expofer comment il contri bua à la décadence & au dépériffement de l'Eloquence à Athénes.

J'ai déja marqué qu'il avoit été difciple de Théophrafte, appellé de ce nom à caufe de fa maniere de parler excellente & divine. Il avoit pris fous lui un ftile orné, fleuri élégant. Il s'étoit exercé dans le genre d'éloquence qu'on appelle le genre tempéré, qui tient le milieu entre le fublime & le fimple; qui admet toute la parure & tous les ornemens de l'art; qui emploie les graces brillantes de l'élocution, & la beauté éclatante des penfées; en un mot, qui eft rempli de douceur & d'agrément, mais dénué de force & de vigueur, & qui avec tout fon brillant & tout fon éclat ne s'élévé pourtant point au deffus du médiocre. Démétrius excelloit dans ce genre d'écrire, fort capable de plaire & d'exciter l'admiration par lui-même, lui-même, fi on ne le comparoit au genre fublime & magnifique, dont la beauté folide & majestueufe fait difparoitre l'éclat de ces graces légéres & fuperficielles. Il étoit aifé de rea Orator parum vehemens, dulcis tamen,

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