Œuvres complètes de Alfred de Musset, Volume 1

Front Cover
L. Conard, 1923
 

Other editions - View all

Common terms and phrases

Popular passages

Page 23 - C'était dans la nuit brune Sur le clocher jauni. La lune Comme un point sur un i. Lune, quel esprit sombre Promène au bout d'un fil. Dans l'ombre. Ta face et ton profil ? Es-tu l'œil du ciel borgne ? Quel chérubin cafard Nous lorgne Sous ton masque blafard ? N'es-tu rien qu'une boule, Qu'un grand faucheux bien gras Qui roule Sans pattes et sans bras ? Es-tu je t'en soupçonne, Le vieux cadran de fer Qui sonne L'heure aux damnés d'enfer...
Page 412 - J'aime surtout les vers, cette langue immortelle. C'est peut-être un blasphème, et je le dis tout bas. Mais je l'aime à la rage. Elle a cela pour elle Que les sots d'aucun temps n'en ont pu faire cas, Qu'elle nous vient de Dieu, — qu'elle est limpide et belle, Que le monde l'entend, et ne la parle pas.
Page 253 - Vous me demanderez si j'aime quelque chose. Je m'en vais vous répondre à peu près comme Hamlet : «Doutez, Ophélia, de tout ce qui vous plaît, De la clarté des cieux, du parfum de la rosé; Doutez de la vertu, de la nuit et du jour; Doutez de tout au monde, et jamais de l'amour.
Page 413 - Sachez-le, — c'est le cœur qui parle et qui soupire Lorsque la main écrit, — c'est le cœur qui se fond ; C'est le cœur qui s'étend, se découvre et respire, Comme un gai pèlerin sur le sommet d'un mont. Et puissiez-vous trouver, quand vous en voudrez rire, A dépecer nos vers le plaisir qu'ils nous font...
Page 39 - Amour, fléau du monde, exécrable folie, Toi qu'un lien si frêle à la volupté lie, Quand par tant d'autres nœuds tu tiens à la douleur, Si jamais, par les yeux d'une femme sans cœur, Tu peux m'entrer au ventre et m'empoisonner l'âme, Ainsi que d'une plaie on arrache une lame, Plutôt que comme un lâche on me voie en souffrir, Je t'en arracherai, quand j'en devrais mourir.
Page 424 - Oui, don Juan. Le voilà, ce nom que tout répète, Ce nom mystérieux que tout l'univers prend, Dont chacun vient parler, et que nul ne comprend, Si vaste et si puissant qu'il n'est pas de poète Qui ne l'ait soulevé dans son cœur et sa tête, Et pour l'avoir tenté ne soit resté plus grand.
Page xl - Mes chers amis, quand je mourrai, Plantez un saule au cimetière. J'aime son feuillage éploré, La pâleur m'en est douce et chère, Et son ombre sera légère A la terre où je dormirai.
Page 167 - Je regardais Lucie. — Elle était pâle et blonde. Jamais deux yeux plus doux n'ont du ciel le plus pur Sondé la profondeur et réfléchi l'azur.
Page 20 - Ulric, nul œil des mers n'a mesuré l'abîme, Ni les hérons plongeurs, ni les vieux matelots. Le soleil vient briser ses rayons sur leur cime, Comme un soldat vaincu brise ses javelots. Ainsi, nul oeil, Ulric, n'a pénétré les ondes De tes douleurs sans borne, ange du ciel tombé.
Page 133 - J'ai connu, l'an dernier, un jeune homme nommé Mardoche, qui vivait nuit et jour enfermé. 0 prodige ! il n'avait jamais lu de sa vie Le Journal de Paris, ni n'en avait envie. Il n'avait vu ni Kean, ni Bonaparte, ni Monsieur de Metternich ; — quand il avait fini De souper, se couchait, précisément à l'heure Où (quand par le brouillard la chatte rôde et pleure) Monsieur Hugo va voir mourir Phébus le blond.

Bibliographic information