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28 APR 1965

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La plus noble ambition d'un cœur sensible, comme sa plus douce jouissance, est de contribuer au bonheur de ses semblables. C'est l'unique objet que nous nous sommes proposé en publiant cet Ouvrage, dans lequel nous avons fait en sorte de réunir, par un enchaînement naturel, et sous un même titre, les vérités les plus importantes. Puisse-t-il devenir en effet, pour tous, un code de vertu, de raison, et de bonheur !

EXPLICATION

De l'Estampe du Frontispice de la THÉORIE DU BONHEUR.

CETTE Estampe représente, sur le devant, une mer orageuse, et au-dessus un ciel sombre et nébuleux, excepté d'un seul côté, vers la droite, où il est pur et serein. On voit dans l'enfoncement, et de ce même côté, un port dont l'entrée paroît étroite. Dans la perspective est une ville en amphithéâtre. Au sommet de la montague sur laquelle cette ville est située, on apperçoit un Temple, environné des plus rians bocages.

Des gondoles magnifiquement ornées de riches voiles, de banderoles flottantes, de guirlandes de fleurs, et por

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tant des chanteuses, des musiciens, sont soulevées par les flots, agitées par les vents, et viennent se briser contre les écueils qui bordent le rivage. Une barque frêle et légère touche seule au port. Celui qui la monte, et qui rame a les yeux fixés sur une étoile qui lui sert de guide, et de laquelle il part un rayon de lumière qui réfléchit sur lui et l'éclaire dans sa route. Au bas de l'Estampe on lit ce vers.

Le bonheur est le port où tendent les humains.

VOLTAIRE, premier discours en vers.

Le même Poète a dit plus loin dans le même discours:

Qu'importe, quand l'orage a soulevé les eaux,

Que ta poupe soit peinte, et que ton mât déploie,
Une voile de pourpre et des cables de soie :
L'art du piloté est tout, et pour dompter les vents,
Il faut la main du sage, et non des ornemens.

DU

BONHEUR,

OU

L'ART DE SE RENDRE HEUREUX,

MIS A LA PORTÉE DE TOUS LES HOMMES.

CHAPITRE PREMIER.

Du désir et de la recherche du Bonheur.

TEL qu'une tendre fleur qui s'épanouit aux premiers rayons du soleil, notre cœur s'ouvre à la seule idée du bonheur. Quel est l'être intelligent et sensible, quel est l'homme, qui ne désire d'être heureux? Penchant irrésistible, doux instinct de la Nature, ce désir est en nous la preuve la plus sensible des vues bienfaisantes de celui qui nous a donné l'existence : il nous a créés pour la félicité. Dieu bon ! ô toi, dont la bonté même

fait l'essence, toi qui fais luire à nos yeux l'astre brillant qui nous éclaire, qui embellis pour nous la scène du monde, qui sèmes tant de bien sous nos pas; toi qui unis par les liens du sang, de l'humanité, de la commisération, des besoins, et des services réciproques, tous les êtres dans lesquels tu t'es plu à graver quelques traits de ton auguste ressemblance; mon Dieu, mon père, inspire-moi! fais passer dans mon ame ce feu divin qui nous embrâse de l'amour de nos semblables. Que rempli pour eux des plus tendres sentimens, je leur ouvre, à ta voix, la route du bonheur.

Le bonheur! séduisante et trompeuse chimère, s'écrieront des hommes trop longtems déçus par l'idée qu'ils s'en étoient formée! Soupirant après lui, nous nous sommes lassés dans de vaines poursuites. Toujours près de nous, en apparence, il nous échappoit comme une ombre fugitive, au moment où nous croyions le saisir. Non, il n'est point pour nous de bonheur.

Mes concitoyens, mes amis et mes frères, certainement vous vous trompez; eh qu'ici l'erreur est cruelle ! Je l'avouerai cependant, combien de fois n'ai-je pas tenu le même langage que vous? Dans ces jours d'une ardente jeunesse, que nous comptons

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