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tèmes ne l'ont pas égaré, vient nous remplir ici d'une persuasion plus intime encore, et prête un nouvel éclat aux lumières de la raison même. Sans cesse elle nous remet devant les yeux notre immortalité, cette croyance la plus nécessaire aux hommes, après celle d'un Dieu qui a les yeux toujours ouverts sur leurs actions.

C'est sur ce dogme sacré que repose le Christianisme : il en fait la base de ses enseignemens et le terme de toutes nos espérances. Il nous offre, pour prix de notre obéis sance, de nos travaux et de nos épreuves, un bonheur sans fin, sans bornes et sans mè lange; il nous promet des voluptés pures, qui n'engendrent, pour l'ame, ni satiété, ni dégoût, des torrens de délices auxquelles on ne peut rien comparer ici-bas; la jouissance inaltérable de tous les vrais biens dans la possession du souverain bien lui-même. Au sein de la lumière, dans cet Etre suprême, qui a seul la plénitude de l'être et de l'intelligence, nons puiserons la connoissance de toute vérité; nous admirerons la sagesse de ses voies; nous verrons, dans ses idées éternelles, dans son Verbe, tout le plan de la création, tout le secret de ses mystères adorables, tous les prodiges de sa bonté et de son excessive charité pour les hommes. Ses oeuvres se déve

lopperont devant nous avec tout leur enchaî nement et toute leur magnificence; tout y sera lié à ses perfections, qui, toujours fécondes et toujours nouvelles pour des esprits créés, feront, par leur immensité, l'objet de notre contemplation dans une durée infinie. Le voyant tel qu'il est, le principe de tout ordre et de toute beauté, souverainement aimable, comme souverainement parfait, nous l'aimerons autant que nous pouvons aimer. Notre ame, parvenue au plus haut degré d'excellence que comporte sa nature, ne sera qu'intelligence et qu'amour. Divin amour, sentiment délicieux, puisqu'il se portera tout entier vers l'objet le plus digne d'être aimé, et qui ne nous a aimés le premier que pour nous rendre heureux en nous embrâsant de tes feux, tu nous feras éprouver ce continuel ravissement auquel nous ne pourrions suffire dans cette vie !

Quel espoir! quelle perspective pour l'hom me religieux et fidèle ! que cette idée du bon heur qui l'attend, répand de charmes sur tous les instans de sa vie! Combien il lui est doux de se dire à lui-même, que tout le rapproche de cette félicité à laquelle il aspire; que rien de ce qu'il pense, de ce qu'il désire dans la seule vue du bien, n'est perdu pour lui; que tout ce qu'il endure sous les yeux

de son Dieu, tout ce qu'il entreprend pour lui plaire, quel qu'en soit le succès, jusqu'à ses moindres travaux, ses moindres peines, tout aura sa récompense, et que cette récompense, c'est Dieu même! Comme il recueille déjà en esprit le fruit de toutes ses œuvres ! comme il en jouit d'avance, et se sent toujours satisfait! Ah! sous tous les rapports, avouez donc, chers amis, que, dès cette vie, le vrai Chrétien est heureux autant qu'on peut l'être.

CHAPITRE VII I.

De l'Homme vraiment religieux, relativement à la Société et au bonheur de ses semblables.

E

Ce n'est pas assez pour l'homme, éclairé des lumières de la raison et de la Religion, de faire son bonheur à lui-même ; il doit encore contribuer, autant qu'il est en lui, au bonheur des autres : sans cela même, sa raison ne lui auroit donné que des lumières trop imparfaites; sa religion seroit fausse ou mal entendue ; son propre bonheur seroit incomplet et peu solide. Notre sort en effet

est tellement lié à celui des autres hommes, qu'il n'est pas possible que nous soyons heureux, si nous ne sommes pas portés à concilier leurs intérêts avec les nôtres, à leur procurer tout le bien que nous pouvons leur faire ; je dis plus, à sacrifier au bien général nos intérêts du moment, persuadés que le chef de toute société, que le père commun de la grande famille, après nous avoir faits pour le bonheur, ne laissera pas nos sacrifices sans dédomagement et sans récompense. Dieu d'amour, et la charité par essence, la Religion qu'il a révélée aux hommes devoit avoir, pour caractère distinctif, la charité universelle; et c'est aussi celui qu'il y a essentiellement attaché. Quiconque agiroit contre le véritable esprit de cette loi sainte, pourroit donc être Chrétien de nom, mais il ne le seroit jamais dans la réalité. Il pourroit être alors superstitieux, fanatique, sanguinaire: mais, devenu l'instrument de l'ambition, de la cupidité, de la vengeance, et de toutes les passions de ceux, qui, sous prétexte de Religion, lui auroient mis les armes à la main, un faux zèle l'auroit égaré ; il seroit, selon l'expression du Fils de Dieu, que nous avons déjà rappelée, l'enfant du tonnerre, et ne seroit plus un vrai disciple de Jésus-Christ,

Le Chrétien, pénétré de l'esprit et des maximes de son divin Maître, est, dans tous les états de la vie, ce qu'il doit être; bon père, bon fils, époux tendre et fidèle, ami constant et généreux, maître affable et humain, plein d'attachement et de respect pour ceux auxquels sa condition l'a soumis; sensible aux misères d'autrui, comme si elles étoient les siennes, et toujours empressé à les soulager; clément et miséricordieux envers ses ennemis les plus déclarés, et ne se vengeant des maux qu'il en a reçus que par le bien qu'il leur fait; regardant, non avec une pitié dédaigneuse, mais d'un œil de commisération et d'indulgence, les foiblesses humaines, lors même que, par état, il est obligé de les punir; dans toutes les fonctions que l'ordre naturel et social lui impose, exact à suivre les règles de la justice et la loi du devoir.... Est-ce un portrait d'imagination que je viens de tracer? Non, chers amis, je ne vous offre ici que les traits des vrais sages, des vrais disciples de la loi évangélique (1), tels qu'il s'en rencontre encore au mileu de

(1) N'oublions pas ce mot de Rousseau, le plus bel aveu qu'on puisse faire en faveur du Christianisme, et une des plus belles preuves de sa Divinité: » Il ne faut » au Chrétien que de la logique, pour être vertueux «.

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