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d'entre eux les reports de voix dont nous parlerons ultérieurement.

Si, par exemple, on se contentait d'un quorum de 10.000 voix, on risquerait d'avoir près de 800 députés : ce serait un vrai fléau.

Et, si l'on voulait réduire le nombre des députés à 300, chiffre favorable à un bon travail législatif et largement suffisant, à notre avis, pour représenter toutes les opinions et tous les intérêts que peuvent avoir les électeurs français, il faudrait élever le quorum à 26.666 voix, chiffre que l'on peut, à juste titre, trouver excessif.

Fixons donc notre quorum entre 10.000, chiffre beaucoup trop faible, et 26.666, chiffre un peu trop fort, et mettons qu'il faudra 20.000 suffrages pour qu'un candidat soit élu député. Ce quorum-là correspond au nombre de 400 députés, chiffre bien inférieur au nombre actuel des hôtes du Palais Bourbon, mais qu'il est permis de trouver encore un peu élevé. Il est facile, d'ailleurs, si l'on y tient, de le réduire sensiblement sans élever le quorum ni porter aucune atteinte à la proportionnalité dans la représentation.

VII. MOYEN DE RESTREINDRE LE NOMBRE TROP
CONSIDÉRABLE des députés.

Le moyen de parvenir à ce résultat consisterait tout simplement à permettre à un député de représenter plusieurs groupes de 20.000 électeurs, s'il obtient plusieurs fois 20.000 voix ce qui arriverait sûrement à un certain nombre de chefs de partis, aux personnages politiques très connus.

Ces députés-là auraient naturellement, dans les votes parlementaires, autant de voix qu'ils représenteraient de groupes de 20.000 électeurs; et l'on aurait ainsi à la

Chambre 400 voix représentées par un nombre de députés moindre et variable selon le nombre des candidats qui auraient recueilli plusieurs fois 20.000 voix.

Ce cumul de plusieurs voix au Parlement au profit d'un même député n'aurait rien que de conforme aux principes du Gouvernement représentatif. Le député, en effet, n'étant que le mandataire de ses électeurs et votant à la Chambre en leur nom, il est tout naturel que son vote y pèse d'un poids proportionné au nombre de ses commettants.

Et ce serait faire une fausse application du principe d'égalité, qui nous est cher, mais que l'on entend souvent mal chez nous, que de le considérer comme s'opposant à ce même cumul: c'est entre les groupes d'électeurs numériquement égaux qu'il s'agit de maintenir l'égalité de droit, et non entre leurs mandataires.

Il conviendrait néanmoins de limiter le cumul à un petit nombre de voix, deux ou trois, par exemple, et, en tout cas, de manière à ce qu'il ne pût avoir pour effet de réduire outre mesure le nombre des députés, qui devrait être au minimum de 300. La Chambre serait ainsi composée d'un nombre de députés variant entre 300 et 400.

Le cumul en question n'a, d'ailleurs, rien d'essentiel au mode de représentation que nous proposons, et nous ne l'indiquons que comme moyen de restreindre le nombre, en général trop considérable, des députés, sans élever à l'excès celui des voix nécessaires à l'élection.

VIII.

APPLICATION PRATIQUE DES PRINCIPES POSÉS.
VOTE DES DÉPARTEMENTS PAR SÉRIES.

Occupons-nous maintenant des changements à apporter à notre pratique électorale, en vue de la représentation proportionnelle basée sur les principes que nous avons posés.

Le premier de ces principes est le droit pour l'électeur de voter à son gré et efficacement pour l'un quelconque des candidats, où que celui-ci ait déclaré sa eandidature.

Si, sous l'empire de ce principe, le scrutin s'ouvrait, comme cela a lieu aujourd'hui, simultanément sur tous les points du territoire, un fait facile à prévoir se produirait vraisemblablement. Malgré la tendance naturelle de l'électeur à préférer, à programme équivalent, bien qu'à talents inégaux, un candidat de sa région à un candidat d'un pays éloigné, on pourrait bien arriver à ce double résultat accumulation d'un nombre excessif de voix sur les noms de quelques hommes politiques de grande notoriété; éparpillement du reste des suffrages sur un nombre considérable de candidats dont la plupart n'auraient pas réuni assez de voix pour être élus.

Un moyen très simple et tout indiqué de prévenir cet inconvénient consiste à ouvrir le scrutin successivement dans les divers départements divisés à cet effet, par ordre alphabétique ou de toute autre manière, en plusieurs séries comprenant chacune un nombre aussi égal que possible d'électeurs. Le résultat du vote dans la série ou les séries précédentes serait proclamé avant le vote de la série suivante : les électeurs seraient ainsi avertis de ne plus porter leurs suffrages sur les candidats déjà élus ou ayant recueilli le nombre de suffrages requis pour obtenir le maximum de voix qu'un député puisse avoir au Parlement.

Et même, si l'on craignait qu'un candidat eût jamais l'idée de faire des élections l'occasion d'un plébiscite sur son nom, on pourrait déclarer nulles les voix qui seraient encore données au candidat se trouvant dans les conditions de succès que nous venons d'indiquer.

Nous ne voyons pas quelle objection fondée on pourrait faire à la division des opérations électorales en plusieurs séries. Il n'y a, en effet, aucun avantage à ce

qu'elles soient faites le même jour sur tout le territoire, ni aucun inconvénient à ce qu'elles se prolongent pendant quelques semaines, ainsi que cela se passe en Angleterre. Il est même vraisemblable que, fractionnées en plusieurs séries, elles se feraient avec plus de calme et que les électeurs voteraient après plus mûres réflexions.

IX. REPORT DE VOIX. COMITÉS ÉLECTORAUX.

Le second principe sur lequel nous basons notre mode de représentation proportionnelle est la condition que le candidat obtienne, pour être élu, un nombre de voix déterminé 20.000, chiffre sur lequel nous raisonnons, ou tout autre qui paraîtrait préférable.

Or ce serait un hasard bien étrange et qui, sans doute, ne se présenterait jamais, qu'un candidat obtint tout juste le quorum électoral. En fait, les candidats auraient toujours, les uns, un certain excédent de voix, les autres, un certain déficit.

Tous les électeurs ayant le droit d'être représentés et les élus devant représenter respectivement des groupes d'électeurs numériquement égaux, que faire des voix données en trop aux uns, en nombre insuffisant aux autres ?

On a répondu d'avance les voix données en trop à certains candidats et les voix données aux candidats qui sont le plus en déficit doivent évidemment, après le vote de toutes les séries, être reportées sur les candidats en déficit qui ont le plus approché du succès, et ce, bien entendu, de manière à ne reporter les voix d'un candidat que sur un autre de même nuance politique ou de nuance très rapprochée.

Mais par qui, dans quel ordre et de quelle manière ces reports devront-ils être faits?

Il paraîtrait convenable de laisser le soin de faire

chacun d'eux à un comité sous les auspices duquel le candidat se serait présenté.

A cet effet, et à d'autres encore, toute candidature devrait être émise sous le patronage d'un comité dont la loi déterminerait le nombre de membres, les attributions et le mode de fonctionnement.

Ce comité serait un intermédiaire naturel entre le candidat, même devenu député, et le groupe des électeurs inconnus ayant voté pour lui. Son rôle consisterait, non seulement à faire le report de voix dont nous venons de parler, mais encore à veiller sur la conduite politique et les votes du candidat élu, à porter, au besoin, devant l'autorité judiciaire rendue compétente à cet effet, une demande en déchéance contre lui, s'il trompe la confiance de ses électeurs.

On n'aurait plus alors le spectacle scandaleux de députés émettant, à peine élus et comme des machines au service de la franc-maçonnerie, les votes les plus contraires aux engagements pris dans leurs circulaires, et d'électeurs réduits à d'impuissantes protestations contre la malhonnêteté de mandataires qui les ont trompés.

Les attributions du comité iraient même jusqu'à remplacer le député en cas de déchéance, démission ou décès au cours de la législature. Car il est à remarquer qu'une élection partielle ne pourrait pas être faite directement par les électeurs eux-mêmes avec un système électoral où le député représenterait non une circonscription territoriale, mais un nombre déterminé d'électeurs inconnus.

Avec le mode d'élections que nous proposons, les votes conféreraient ainsi, non seulement un mandat législatif au candidat, pour le cas où celui-ci obtiendrait un nombre suffisant de suffrages, mais encore au comité un mandat lui donnant, entre autres pouvoirs, celui de disposer des voix données en surplus ou nombre insuffisant à ce candidat. Ce serait aux candi

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