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Si j'oubliais parfois la douce obéissance,
Le cheval me dirait: "Vois ma docilité."
Si j'étouffais la voix de la reconnaissance,
Le chien dirait encor: "Vois ma fidélité.”

Quand le matin doré ramène la lumière,
Ou bien lorsque le soir répand son voile doux,
Si j'oubliais alors de dire ma prière,
Les oiseaux chanteraient: "Viens prier avec nous !"

Le coq, au point du jour, me dit: "Aie vigilance,
Que personne au logis ne se lève avant toi."
La soigneuse fourmi me dit: "Aie prévoyance,"
Ou la colombe encor: "Sois aussi doux que moi."

Dans ce livre divin point de morale austère,
Ils nous faut discerner et le mal et le bien;
Il nous dit d'être sage et de chérir sa mère.
Dans le livre de Dieu, crois-tu qu'on n'apprend rien?

Ne sois donc pas fâché si je ferme la page;
Nous allons nous quitter, je vais te dire adieu;
Je viendrai te trouver pendant les jours d'orage;
Laisse-moi lire encor le livre du bon Dieu."

5

ΙΟ

15

20

ISABELLE RODIER.

39.

UNE MÈRE A SA FILLE.

Ma chère enfant, viens, écoute ta mère,
De ses leçons garde le souvenir;
De la raison si le flambeau t'éclaire,
Tu fixeras ton sort pour l'avenir.

5

IO

15

20

Que la pudeur soit ta seule parure;
Redoute l'art et la frivolité :

La vérité convient à la nature ;
Le talent seul ajoute à la beauté.

Quand le matin tu vois briller la rose,
Songe qu'au soir elle n'existe plus ;
Un seul moment de la beauté dispose,
On est toujours belle avec des vertus.

Si le malheur te suit dans ta carrière,
Arme ton cœur d'une noble fierté ;
On est timide alors qu'on désespère,
Un front serein brave l'adversité.

Mais si le Ciel t'accordait l'opulence,
Et des jours purs par les plaisirs tracés,
Ouvre ton âme à l'honnête indigence,
Et que ses pleurs par toi soient effacés.

Sois toujours douce, honnête, affable et sage;
D'une coquette évite l'art flatteur;
Que la candeur peinte sur ton visage
Fasse juger des vertus de ton cœur.

Puissé-je dire à mon heure dernière :
De tout danger j'ai sauvé mon enfant !
Je finirai sans regret ma carrière,
Si je te laisse heureuse en expirant.

Mme PERRIER.

40.

LE VER LUISANT ET LA PAQUERETTE.

Vois-tu ces vers luisants, étincelles vivantes,
Toutes mouvantes?

Regarde, enfant, briller leurs petites lueurs,
Sur l'herbe en pleurs.

Ils parent les clochettes,
Les prés, les pâquerettes,
Et posent des paillettes
Sur les robes des fleurs.

Baisse les yeux, enfant, vois cette pâquerette
Frêle et coquette.

Comme le ver luisant, des prés c'est le trésor
Et l'astre encor.

L'une est la fleur qui penche,
L'autre, un feu sur la branche;
L'une est l'étoile blanche,

L'autre, l'étoile d'or.

5

ΙΟ

15

ANAÏS SEGALAS.

41.

LE GRILLON.

Un pauvre petit grillon,
Caché dans l'herbe fleurie,
Regardait un papillon
Voltigeant dans la prairie.

20

L'insecte ailé brillait des plus vives couleurs, L'azur, la pourpre et l'or éclataient sur ses ailes : Jeune, beau, petit-maître, il court de fleurs en fleurs, Prenant et quittant les plus belles.

5 "Ah! disait le grillon, que son sort et le mien Sont différents! Dame Nature

ΙΟ

Pour lui fit tout et pour moi rien.

Je n'ai point de talent, encor moins de figure,
Nul ne prend garde à moi, l'on m'ignore ici-bas,
Autant vaudrait n'exister pas."

Comme il parlait, dans la prairie
Arrive une troupe d'enfants.
Aussitôt les voilà courants

Après ce papillon, dont ils ont tous envie; 15 Chapeaux, mouchoirs, bonnets servent à l'attraper. Il devient leur conquête.

20

L'un le saisit par l'aile, un autre par le corps;
Un troisième survient et le prend par la tête.
Il ne fallait pas tant d'efforts

Pour déchirer la pauvre bête.

"Oh! oh! dit le grillon, je ne suis point fâché;
Il en coûte trop cher pour briller dans le monde ;
Combien je vais aimer ma retraite profonde !
Pour être heureux, vivons caché."

FLORIAN.

25

42.

LE NID DE FAUVETTE.

Je le tiens, ce nid de fauvette:
Ils sont deux, trois, quatre petits!
Depuis si longtemps je vous guette!
Pauvres petits, vous voilà pris!

Criez, sifflez, petits rebelles,
Débattez-vous; oh! c'est en vain,
Vous n'avez pas encor vos ailes,
Comment vous sauver de ma main ?

Mais quoi! n'entends-je pas leur mère
Qui pousse des cris douloureux ?
Oui, je le vois, oui, c'est leur père
Qui vient voltiger autour d'eux.

Et c'est moi qui cause leur peine,
Moi qui, l'été, dans ces vallons,
Venais m'endormir sous un chêne,
Au bruit de leurs douces chansons!

Hélas! si du sein de ma mère
Un méchant venait me ravir,
Je le sens bien, dans sa misère,
Elle n'aurait plus qu'à mourir.

Et je serais assez barbare

Pour vous arracher vos enfants!
Non, non, que rien ne vous sépare:
Non, les voici! je vous les rends.

Apprenez-leur, dans le bocage,
A voltiger auprès de vous:
Qu'ils écoutent votre ramage,
Pour former des sons aussi doux.

Et moi, dans la saison prochaine,
Je reviendrai dans ces vallons,
Dormir quelquefois sous un chêne,
Au bruit de leurs jeunes chansons.

BERQUIN.

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