Tout a dans sa maison sa tâche journalière : La fleur du vase d'or la remplit de senteur, Le serin d'harmonie, et l'âtre de lumière; La mère y donne une âme, et l'emplit de bonheur.
Humble et sublime, elle aime une petite sphère, Et rayonne à l'écart, entre ses murs bénis; Elle est comme le feu du foyer, et n'éclaire Que l'étroite famille, et ne luit qu'au logis.
Dis à ta mère, enfant, ton âme et ses mystères, Car elle a des pardons qu'on ne peut épuiser : Sa faiblesse est sublime. Oh! sur vos lèvres, mères, A côté du reproche, est toujours le baiser!
C'est, mon frère, qu'on vous accuse D'être un gourmand, d'être un voleur; Vous prenez ce qu'on vous refuse, Moi, ce qu'on m'offre de bon cœur. Vous avez plus d'esprit, mon frère, Plus d'adresse, plus de savoir; Mais lorsqu'on l'emploie à mal faire, Il vaut mieux n'en point avoir.
LE PRINTEMPS ET L'ENFANT.
Vois, enfant nouveau-né, que l'existence étonne, 10 La nature qui luit, chante, embaume, te donne Rayons, fleurs, rossignols, et n'est qu'enchantement; C'est qu'elle est joyeuse, je gage, D'avoir fait en toi un ouvrage
Si délicat et si charmant.
15 Tout cela c'est la vie, enfant qui vient de naître, Ce n'est pas le bonheur. Si tu veux le connaître, Père et mère, tous deux baisant ta joue en fleur, Nous te dirons: "O ma charmante,
Nous sommes l'amitié constante, Et Dieu nous a fait pour ton cœur."
Mon chardonneret s'est sauvé, Et m'a fait songer au voyage, Mère, je veux quitter ma cage, Moi qui suis ton oiseau privé.
Allons bien loin... plus loin encore ! La terre est pleine de bouquets; Viens... Je veux cueillir des bluets Dans tous les blés que le Ciel dore.
Je bondirai par les sillons, Légère, avec ma blanche robe, Et sur toutes les fleurs du globe J'irai prendre des papillons.
-Oui, tu voudrais dans l'air suivre, chère infidèle, L'hirondelle ou la nue !... O mon papillon frêle! Mais tu ne sais pas, toi, comme le monde est grand: 15 Ce sont des mers, des cieux, à fatiguer, ma belle, Les voiles d'un vaisseau, l'aile d'une hirondelle; Des chemins à lasser les pieds du Juif errant !
Fais un plus doux voyage, et dans l'horizon bleu Que ta pensée, ouvrant ses deux ailes de feu, Vole au Seigneur; l'âme est l'unique voyageuse Qui connaisse du Ciel la route lumineuse, Et c'est le seul oiseau qui vole jusqu'à Dieu.
Une brebis, un jour, disait à son agneau : "Mon fils, je suis toute saisie,
En songeant aux dangers qui menacent ta vie; Tout le monde t'en veut; le maître du troupeau Attend que tu fasses envie
A quelque bon boucher, autrement dit bourreau, Qui nous prend, nous achète, et sans cérémonie De sang-froid vient nous égorger.
Son confrère le loup t'épie,
Comme lui voulant te manger.
Enfin contre mon fils tout à la fois conspire. Tu vois le jour à peine, on va te le ravir; Contre l'ordre de la nature,
Moi, plus vieille que toi, je te verrai mourir. -Hélas! répond l'agneau, c'était un de mes vœux: Mourir jeune n'est pas un destin si contraire : Je serais bien plus malheureux,
Si je survivais à ma mère !"
Oh bien loin de la voie Où marche le pécheur, Chemine où Dieu t'envoie! Enfant garde ta joie! Lis! garde ta blancheur !
Un certain soir, Margot la pie, En sautillant à travers champs, Entendit dans une prairie, C'était au retour du printemps, Roucouler une tourterelle. Margot de voler auprès d'elle, Pour raconter
Ou pour savoir quelque nouvelle. Tourterelle de l'éviter, D'abandonner la place,
De fuir dans un lointain vallon: Lorsque de nouveau notre agace
La poursuit, la rejoint auprès d'un vert buisson. "Pourquoi me fuis-tu? lui dit-elle. -L'an passé, répond la tourterelle,
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