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GODEAU.

GODEAU.

A

NTOINE GODEAU, né à Dreux en 1614. fut reçu à l'Académie Françoife quelques an

nées après que cette Illuftre

Compagnie eut été formée. La facilité furprenante de fon génie jointe à fon amour pour le travail, lui a fait produire nombre d'ouvrages en Profe & en Vers Il difoit que le paradis d'un Auteur étoit de compofer; fon purgatoire, de relire & de retoucher fes compofitions; & fon enfer, de corriger les épreuves de l'Imprimeur. Les grandeurs de Dieu & l'excellence de la Religion Chrétienne ont été l'objet conftant de fes travaux. Quelques-uns de nos Maîtres lui ont refufé la qualité de Poëte, prétendant qu'il n'avoit ni ce feu, ni cet enthousiasme qui en fait le principal caractere. Plufieurs ont appellé comme d'abus de cette prétention:

que

mais qu'elle foit bien ou mal fondée, au moins eft-il vrai que de tant de milliers GODEAU de Vers qui font fortis de la plume de M. GODEAU, à peine en lit-on aujourd'hui la vingtiéme partie. Au refte, n'eut-il fait fon Ode à LOUIS XIII. & fa paraphrafe du Cantique Benedicite omnia opera Domini Domino, il ne feroit pas indigne d'occuper une place honorable fur le Parnasse. Quand l'Auteur présenta ce Cantique au Cardinal de Richelieu, cette Eminence l'en remercia d'un ton gracieux, en lui difant : M. l'Abbé vous me donnez Benedicite ; & moi, je vous donne Graffe; faifant allufion à l'Evêché de ce nom. Prise à la rigueur, la pensée n'est pas fort exacte, mais les gens d'efprit fe permettoient alors affez volontiers des jeux de mots femblables. Le Roi y joignit dans la fuite l'Evêché de Vence; & ce Prélat, fi digne de l'être, après avoir occupé pendant je ne fçai quel efpace de tems l'un & l'autre Siége, jugea à propos

GODEAU.

de s'en tenir au dernier Il y mourut d'une attaque d'apoplexie, le 21 Avril 1672. âgé de 67 ans, & regretté de toute l'Eglife, qu'il avoit édifiée autant par une conduite vraiment épiscopale, que par divers ouvrages, dont le plus confidérable eft Hiftoire Ecclefiaftique.

ODE

A LOUIS XIII.

DIVINE

IVINES fources de la gloire
Enchantereffes de nos fens,
Illuftres Filles de Mémoire,
Délices des cœurs innocens;
Amour de mes jeunes années,
Belles Reines des deftinées,
Chaftes Déeffes que je fers,
Mules, venez fur nos rivages,
Pour rendre vos juftes hommages
Au plus grand Roi de l'Univers.

Race des Dieux, doctes Pucelles,
Vous ne verrez point dans fa cour
Luire les flammes criminelles
D'un aveugle & volage amour >

Ses vertus en ont fait un Temple :
Et bien que l'on vous y contemple
Brillantes de feux & d'attraits,
Vos beautez de tous defirées,
N'y feront pas moins affurées
Que dans vos plus fombres forêts.

Louis, dont l'Univers admire
La fageffe & la piété,

Ta puiffance dans ton Empire
Eft conduite par l'équité:

Le fceptre dans ta main vaillante
N'eft point une charge pefante s
Tes foins nous fauvent du trépas;
Tu jouis toujours de toi-même ;
Et ton fuperbe diadême

Te pare, & ne t'aveugle pas..

Quand pour le malheur de la Terre,

On vit un démon furieux,

De HENRI, ce foudre de guerre,
Borner les ans victorieux;

Chacun fe plaignit que la Parque
Soûmît fi-tôt ce grand Monarque
A la loi commune du Sort ;
Et penfa que le parricide,
Du coup qui bleffa notre Alcide,
Avoit bleffé la France à mort.

GODEAU

GODEAU.

Mais tu nous fis bien-tôt connoître
Par des triomphes inouis,
Que le Deftin faifoit renaître
Cent Alcides en un LOUIS :
Les Titans qui fe fouleverent,
Bien-tôt par leur chûte éprouverent
L'effort de ton bras valeureux;
Chacun fléchit fous ta puissance,

Et connut que

l'obéiffance

Etoit l'art de fe rendre heureux..

Sur les rivages de la Loire,
On vit un monftre audacieux, 1
Attaquer fans crainte la gloire
De nos plus vaillans demi-Dieux.
Le Trône & les Temples tomberent;
Les plus innocens fuccomberent
Sous une injufte autorité;
Le zéle paffa pour manie;
Et l'infolente tyrannie
Y prit le nom de liberté.

Les fiers peuples de la Tamife,
Pour feconder fon entreprise
Accoururent de toutes parts;
Et pleins d'une folle efpérance,

I L'Héréfie.

Crurent

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