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Il reviendra z'à Pâques,
Mironton, mironton, mirontaine,
Il reviendra z'à Pâques,
Ou à la Trinité.

La Trinité se passe,
Mironton, mironton, mirontaine;

La Trinité se passe,
Malbrough ne revient pas.

Madame à sa tour monte,
Mironton, mironton, mirontaine;
Madame à sa tour monte,
Si haut qu'elle peut monter.

Elle aperçoit son page,
Mironton, mironton, mirontaine;
Elle aperçoit son page,
Tout de noir habillé.

Beau page, ah! mon beau page, Mironton, mironton, mirontaine; Beau page, ah! mon beau page, Quell' nouvelle apportez?

Aux nouvell's que j'apporte, Mironton, mironton, mirontaine; Aux nouvell's que j'apporte Vos beaux yeux vont pleurer.

Quittez vos habits roses,
Mironton, mironton, mirontaine;
Quittez vos habits roses
Et vos satins brochés.

Monsieur d' Malbrough est mort,. Mironton, mironton, mirontaine; Monsieur d' Malbrough est mort, Est mort et enterré.

J' l'ai vu porter en terre, Mironton, mironton, mirontaine; J' l'ai vu porter en terre Par quatre z'officiers.

L'un portait sa cuirasse, Mironton, mironton, mirontaine;

L'un portait sa cuirasse,
L'autre son bouclier.

L'un portait son grand sabre, Mironton, mironton, mirontaine; L'un portait son grand sabre, L'autre ne portait rien.

A l'entour de sa tombe, Mironton, mironton, mirontaine; A l'entour de sa tombe, Romarins l'on planta.

Sur la plus haute branche, Mironton, mironton, mirontaine; Sur la plus haute branche Le rossignol chanta.

On vit voler son âme, Mironton, mironton, mirontaine;

On vit voler son âme

Au travers des lauriers.

Chacun mit ventre à terre,

Mironton, mironton, mirontaine;
Chacun mit ventre à terre,
Et puis se releva,

Pour chanter les victoires, Mironton, mironton, mirontaine; Pour chanter les victoires Que Malbrough remporta.

La cérémonie faite,

Mironton, mironton, mirontaine;
La cérémonie faite,

Chacun s'en fut coucher.

Les uns avec leurs femmes,
Mironton, mironton, mirontaine;
Les uns avec leurs femmes,
Et les autres tout seuls.

Ce n'est pas qu'il en manque,
Mironton, mircnton, mirontaine;
Ce n'est pas qu'il en manque,
Car j'en connais beaucoup,

Des blondes et des brunes,
Mironton, mironton, mirontaine;
Des blondes et des brunes
Et des châtaign's aussi.

J' n'en dis pas davantage,
Mironton, mironton, mirontaine;
J' n'en dis pas davantage

Car en voilà z'assez.

AUTEUR INCONNU.

Chanson bouffonne et satirique, composée par un mauvais plaisant contre le fameux duc de Malbrough, implacable ennemi de la France, et sur le faux bruit de sa mort lors de la bataille de Malplaquet (11 septembre 1709), mort qui n'eut lieu qu'en 1722. Cette bouffonnerie circula donc, mais ignorée, à l'état de simple tradition, pendant soixante ans, en diverses provinces, lorsqu'un beau jour, en 1781, la nourrice du dauphin se prit à bercer, devant Marie-Antoinette, l'enfant de France, de cette chanson inconnue jusque-là. La reine se passionna soudain de l'air et des paroles; il en fut de même de Louis XVI. Bientôt ainsi Malbrough fit fureur à la cour, à la ville, dans la France; il devint populaire jusqu'en Angleterre même. Cet engouement a si peu cessé même que, au dire du bibliophile Jacob, Napoléon entonnait, à haute voix, l'air de Malbrough chaque fois qu'il montait à cheval pour entrer en campagne.

VA-T'EN VOIR S'ILS VIENNENT, JEAN

LES RARETÉS

CLEF DU CAVEAU 615.

1720

On dit qu'il arrive ici
Une compagnie
Meilleure que celle-ci,

Et bien mieux choisie:
Va-t'en voir s'ils viennent, Jean,

Va-t'en voir s'ils viennent.

Un abbé qui n'aime rien
Que le séminaire,

Qui donne aux pauvres son bien,

Et dit son bréviaire :

Va-t'en voir, etc.

Un magistrat curieux

De jurisprudence,

Et qui, devant deux beaux yeux,

Tient bien la balance :

Va-t'en voir, etc.

Une fille de quinze ans,

D'Agnès la pareille,
Qui pense que les enfants
Se font par l'oreille :
Va-t'en voir, etc.

Une femme et son époux,

Couple bien fidèle;
Elle le préfère à tous,
Et lui n'aime qu'elle :
Va-t'en voir, etc.

Un chanoine dégoûté

Du bon jus d'octobre; Un auteur sans vanité,

Un musicien sobre : Va-t'en voir, etc.

Un Breton qui ne boit point,
Un Gascon tout bête;

Un Normand franc de tout point,
Un Picard sans tête :

Va-t'en voir, etc.

Une femme que le temps

A presque flétrie,

Qui voit des appas naissants
Sans aucune envie :

Va-t'en voir, etc.

Une belle qui, cherchant
Compagne fidèle,

La choisit, en la sachant
Plus aimable qu'elle :
Va-t'en voir, etc.

Un savant prédicateur

Comme Bourdaloue,

Qui veut toucher le pécheur,
Et craint qu'on le loue :
Va-t'en voir, etc.

Une nonne de Long-Champs,

Belle comme Astrée,

Qui brûle, en courant les champs

D'être recloîtrée :

Va-t'en voir, etc.

Un médecin sans grands mots,

D'un savoir extrême,

Qui n'ordonne point les eaux,
Et guérit lui-même :

Va-t'en voir, etc.

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