Je t'aimerai, me répétait Sylvie :
L'eau coule encore: elle a changé pourtant. Plaisir d'amour ne dure qu'un moment; Chagrin d'amour dure toute la vie.
Aimable et folâtre jeunesse, Vous qui d'un pied si léger Venez fouler avec adresse L'herbe de notre verger, Pourquoi fuyez-vous de Cythère Les jeux, les ris et les plaisirs? Si la nature est votre mère, N'étouffez donc pas ses désirs.
Voyez, sur la verte feuillée, A ces robustes ormeaux La faible vigne mariée
Par ses plus tendres rameaux. L'eau qui caresse ce rivage Cache un peuple d'heureux amants; Et l'oiseau, par son doux ramage, D'amour chante les feux brûlants.
Sans lui tout est mort sur la terre, Tout gémit dans l'univers ; Le berger voit fuir sa bergère, L'oiseau suspend ses doux concerts; L'onde n'a plus son doux murmure, Le soleil n'est plus radieux,
Et le réveil de la nature
Est quand l'amour ouvre les yeux.
Femme du célèbre ministre de Louis XVI, réunissant à la beauté, à l'érudition, à l'esprit, toutes les vertus, surtout celle de la bienfaisance. On lui doit la fondation, en 1778, de l'hospice Necker, à Paris. Nous ne comprenons pas que l'air de cette jolie romance, si connu depuis soixante ans, n'ait pas été noté dans la Clef du caveau.
CLEF DU CAVEAU 285, 1015, 1427.
Je t'aime tant! je t'aime tant!
Je ne puis assez te le dire, Et je le répète pourtant A chaque fois que je respire! Absent, présent, de près, de loin, Je t'aime est le mot que je trouve; Seul avec toi, devant témoins, Ou je le pense, ou je le prouve.
Zélie, je t'aime en cent façons; Pour toi seule je tiens ma plume: Je te chante dans mes chansons, Je te lis dans chaque volume. Qu'une beauté m'offre tes traits, Je te cherche sur son visage; Dans les tableaux, dans les portraits, Je veux démêler ton image.
En ville, aux champs, chez moi, dehors, Ta douce image est caressée;
Elle se fond, quand je m'endors, Avec ma dernière pensée.
Quand je m'éveille je te voi Avant d'avoir vu la lumière, Et mon cœur est plus vite à toi Que le jour n'est à ma paupière.
Absent, je ne te quitte pas : Tous tes discours je les devine; Je compte tes soins et tes pas : Ce que tu fais je l'imagine. Près de toi suis-je de retour,
Je suis aux cieux, c'est un délire : Je ne respire que l'amour, Et c'est ton souffle que j'aspire.
Ton cœur est tout mon bien, ma loi; Te plaire est toute mon envie : Enfin, en toi, par toi, pour toi Je respire et tiens à la vie. Ma bien-aimée, ô mon trésor! Qu'ajouterai-je à ce langage? Dieu! que je t'aime! Eh bien, encor, Je voudrais t'aimer davantage!
Linval aimait Arsène Et ne put l'obtenir; Traînant partout sa chaîne, Il cherchait à mourir. A la Trappe il espère Terminer son ennui : Il entre au monastère, L'amour entre avec lui.
En lui donnant la haire, Qu'il reçoit à genoux,
L'abbé lui dit : « Mon frère, Quel nom porterez-vous? -Ah! qu'on m'appelle Arsène, Ce nom qui fit mon sort, En redoublant ma peine, Avancera ma mort. »>
Frère Arsène est novice Et, brûlant de ferveur, Des pointes d'un cilice Ensanglante son cœur. Son espérance est vaine, Ce fer l'a déchiré; Mais au portrait d'Arsène Il n'a point pénétré.
Il se passe une année
Sans qu'il soit plus heureux; Enfin vient la journée De prononcer ses vœux. Il hésite, il chancelle, Sentant bien qu'à jamais Son cœur sera fidèle Aux premiers qu'il a faits.
Le désespoir l'emporte; Mais dans l'instant fatal Un homme est à la porte Qui demande Linval : On le refuse, il crie: « Linval, mon doux ami, Ton amante chérie Vient t'arracher d'ici! »>
Au fond du monastère Cette voix retentit, Du pied du sanctuaire Notre amant l'entendit.
Il court, hors de lui-même, A des accents si doux; Il voit l'objet qu'il aime Et tombe à ses genoux.
Sa maîtresse adorée Lui présente sa main; La mort l'a délivrée D'un tuteur inhumain.
Ce couple qui s'adore Fuit loin de ce séjour ; Tous deux pleurent encore, Mais des larmes d'amour.
Dans un désert loin du hameau, Sous un peuplier solitaire, Hylas éleva ce tombeau,
Et sa main grava sur la pierre : « Quiconque en ce lieu passera, De douces larmes versera. »
Assis au pied du monument, Fidèle à l'ombre qu'il adore, Hylas lui conte son tourment, Il lui parle, il l'appelle encore. Écoutons ce qu'il va chantant. Croyant que sa Lise l'entend :
« Hélas! tout près de nous unir Par le saint noeud du mariage, J'ai vu ma belle se mourir
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