Tout à mon âme te rappelle, Et je jouis de mon erreur : Ah! dis-moi comment on appelle Ce qui se passe dans mon cœur !
Quand tu parles, ta voix touchante Dans mes sens porte le plaisir ; Ton aspect me trouble et m'enchante; Je te cherche et voudrais te fuir: Tout à mon âme te rappelle, Et je jouis de mon erreur : Ah! dis-moi comment on appelle Ce qui se passe dans mon cœur!
Les quatre premiers vers de cette romance, si connue, sont de Saint-Péravy. Nous ignorons le nom de l'auteur du refrain et des couplets suivants.
Je le tiens ce nid de fauvette : Ils sont deux, trois, quatre petits. Depuis si longtemps je vous guette, Pauvres oiseaux, vous voilà pris!
Criez, sifflez, petits rebelles, Débattez-vous; oh! c'est en vain : Vous n'avez point encor des ailes ; Comment vous sauver de ma main?
Mais quoi! n'entends-je pas leur mère? Qui pousse des cris douloureux? Oui, je le vois, oui, c'est leur père, Qui vient voltiger autour d'eux.
Ah! pourrais-je causer leur peine, Moi qui l'été, dans nos vallons, Venais m'endormir sous un chène Au bruit de leurs douces chansons?
Hélas! si du sein de ma mère Un méchant venait me ravir, Je le sens bien, dans sa misère Elle n'aurait plus qu'à mourir !
Et je serais assez barbare
Pour vous arracher vos enfants? Non, non, que rien ne vous sépare, Non! les voici, je vous les rends.
Apprenez-leur dans le bocage, A voltiger auprès de vous; Qu'ils écoutent votre ramage, Pour former des sons aussi doux.
Et moi, dans la saison prochaine, Je reviendrai dans les vallons Dormir quelquefois sous un chêne Au bruit de leurs jeunes chansons.
Idylle aussi naïve qu'innocente, qui jouit, dans son temps, d'un grand succès; c'est à ce titre que nous la publions. Oh! comme le siècle d'aujourd'hui prendrait en pitié de pareilles innocences! Pauvre Berquin! pauvre ami des enfants!
DORIS AU LEVER DE L'AURORE
Doris, au lever de l'aurore, Dans son jardin se promenait ;
Un œillet, qui venait d'éclore, Sur les autres y dominait : Elle penche son beau visage Tout près de la fleur incarnat, Mais soudain par ce voisinage, La fleur voit ternir son éclat.
De la fleur qu'à peine elle touche S'exhale un parfum enivrant; L'œillet semble baiser sa bouche, Et je me dis en soupirant : Pour prix de tant de soins fidèles, Pour la punir de sa froideur, Ah! que mes lèvres ne sont-elles A la place de cette fleur!
Doris s'éloigne... je m'élance, Je baise l'œillet enchanteur; J'allais le cueillir... je balance. Eh! pourquoi ravir cette fleur? Doris, au lever de l'aurore, Viendra la respirer demain ; Pour y prendre un baiser encore, Je reviendrai demain matin.
Auprès de mon amie
Je coulais de beaux jours;
D'une si douce vie
J'ai vu finir le cours.
Félicité passée,
Qui ne peux revenir;
Tourment de ma pensée!
Que n'ai-je en te perdant perdu le souvenir?
On peut être aussi belle, On peut autant charmer: Mais qui peut autant qu'elle, Qui peut jamais aimer? Félicité passée, etc.
Souvent de cette eau pure Nous suivions les détours: Quand j'entends son murmure Je songe à nos amours. Félicité passée, etc.
Souvent j'allais l'attendre Sous ces ormes touffus: Elle venait s'y rendre :
Cet heureux temps n'est plus! Félicité passée, etc.
Voyez dans ces asiles
Nos chiffres enlacés!
Dans des jours plus tranquilles
Ma main les a tracés.
Félicité passée, etc.
Ce même air que je chante, Que je chante en pleurant, Avec ma jeune amante Je l'ai chanté souvent. Félicité passée, etc.
Combien de fois l'aurore Fut témoin de nos jeux ! Combien de fois encore Le soir nous vit heureux! Félicité passée, etc.
Elle cessa de vivre
Quand on nous sépara:
Mon cœur devait la suivre: Rien ne me la rendra.
Félicité passée, etc.
Lyre tendre et plaintive, Tes airs sont superflus! Sur l'infernale rive, Églé ne t'entend plus. Félicité passée,
Qui ne peut revenir, Tourment de ma pensée!
Que n'ai-je en te perdant perdu le souvenir?
Né à la Guadeloupe en 1744, mort à Paris le 26 janvier 1793.
AIR De cette aimable solitude.
O toi qui n'eus jamais du naître, Gage trop cher d'un fol amour, Puisses-tu ne jamais connaitre L'erreur qui te donna le jour! Que ton enfance Goûte en silence
Le bonheur qui pour elle est fait; Et que l'envie,
Ignore ou taise ton secret!
La nature, au nom de ta mère,
Va t'offrir ses premiers bienfaits;
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