régnait alors un prince cruel, à ce qu'on dit, & fa femme n'était point une héroïne dont les enfans fuffent des héros. Prefque tout l'ouvrage eft donc une fiction dans laquelle il a fallu s'affervir à introduire un peu de bouffonnerie, au milieu des plus grands intérêts, & des fêtes au milieu de la guerre. Ce divertissement a été exécuté le 23 février 1745, vers les fix heures du foir. Le roi s'eft placé au milieu de la falle, environné de la famille royale, des princes & princeffes de fon fang, & des dames de la cour, qui formaient un fpectacle beaucoup plus beau que tous ceux qu'on pouvait leur donner. Il eût été à défirer qu'un plus grand nombre de Français eût pu voir cette affemblée, tous les princes de cette maison qui eft fur le trône longtemps avant les plus anciennes du monde cette foule de dames parées de tous les ornemens qui font encore des chefs-d'œuvre du goût de la nation, & qui étaient effacés par elles; enfin cette joie noble & décente qui occupait tous les cœurs, & qu'on lifait dans tous les yeux. On eft forti du spectacle, à neuf heures & demie, dans le même ordre qu'on était entré ; alors on a trouvé toute la façade du palais & des écuries illuminée. La beauté de cette fête n'eft qu'une faible image de la joie d'une nation qui voit réunir le fang de tant de princes auxquels elle doit fon bonheur & sa gloire. Sa Majefté, fatisfaite de tous les foins qu'on a pris pour lui plaire, a ordonné que ce spectacle fût représenté encore une feconde fois. DE LA FETE POUR LE MARIAGE DE MONSIEUR LE DAUPHIN. LE SOLEIL defcend dans fon char & prononce ces paroles. L'INVENTE NTEUR des beaux arts, le Dieu de la lumière, Descend du haut des cieux dans le plus beau féjour Qu'il puiffe contempler en fa vafte carrière. La gloire, l'hymen, l'amour, Aftres charmans de cette cour, J'envisage en ces lieux le bonheur de la France, Je reffemble à fes ennemis, Faut-il qu'ayant tant d'affurance, Il ne m'infpire ici que de la défiance? Tout grand homme a de l'indulgence, Qui rend fon fiècle heureux veut vivre en la mémoire. Si l'on dédaignait trop la gloire, (tous les acteurs bordent le théâtre, repréfentant les mufes & les beaux arts.) O vous qui lui rendez tant de divers hommages, Je fais que de la cour la fcience profonde Muses, contentez-vous de chercher à lui plaire, La bonté généreuse afsise sur son trône; Le Rhin libre par lui, l'Efcaut épouvanté, Ces leçons à fon fils, cet exemple à la terre : L'objet qu'on défirait, qu'on admire & qu'on aime, Cueillez toutes les fleurs, & parez-en vos têtes; Mêlez tous les plaifirs, uniffez tous les jeux, Souffrez le plaifant même; il faut de tout aux fêtes, Et toujours les héros ne font pas férieux. Enchantez un loifir, hélas! trop peu durable. Il n'en eft pas ainfi de la vertu folide; Le cœur Mufes, que votre zèle à mes ordres réponde. Et De tous les charmes que je voi; Fin du Prologue. |