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SCENE II.

PROMETHÉ E, les Titans EN CELADE

& TYPHON, &c.

ENCELADE & TYPHON.

ENFANT

NFANT de la terre & des cieux,

Tes plaintes & tes cris ont ému ce bocage.
Parle, quel eft celui des dieux

Qui t'ofe faire quelque outrage?
PROMETHÉ E, en montrant Pandore.

Jupiter eft jaloux de mon divin ouvrage;
Il craint que cet objet n'ait un jour des autels;
Il ne peut fans courroux voir la terre embellie;
Jupiter à Pandore a refufé la vie !

Il rend mes chagrins éternels.

TYPHO N.

Jupiter? quoi! c'eft lui qui formerait nos ames?
L'ufurpateur des cieux peut être notre appui?
Non, je fens que la vie & fes divines flammes
Ne viennent point de lui.

ENCELADE, en montrant Typhon fon frère.
Nous avons pour aïeux la Nuit & le Tartare.
Invoquons l'éternelle Nuit;

Elle eft avant le jour qui luit:

Que l'Olympe cède au Ténare.

TYPHO N.

Que l'enfer, que mes dieux répandent parmi nous Le germe éternel de la vie :

Que Jupiter en frémisse d'envie,

Et qu'il doit vainement jaloux.

PROMETHEE & LES DEUX TITAN S.
Ecoutez-nous, Dieux de la nuit profonde,
De nos aftres nouveaux contemplez la clarté ;
Accourez du centre du monde ;
Rendez féconde

La terre qui m'a porté;
Animez la beauté;

Que votre pouvoir feconde
Mon heureufe témérité.

PROMET HÉE.

Au féjour de la nuit vos voix ont éclaté.
Le jour pâlit, la terre tremble.

Le monde eft ébranlé, l'Erèbe fe raffemble.
(le théâtre change & repréfente le Chaos. Tous les dieux
de l'enfer viennent fur la scène. )

CHOEURS DES DIEUX INFERNAUX,
Nous déteftons

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Je veux fervir la terre, & non pas l'opprimer.
Hélas! à cet objet j'ai donné la naissance,
Et je demande en vain qu'il s'anime, qu'il pense,
Qu'il foit heureux, qu'il fache aimer.

LES TROIS PARQUE S.
Notre gloire eft de détruire;
Notre pouvoir eft de nuire :

Tel eft l'arrêt du fort.

Le ciel donne la vie, & nous donnons la mort.
PROMET HÉE.

Fuyez donc à jamais ce beau jour qui m'éclaire;
Vous êtes mal-fefans, vous n'êtes point mes dieux.
Fuyez, deftructeurs odieux

De tout le bien que je veux faire;
Dieux des malheurs, dieux des forfaits,
Ennemis funèbres,

Replongez-vous dans les ténèbres;
Ennemis funèbres,

Laissez le monde en paix.

NEMES I S.

Tremble, tremble pour toi-même.
Crains notre retour,

Crains Pandore & l'amour.
Le moment fuprême

Vole fur tes pas.

Nous allons déchaîner les démons des combats;
Nous ouvrirons les portes du trépas.
Tremble, tremble pour toi-même.

(les dieux des enfers difparaiffent. On revoit la campagne éclairée & riante. Les nymphes des bois & des campagnes font de chaque côté du théâtre.)

PROMET HÉE.

Ah! trop cruels amis ! pourquoi déchaîniez-vous,
Du fond de cette nuit obfcure,

Dans ces champs fortunés, & fous un ciel fi doux,
Ces ennemis de la nature?

Que l'éternel chaos élève entr'eux & nous
Une barrière impénétrable.

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Puifque tu mets ainfi la grandeur de ton être
A verfer des bienfaits fur ce nouveau féjour,
Tu méritais d'en être le feul maître.

Monte au ciel, dont tu tiens le jour:
Va ravir la célefte flamme:

Ofe former une ame,

Et fois créateur à ton tour.

PROMET. HÉ E.

L'amour eft dans les cieux : c'eft là qu'il faut me rendre : L'amour y règne fur les dieux.

Je lancerai fes traits; j'allumerai fes feux.

C'est le dieu de mon cœur, & j'en dois tout attendre. Je vole à fon trône éternel:

Sur les aîles des vents l'amour m'enlève au ciel.

(il s'envole.)

CHOEUR DE NY M P HE S.

Volez, fendez les airs, & pénétrez l'enceinte
Des palais éternels;

Ramenez les plaifirs du féjour de la crainte ;
En répandant des biens, méritez des autels.

Fin du premier acte.

ACTE I I.

(le théâtre repréfente la même campagne. Pandore inanimée eft fur une eftrade. Un char brillant de lumière descend du ciel.)

PROMETHEE, PANDORE, Nymphes, Titans, Chœurs &c.

UNE DRYADE.

CHANTEZ, nymphes des bois, chantez l'heureux retour

Du demi-dieu qui commande à la terre:
Il vous apporte un nouveau jour;
Il revient dans ce doux féjour

Du féjour brillant du tonnerre ;

Il revole en ces lieux fur le char de l'Amour.
CHOEUR DE NYMPHES.

Quelle douce aurore

Se lève fur nous ?

Terre jeune encore,

Embelliffez-vous.

Brillantes fleurs, qui parez nos campagnes,
Sommet des fuperbes montagnes,
Qui divifez les airs, & qui portez les cieux;
O nature naiffante,

Devenez plus charmante,
Plus digne de fes yeux.

PROMETHEE, defcendant du char le flambeau à la main.
Je le ravis aux dieux, je l'apporte à la terre,
Ce feu facré du tendre amour,

Plus puiflant mille fois que celui du tonnerre,
Et que les feux du dieu du jour.

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