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campagnes françaises! On y distingue différents ordres, comme parmi des citoyens. Ici sont les humbles graminées, qui semblables aux paysans, portent les utiles moissons; de leur sein s'élèvent des arbres fruitiers, dont les fruits, moins nécessaires sont plus agréables, mais qui exigent des greffes et une éducation plus soignée comme les bourgeois. Sur les hauteurs sont les chênes, qui, comme la noblesse, mettent les plaines à l'abri1 des vents, ou comme le clergé, s'élèvent vers le ciel pour en attirer les rosées. Dans le coin d'un vallon sont des pépinières comme des écoles où on élève la jeunesse des vergers et des bois. Aucun de ces végétaux ne nuit à l'autre; tous jouissent du sol et du soleil; tous s'entr' aident, et se prêtent des grâces mutuelles; les plus faibles servent d'ornement aux plus robustes, et les plus robustes d'appui aux plus faibles. Le lierre, toujours vert, tapisse l'écorce raboteuse du chêne, le gui doré brille dans le sombre feuillage de l'aune; le tronc nu de l'érable s'entoure des guirlandes du chèvre-feuille, et le peuplier pyramidal de l'Italie élève vers le ciel les pampres empourprées de la vigne.

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PARTICULARITÉS RELATIVES AUX ARABES.

32. LES Arabes sont en général d'une petite taille, et d'une constitution robuste. Ils ont le corps maigre, le teint basané, les yeux noirs et pleins de feu, le poil brun, la physionomie plus spirituelle qu' agréable, la voix grêle et faible, comme celle des femmes. Ils laissent croître leur barbe, et croient qu'il est honteux de la couper. L'habillement, dans les conditions distinguées, consiste en un caleçon de toile fine, qui couvre la ceinture, les cuisses et les jambes, et par-dessus lequel on met une chemise de soie, qui embrasse tout le corps,

Less. 37.

1. Literally, put the plains to shelter 3. Relatives, fem. pl. of relatif. See from the wind, i. e. sheller the plains from the winds. See Less. 44.

2. S'entr'aident, help each other.

4. Distinguées, fem. plural. Participles

form their feminine like adjectives.

et qui descend encore plus bas que le caleçon. On ajoute à cela un caftan, ou robe de soie à larges manches,' laquelle tombe un peu au dessous des genoux. Dans les lieux où l'hiver est un peu rigoureux, on met dans cette saison par dessus le caftan, une longue robe de drap garnie de fourrure, à laquelle on joint3 quelquefois une autre robe sans manches. Ils ont autour des reins une large ceinture de cuir bordée d'or ou d'argent, dans laquelle ils passent un couteau d'un pied de long, enfermé dans un fourreau, avec un petit poignard qui a aussi sa gaîne.

L'habit des dames est plus riche que celui des hommes. Leur caftan descend jusqu' aux talons. Ses manches sont étroites et courtes; mais celles de la chemise sont si longues qu'elles pendent quelquefois jusqu'à terre. Elles n'ont point de souliers ni de pantoufles dans leurs maisons, mais lorsqu'elles sortent, elles mettent de petites bottines. Au lieu de turban. qui est la coiffure des hommes, elles portent une petite toque de drap d'or ou d'argent, autour de laquelle elles roulent une bande de mousseline ornée d'une riche broderie.

AUTRES PARTICULARITÉS RELATIVES AUX ARABES.

33. LES maisons des Arabes ne sont bâties que de terre battue réduite en mortier, et mêlée d'un peu de paille. Les toits sont en terrasse. Les meubles se réduisent à quelques coussins, à des coffres couverts de chagrin ou de poil de chameau, à des nattes et des tapis, qui servent de siéges et de tables, et à des matelas fort minces sur lesquels ils couchent. Ils ne connaissent pas l'usage des fourchettes ni des couteaux; mais chacun a une cuiller de bois pour prendre les choses liquides. Quand ils prennent leurs repas chacun a devant lui

1. A larges manches, with wide sleeves. 3. Joint, from joindre, varied like plainSee Less. 77, page 139.

2. Genoux, plu. of genou.

dre. See Less. 24.

4. Se réduisent à, reduce thems Ives to,

i. e. amount to.

une petite assiette sur laquelle il pose les viandes qu'il prend au plat1 avec la main. Chacun a la liberté de se retirer2 quand il ne mange plus, et à mesure que les convives se lèvent,3 il en succède de nouveaux. Les domestiques prennent ensuite la place des maîtres. Les femmes mangent dans un lieu séparé.

Au sortir du repas, ils passent dans une salle, où on leur présente des fruits, du café, de l' opium, du sorbet et des pipes. On y brûle dans des cassolettes, de l'encens, de la myrrhe, et d'autres parfums, dont les convives reçoivent la fumée dans leurs habits, sur lesquels on jette aussi de l'eau de rose. Toutes ces choses se pratiquent,5 non seulement dans les repas de cérémonie, mais dans les visites.

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Quant aux qualités morales des Arabes, les écrivains ne sont pas d'accord dans le jugement qu'ils en portent, peut-être parce que chacun ne parle que de ceux dont il a plus particulièrement étudié les mœurs. On convient néanmoins assez généralement que les Arabes qui vivent dans les villes ont les manières plus polies, et le caractère plus sociable.

MINE DE SALSEBRITZ.

34. La mine d'argent de Salsebritz en Suède présente un des plus beaux spectacles. On descend dans cette mine par trois larges bouches semblables à des puits dont on ne voit point le fond. La moitié d'un tonneau soutenu d'un câble serts d'escalier pour descendre dans ces abîmes, au moyen d'une machine que l'eau fait mouvoir. On n'est qu'à moitié dans un tonneau où l'on ne porte que sur une jambe. On comme nos forgerons, qui

a pour compagnon un satellite noir

1. Au plat, from the dish.

6. Portent, put forward, express.

2. Se retirer, to withdraw himself, to 7. Convient, from convenir, to agree,

retire.

3. Se lèvent, rise.

4. Au sortir, on going out.

varied like venir, Less. 20.

8. Sert, from servir, varied like sortir See Less. 29.

5. Se pratiquent, practice themselves, 9. Porte, rests.

i. e. are practiced.

entonne tristement une chanson lugubre, et qui tient un flambeau à la main. Quand on est au milieu de la descente, on commence à sentir un grand froid; on entend les torrents qui tombent de toutes parts; enfin après une demi-heure, on arrive au fond d'un gouffre; alors la crainte se dissipe,' on n'aperçoit plus rien d'affreux; au contraire, tout brille dans ces régions souterraines. On entre dans une espèce de grand salon soutenu par deux colonnes de mines d'argent. Quatre galeries spacieuses viennent y aboutir. Les feux qui servent à éclairer les travailleurs se répètent sur l'argent des voûtes et sur un ruisseau qui coule au milieu de la mine. On voit là des gens de toutes nations; les uns tirent des chariots, les autres roulent des pierres. Tout le monde1 a son emploi; c'est une ville souterraine; on y voit des cabarets, des maisons, des écuries, des chevaux; mais ce qui est le plus singulier, c'est un moulin à vent5 mis en mouvement par un courant d'air. Le moulin va continuellement dans cette caverne et sert à élever les eaux qui incommodent les mineurs.

L'AIGLE ROYAL.

35. C'EST le plus grand de tous les aigles; la femelle à jusqu'à trois pieds et demi de longueur depuis le bout du bec jusqu'à l'extrémité des pieds, et plus de huit pieds et demi de vol ou d'envergure; elle pèse seize et même dix-huit livres. Le mâle est plus petit, et ne pèse guère que douze livres. Tous deux ont le bec très-fort et assez semblable à de la corne bleuâtre, les ongles noirs et pointus, dont le plus grand, qui est celui de derrière, a quelquefois jusqu'à cinq pouces de longueur. Cet oiseau est gras, surtout en hiver; sa graisse est

1. Se dissipe, (dispels itself) is dispelled. 4. Tout le monde, every body. 2. Feux, plu. of feu.

3. Se répètent, (repeat themselves) are

multiplied.

5. Moulin à vent, wind-mill.

6. Eaux, plu. of eau.

7. Ne guère, hardly ever.

blanche, et sa chair, quoique dure et fibreuse, ne sent pas comme celle des autres oiseaux1 de proie.

L'aigle a plusieurs convenances physiques et morales avec le lion; la force et par conséquent l'empire sur les autres oiseaux, comme le lion sur les quadrupèdes; la magnanimité; ils .dédaignent également les petits animaux et méprisent leurs insultes; la tempérance; l'aigle ne mange presque jamais son gibier en entier.2 Il ne se jette jamais sur les cadavres; il est encore solitaire comme le lion. L'aigle a de plus les yeux étincelants, et à peu près3 de la même couleur que ceux du lion, les ongles de la même forme, le cri également effrayant. Nés tous les deux pour le combat et la proie, ils sont égale ment féroces, également fiers et difficiles à réduire; on ne peut les apprivoiser qu' en les prenant tout petits.5

PREFACE TESTAMENTAIRE DE M. D.
CHATEAUBRIAND.

36. Les mémoires à la tête desquels on lit cette préface embrassent le cours entier de ma vie; ils ont été commencés dès l'année 1811, et continués jusqu'à ce jour. Je raconte dans ce qui est achevé, mon enfance, mon éducation, ma jeunesse, mon entrée au service, mon arrivée à Paris, ma présentation à Louis XVI., les premières scènes de la révolution, mes voyages en Amérique, mon retour en Europe, mon émigration en Allemagne et en Angleterre, ma rentrée en France sous le consulat, mes occupations et mes ouvrages sous l'empire, ma course à Jérusalem, mes occupations et mes ouvrages sous la restoration, enfin l'histoire complète de cette restoration et de sa chute.

J'ai rencontré presque tous les hommes qui ont joué de

1. Oiseaux, plu. of oiseau.

2. En entier, entirely.

3. A peu près, nearly.

4. Réduire, to subjugate.

5. Tout petits, quite small.

6. Ont joué- -have played in my time

a part.

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