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lui-même être plus simple, en bien des rencontres; que la sienne. Il est pourtant vrai qu'elle n'étoit pas encore aussi simple que Barrow l'a rendue depuis, en considérant de plus près la nature des poligones, qui présentent naturellement à l'esprit un petit triangle fait d'une particule de courbe, comprise entre deux appliquées infiniment proches, de la différence de ces deux appliquées, et de celle des coupées correspondantes; et ce triangle est semblable à celui qui se doit former de la tangente, de l'appliquée, et de la sou-tangente; de sorte que, par une simple analogie, cette dernière méthode épargne tout le calcul que demande celle de Descartes, et que cette méthode ellemême demandoit auparavant.

Barrow n'en demeura pas là; il inventa aussi une espèce de calcul propre à cette méthode; mais il lui falloit, aussi bien que dans celle de Descartes, ôter les fractions, et faire évanouir tous les signes radicaux pour s'en servir.

Au défaut de ce calcul, est survenu celui du célèbre Leibnitz, et ce savant géomètre a commencé où Barrow et les autres avoient fini. Son calcul l'a mené dans des pays jusqu'ici inconnus et il y a fait des découvertes qui font l'étonnement des plus habiles mathématiciens de l'Europe. MM. Bernouilli ont été les premiers qui se sont apperçus

de la beauté de ce calcul; ils l'ont porté à un point qui les a mis en état de surmonter des difficultés qu'on n'auroit jamais osé tenter aupara

vant.

L'étendue de ce calcul est immense : il convient aux courbes méchaniques, comme aux géométriques; les signes radicaux lui sont indifférens, et même souvent commodes; il s'étend à tant d'indéterminées qu'on voudra; la comparaison des infiniment petits de tous les genres lui est également facile. Et de-là naissent une infinité de découvertes surprenantes par rapport aux tangentes tant courbes que droites, aux questions de maximis et minimis, aux points d'inflexion et de rebroussement des courbes, aux développées, aux caustiques, par réflexion ou par réfraction, &c., comme on le verra dans. cet ouvrage.

Je le divise en dix sections. La première contient les principes du calcul des différences. La seconde fait voir de quelle manière l'on s'en doit servir pour trouver les tangentes de toutes sortes de courbes, quelques nombres d'indéterminées qu'il y ait dans l'équation qui les exprime, quoique Craige n'ait pas cru qu'il pût s'étendre jusqu'aux courbes méchaniques ou transcendantes. La troisième, comment il sert à résoudre toutes les questions de maximis et minimis. La quatrième, com

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ment il donne les points d'inflexion et de rebroussement des courbes. La cinquième en découvre l'usage pour trouver les développées de Huguens dans toutes sortes de courbes. La sixième et la septième font voir comment il donne les caustiques, tant par réflexion que par réfraction, dont l'illustre Tschirnhaus est l'inventeur, et pour toutes sortes de courbes encore. La huitième en fait voir encore l'usage pour trouver les points de lignes courbes qui touchent une infinité de lignes données de position, droites ou courbes. La neuvième contient la solution de quelques problêmes qui dépendent des découvertes précédentes. Et la dixième consiste dans une nouvelle manière de se servir du calcul des différences pour les courbes géométriques; d'où l'on déduit la méthode de Descartes et Hudde, laquelle ne convient qu'à ces sortes de courbes.

Il est à remarquer que dans les sections 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, il n'y a que très-peu de propositions; mais elles sont toutes générales, et comme autant de méthodes dont il est aisé de faire l'application à tant de propositions particulières qu'on voudra je la fais seulement sur quelques exem ples choisis, persuadé qu'en fait de mathématique, il n'y a à profiter que dans les méthodes, et que les livres qui ne consistent qu'en détails ou en pro

positions particulières, ne sont bons qu'à faire perdre du temps à ceux qui les font et à ceux qui les lisent. Aussi n'ai-je ajouté les problêmes de la section neuvième , que parce qu'ils passent pour curieux, et qu'ils sont très - universels. Dans la dixième section, ce ne sont encore que des méthodes que le calcul des différences donne à la manière de Descartes et Hudde; et si elles sont si limitées, on voit, par toutes les précédentes, que ce n'est pas un défaut de ce calcul, mais de la méthode cartésienne à laquelle on l'assujettit. Au contraire, rien ne prouve mieux l'usage immense de ce calcul, que toute cette variété de méthodes; et, pour peu d'attention qu'on y fasse, l'on verra qu'il tire tout ce qu'on peut tirer de celle de Descartes et Hudde et que la preuve universelle qu'il donne de l'usage qu'on y fait des progressions arithmétiques, ne laisse plus rien à souhaiter pour l'infaillibilité de cette dernière méthode.

J'avois dessein d'y ajouter encore une section, pour faire sentir aussi le merveilleux usage de ce calcul dans la physique, jusqu'à quel point de précision il la peut porter, et combien les méchaniques en peuvent tirer d'utilité; mais une maladie m'en a empêché : le public n'y perdra pourtant rien, et il l'aura quelque jour, même avec usure.

Dans tout cela, il n'y a encore que la première

partie du calcul de Leibnitz, laquelle consiste à descendre des grandeurs entières à leurs différences infiniment petites, de quelque genre qu'ils soient : c'est ce qu'on appelle calcul différenciel. Pour l'autre partie, qu'on appelle calcul intégral, et qui consiste à remonter de ces infiniment petits aux grandeurs et aux tous dont ils sont les différences, c'est-àdire, à en trouver les sommes, j'avois aussi dessein de le donner. Mais Leibnitz m'ayant écrit qu'il y travailloit dans un traité qu'il intitule de scientiâ Infiniti, je n'ai eu garde de priver le public d'un si bel ouvrage, qui doit renfermer tout ce qu'il y a de plus curieux pour la méthode inverse des tangentes, pour les rectifications des courbes, pour la quadrature des espaces qu'elles renferment, pour celle des surfaces des corps qu'elles décrivent, pour la dimension de ces corps, pour la découverte des centres de gravité, &c. Je ne rend même ceci public, , que parce qu'il m'en a prié par ses lettres et que je le crois nécessaire pour préparer les esprits à comprendre tout ce qu'on pourra découvrir dans la suite sur ces matières.

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Au reste, je reconnois devoir beaucoup aux lumières de MM. Bernoulli, sur-tout à celles du jeune, présentement professeur à Groningue ; je me suis servi sans façon de leurs découvertes et de celles de Leibnitz. C'est pourquoi je consens qu'ils en revendiquent

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