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l'entend. hume.); Hum a fait un très-grand pas vers le but, et puis s'est égaré. Les autres sont restés à la superficie.

Par rapport aux sources où la philosophie puise ses objets, elle forme deux divisions trèsdistinctes, et qu'il est important de ne point confondre. Ou elle mêle aux conceptions dont elle fait usage quelques conditions individuelles, particulières, données par l'expérience, et alors elle est empirique, (c'est-à-dire, expérimentale), ou elle ne renferme que des conceptions purement intellectuelles, qui sont présupposées à toute expérience, et qui en doivent fournir les lois fondamentales, les conditions absolues. La philosophie, dans ce cas, est pure et rationelle. L'une s'occupe de ce qui est, et comment cela est, l'état des choses étant donné; l'autre de ce qui doit et peut être, sans acception d'aucun état de choses donné. La philosophie empirique recherche les lois de la pesanteur des corps, la rationelle recherche comment il est possible qu'il y ait des corps et qu'il y ait de la pesanteur; recherche qui conduit nécessairement audelà des conceptions de corps, de pesanteur, d'existence, puisqu'il s'agit de leur trouver une base. Second exemple. Le rationalisme re

monte à l'idée absolue de devoir, suivant les vues pures de la raison, idée première qui doit livrer le type le plus abstrait du devoir, type d'après lequel devront se régler ou se juger les cas particuliers: tandis que l'empirisme s'emploie à régler quels sont les devoirs positifs de l'homme, comme fils, ou comme père, ou comme citoyen, etc.

Il est donc deux philosophies; l'une qui précède l'expérience, et l'autre qui l'accompagne ; l'une pure, et l'autre empirique. Cette dernière est plus à la portée des sens et de l'homme ordinaire, elle exige moins d'abstraction, moins de contention d'esprit, et par là est plus propre à devenir populaire; d'ailleurs son domaine est très-fertile en découvertes et en vérités palpables et usuelles. Mais elle ne peut se passer de la première, qu'on a nommé avec justice la législation supréme de la raison, pas plus que les mathématiques appliquées ou empiriques, ne peuvent se passer des mathématiques pures. Il est aisé de voir que pour s'entendre sur le devoir d'un citoyen, par exemple, il faut auparavant être d'accord sur l'idée première et inconditionnelle de devoir.

Eu égard aux objets distincts et particuliers des diverses sciences philosophiques, on les a

classé jusqu'à présent sous ces trois divisions principales: logique, métaphysique et morale.

I. La logique est celle des trois qui est le moins susceptible de sous-divisions, la seule qui forme un système complet de doctrine , et qui depuis long-tems ait acquis la marche sûre et méthodique d'une science. En général on peut dire que c'est la science des règles, fondées dans l'entendement et que l'on doit observer dans l'emploi de la pensée; la science des formes nécessaires de nos concep– tions, jugemens et conclusions; la science formelle du raisonnement, etc.... Elle fait abstraction de toute matière, c'est-à-dire, de tout objet concret de la pensée, pour ne traiter que de ses formes. Et comme dans les autres parties de la philosophie, la pensée a quelqu'objet, autre que sa propre forme, un contenu, une matière dont elle s'occupe, on pourrait comprendre celles-ci sous l'idée générale de philosophie matérielle, par opposition à la logique,

I

1 Quoique Bacon lui en ait trouvé quatre; mais c'était une division arbitraire portant sur les quatre vues différentes que peut avoir celui qui s'en sert; division subjective par conséquent, et qui ne touche nullement à l'unité objective de la science. D'ailleurs Bacon attribuait à la logique beaucoup de choses qui lui sont étrangères.

qui s'appellerait dans ce cas, philosophie formelle ; ce qui, sous ce point de vue, nous fournit encore une distribution de la philosophie.

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J'ai parlé de la logique pure. Quant à la logique empirique ou appliquée elle n'est pas une science c'est un amas irrégulier d'observations, de maximes, d'aphorismes sur la fonction de la pensée, eu égard au sujet dans lequel elle s'exerce, aux passions, à l'imagination, aux préjugés, etc., de l'homme; ou bien, eu égard aux sources de nos connaissances, à la génération de nos idées, à la diversité des objets, aux imperfections, ou autres qualités des langages humains, etc. etc. On a beaucoup travaillé tous ces objets, et l'on a rencontré çà et là quelques connaissances fort estimables, quelques résultats fort ingénieux, mais qui n'ont pas fait faire un pas à la logique comme science 1. Au contraire, tant de recherches accessoires et étrangères l'ont fait tomber en discrédit ; ses bornes ont été effacées; on les a méconnu, et tout est tombé en confusion. Condillac a donné une soi-disant Logique qui n'est qu'un mélange de psychologie empirique, de métaphysique et de théorie de

1 Une bonne partie du livre de Mallebranche n'est que de la logique empirique. Celui d'Helvétius contient les élèmens les plus hétérogènes.

la grammaire générale. Une foule d'écrivains se sont jeté dans cette voie facile et éclectique, ouverte par lui avec tant de succès. Ils ont disserté à perte de vue sur l'analyse, sur l'esprit humain, sur les idées claires, sur le rapport des signes aux idées, et autres choses semblables. L'avantage de la popularité a été leur lot; l'école est resté en possession de la vraie logique.

II. Nous traiterons dans l'article suivant de la métaphysique qui a un grand nombre de sousdivisions. Sa partie empirique peut être désignée sous le nom de science de la nature, ou physique rationelle. Celle-ci a de même ses sousdivisions. Elle se distingue de la physique empirique, en ce que cette dernière n'est point la science, mais plutôt la description et l'histoire des faits de la nature.

III. La morale pure ou éthique, est celle des trois divisions de la philosophie qui importe le plus à l'homme, en tant qu'ètre agissant et social. Que toutes les autres sciences, que les mathématiques, la chimie soient remplies de propositions erronées, il en résultera de moindres maux que d'une seule erreur en morale, d'un faux principe pratique qui peut faire naître tant d'immoralité, de désordres et de crimes. La morale pure doit renfermer la législation suprême de notre volonté et de notre libre arbitre. Mais

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