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le R. P. D. Grégoire Tarisse fut continué général et le R. P. D. Gabriel Teroude prieur de céans.

Le R. P. général donna à M. le Comte, conseiller aux grands iours, aumonier de la reyne, et intime amy de la Maison, des reliques des ss. André, Eutrope, Bienheuré, Magdelaine et Courentin, pour en faire présent à l'église de Montoire d'où il estoit natif, dont fut donnée une attestation.

1647

Brigandages au prieuré des Hermites.

La communauté ayant eu auis que des soldats estoient entrez au prieuré des Hermites, et rauageoient tout, le Père procureur de ce monastère y fut enuoyé avec deux hommes, lequel alat d'abord faire ces plaintes au capitaine nommé M. de Vautourneux, et tout ensemble alèrent uoir dans le prieuré, où ils trouuèrent actuellement les soldats qui emportoient le vin à seille, lesquels estant repris de leurs uiolences..., uinrent la main à l'espée, et en donèrent plusieurs coups sur les hommes qui accompagnoient le père procureur, et un coup d'espée au même père; lequel coutat bon à cet insolent, car ayant esté pris, et mené prisonier à Blois par le préuost, il y fut condamné à uenir faire amande honorable deuant l'églyse de l'abbaye de Vendôme, d'auoir le fouet par les carrefours de la ville, et la fleur de lys; et sans doute qu'il auroit esté condamné à mort, si le père Procureur n'auoit intercédé pour luy. Et le capitaine eut aiournement personnel, mais sans suitte par ce que l'on pacifiat le tout.

SAINTES

& SES ANTIQUITĖS GALLO-ROMAINES

Par M. le colonel DE SACHY.

La jolie ville de Saintes, coquettement assise sur la rive gauche de la Charente, est connue depuis longtemps des archéologues, grâce à ses arènes, à la crypte de saint Eutrope et à ses antiquités galloromaines, recueillies un peu partout, mais principalement dans la ville même.

Des arènes je ne dirai rien, si ce n'est qu'elles sont dans un état de délabrement complet. Quelques réparations intelligentes ont cependant été exécutées, mais ne font que mieux ressortir la ruine de ce qui reste. Les corridors contournant l'édifice ne sont plus indiqués que sur deux ou trois points; tous les sièges où venaient s'asseoir les spectateurs ont disparu, et les degrés qui permettaient à chaque personne de gagner la rangée particulière où sa place était retenue, n'existent plus. On ne retrouve aucune trace des vomitoria par lesquelles les spectateurs pouvaient gagner les corridors intérieurs, et, de là, sortir de l'édifice. L'arène elle-même, où luttaient les combattants, est, sauf une petite partie, encombrée de terre, où poussent tranquillement deux ou trois peupliers; une maisonnette même est bâtie dans l'enceinte du monument. Quelle différence avec les amphithéâtres d'Arles et surtout de Nîmes, qui semblent bâtis d'hier!

Une question a été soulevée au sujet de l'amphithéâtre de Saintes, celle de savoir s'il n'aurait pas servi autrefois à des naumachies. Tel n'est pas l'avis du savant M. L. Audiat, conservateur du Musée de Saintes. Ce monument est bâti dans un vallon étroit et profond, qui débouche sur la Charente, dans la ville même de Saintes. L'élévation de l'arène audessus du cours d'eau est telle, qu'on n'aurait pu l'inonder qu'en supposant de vastes réservoirs dans le haut du vallon. Il faudrait, en outre, pour être fixé sur cette question de naumachies, découvrir la conduite qui amenait les eaux des réservoirs dans l'arêne. Or, jusqu'à présent, aucune découverte n'a été faite, aucune fouille n'a été entreprise, mais tout semble indiquer que la question doit être résolue négati

vement.

A peu de distance au sud des arènes, mais sur la hauteur, s'élève l'église de Saint Eutrope, premier évêque de Saintes et qui prêcha l'évangile dans la Saintonge aux premiers siècles de notre ère. Cette église mérite une mention particulière, à cause de sa crypte du Xe au XIe siècle, admirablement conservée. Vendôme passe pour avoir possédé le corps de saint Eutrope, qui aurait été déposé dans notre église de la Trinité. Il est certain que le culte du saint y était régulièrement célébré par les bénédictins, et l'une des chapelles de l'église est encore placée sous son vocable.

Tout ce qui se rapporte à saint Eutrope nous offre donc un certain intérêt. Malheureusement les documents historiques que l'on possède sur lui se réduisent à très peu de chose. On sait qu'il vivait au Ier siècle, et qu'après avoir été sacré évêque par Clément, il fut envoyé dans les Gaules pour prêcher l'Évangile dans le pays Sauton; qu'il devint premier évêque de Saintes et qu'il y fut martyrisé. On conservait son chef dans l'église cathédrale de la ville, lorsqu'en 1793 le reliquaire qui le renfermait fut pillé. Le tète

de saint Eutrope, mise dans un sac, fut portée au district et jetée sans respect au rebut. Il se trouvait là, par hasard, un habitant de la ville qui eut l'adresse de soustraire cette relique, et qui put la rendre à l'église lorsque la tranquillité fut rétablie (1).

L'église haute de Saint-Eutrope, de style roman, comme la crypte, a été détruite en partie, et n'a plus aujourd'hui que la moitié de sa longueur primitive. L'abside, bâtie postérieurement, est de style gothique. Peut-être est-elle de la même époque que le clocher, bâti sous Louis XI et à ses frais, ainsi que l'atteste une lettre conservée à la bibliothèque de la ville et adressé au gouverneur de la province. Dans cette lettre, Louis XI recommande qu'on surveille attentivement l'architecte, afin qu'il ne dépasse pas son devis, comme ne sont que trop portés à le faire ses semblables, lorsqu'ils travaillent pour les gens riches. Louis XI avait pour saint Eutrope une vénération particulière, partagée, du reste, comme on sait, avec bon nombre d'autres saints.

La crypte se compose d'une nef et de deux bascôtés. On y accède par une ouverture pratiquée à la base du clocher de l'église. Mais autrefois on y descendait de l'église haute; un mur relativement récent a fermé ce débouché. En 1843, des fouilles opérées dans la crypte ont mis à découvert une pierre tombale, sur laquelle était gravée le nom Eutropus. On se trouvait en présence du tombeau de saint Eutrope. Averti de ce fait, Mgr l'évêque de La Rochelle nomma une commission, présidée par l'un de ses grands vicaires, et composée de plusieurs notables de la ville de Saintes et de plusieurs ecclésiastiques. Le prési

(1) Ces détails sont extraits d'une Vie des Saints, d'après laquelle saint Eutrope aurait vécu au III siècle. Il y a là évidemment une erreur, puisque saint Clément mourut vers l'an 100 de notre ère. Cf. Un Office de Saint Eutrope, par l'abbé Métais; Bull. de la Soc. Arch., année 1686, p. 255.

dent de la commission n'était autre que M. l'abbé Pallu du Parc, qui devenait quelques années plus tard évêque de Blois. La commission procéda à l'ouverture du tombeau, et y trouva un corps auquel manquaient la tête, une côte et une partie d'un des poignets. Or le chef de saint Eutrope a toujours été conservé dans l'église haute. Après de nombreuses délibérations, la commission conclut qu'elle se trouvait véritablement en présence du corps de saint Eutrope.

L'honorable M. Audiat a été depuis lors assez heureux pour découvrir, grâce à ses nombreuses relations, que la côte et le poignet du saint se trouvaient, l'une à Moulins, l'autre à Saint-Jean-d'Angély.

En présence de ces faits, je ne puis partager l'opinion de notre honorable collègue M. l'abbé Métais. Dans son travail sur un office de saint Eutrope au XIe siècle, inséré dans le Bulletin de notre Société (4 trimestre 1886, pages 257 et suiv.), M. l'abbé Métais nous dit qu'après la conquête de la Saintonge par Geoffroy Martel, les reliques de saint Eutrope et de saint Léonce furent transportées à Vendôme. Si par reliques il faut entendre le corps entier, il y a, je crois, erreur. D'un autre côté, M. l'abbé Métais nous explique très bien pourquoi ce tombeau de saint Eutrope était enfoui dans la crypte de l'église de Saintes, où il devait être découvert en 1843. En effet, en 1062, deux ans après la mort de Geoffroy Martel, Guillaume d'Aquitaine vint mettre le siège devant la ville de Saintes, et les habitants s'empressèrent de cacher ce qui leur restait du corps de leur glorieux patron.

Quoi qu'il en soit, le tombeau de saint Eutrope se trouve aujourd'hui dans la crypte de l'église, derrière l'autel. Il est de style roman.

Le Musée Archéologique de Saintes date de 1815. En cette année, une partie des murailles de la ville furent démolies, et les travaux de terrassement exécutés les années suivantes, pour niveler le terrain et donner passage à la grande route de Niort à Bor

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