Page images
PDF
EPUB

mains, et qui, dans son genre, est une pièce véritablement curieuse.

Cette brochure a pour objet un médicament rapporté en France par un certain M. Alègre, et soumis au mois de décembre 1853 à la sanction de l'Académie, comme une nouveauté des plus précieuses contre les hémorrhoïdes.

Les membres nommés pour composer une commission d'examen, furent MM. Renaudin, Robinet, Gérardin. Chatin, Poinseuille, Caventou, Guéneau de Mussy et Gaultier de Claubry, et voici comment, au mois de septembre 1855, M. le rapporteur s'exprimait devant l'Académie :

« Le premier soin de votre commission, messieurs, a été de rechercher si la substance végétale indiquée dans la lettre de M. Alègre, était connue et décrite dans quelque traité de médecine, de pharmacie ou de matière médicale: c'est en vain que nous avons ouvert un assez grand nombre de dictionnaires ou autres ouvrages; partout ou le PIMENT DE M. ALEGRE (capricum annuum) est décrit ou nommé, on ajoute que c'est plutôt comme condiment que comme médicament qu'il est usité dans certains pays. >>

« .... Pour plus de sûreté, continue M. le rapporteur, la commission a interrogé quelques personnes qui pouvaient la renseigner sur l'usage qu'on faisait du piment dans quelques contrées où nous savions qu'il était cultivé. La réunion à Paris d'un grand nombre de savants étrangers, comme membres du jury international, a singulièrement favorisé cette espèce d'enquête; il en est résulté que nulle part, à notre connaissance, le piment n'est employé commé médicament. >>

Et plus loin:

« La commission, avant de se déterminer à proposer à l'Académie de faire au médicament dont il s'agit, l'honneur de l'application de l'un des décrets qui régissent les remèdes SECRETS ET NOUVEAUX, fidèle aux habitudes de l'Académie, a pensé qu'il y avait lieu de soumettre les fruits du PIMENT ALEGRE, employé contre les hémorrhoïdes, à des essais établis sur une plus grande échelle; aussi la commission terminet-elle son rapport en ces termes :

« Mais, considérant qu'il serait très-difficile de faire ces essais si un grand nombre de médecins n'étaient pas instruits de l'état actuel de la question, la commission, du consentement de M. Alègre, consigné dans une lettre transmise par M. le ministre, a pris le parti de faire connaître à l'Académie la nature du remède. >>

(Lu et adopté en séance publique, le 11 septembre 1855.)

Or, ce PIMENT ALEGRE, qui, selon M. le rapporteur, n'est désigné nulle part comme médicament; ce PIMENT ALEGRE, au sujet duquel la réunion à Paris d'un grand nombre de savants étrangers a si singulièrement favorisé l'enquête académique; ce PIMENT ALÈGRE auquel on se propose d'appliquer l'un des décrets qui régissent les remèdes secrets et nouveaux, et dont son inventeur autorise de si bonne grâce l'apparition devant l'Académie; ce PIMENT ALEGRE, ou plutôt, si l'on veut bien souffrir que je l'appelle un instant par le modeste nom qu'il portait, avant d'avoir été découvert par l'honorable navigateur qui consent à lui donner le sien, le capsicum annuum, enfin, n'occupe pas moins, depuis une quarantaine d'années, de quatorze grandes pages de la Matière médicale de Hahnemann; et, puisque, la commission désire que les médecins soient instruits de la

nature de ce remède, nous allons extraire de la pathogénésie qu'en a donnée Hahnemann, une dizaine de lignes qui montreront, d'une part, que ce n'est point comme condiment que cet homme illustre envisageait le capsicum annuum, et; d'autre part, que.ce médicament, ainsi que tous ceux que M. Alègre pourra découvrir, n'agit pas autrement qu'en vertu du principe des semblables.

Voici les symptômes pathogénésiques rapportés par Hahnemann, à propos de l'action pure du capsicum sur l'extrémité inférieure du tube intestinal:

Douleur brûlante dans l'anus.

Prurit à l'anus.

Douleur lancinante, cuisante, dans l'anus pendant une selle diarrhéique.

HEMORRHOÏDES BORGNES, qui causent de vives douleurs en allant à la selle.

HEMORRHOÏDES A L'ANUS, qui causent parfois des démangeaisons.

Écoulement de sang par l'anus, etc.

Est-il clair que les hommes qui nous repoussent et nous raillent à l'occasion si agréablement, ce que d'ailleurs nous leur rendons bien, j'aurais tort de ne pas l'avouer, est-il clair, disons-nous, que ces hommes n'ont jamais ouvert l'ouvrage le plus élémentaire de l'école homœopathique?

Est-il moins clair que, sans s'en douter le moins du monde, l'Académie accorde sa haute sanction à un médicament dont l'action thérapeutique est si manifestement basée sur le principe de similitude?

Ce n'est pas à la bonue foi que j'en appelle, c'est au plus grossier bon sens.

DOSES.

L'expérimentation pure et le principe de similitude, ai-je dit tout à l'heure, sont les deux principaux éléments de la méthode homoeopathique. J'ajoute maintenant que la dynamisation médicamenteuse en est le complément, et que ce complément est le plus souvent indispensable, si l'on veut éviter ces exacerbations toujours fatigantes et parfois dangereuses, dont nous avons rapporté de si fréquents exemples dans le cours de ce travail.

Si j'avais à m'expliquer en ce moment sur cette importante question de la dose, je dirais encore, entre autres choses, qu'il est beaucoup de médicaments qui n'agissent, dans certains cas, qu'à des dynamisations très-élevées. Mais, comme cette question des doses infinitésimales n'a pas encore reçu la solution qui dissipera l'apparente absurdité qu'on lui trouve au premier abord, je me contenterai d'invoquer à cet égard l'expérience personnelle de mes confrères.

En ce qui concerne l'hydrocotyle, j'ai cru m'apercevoir que, dans la majorité des cas, les basses atténuations (5°, 4o, 6o et 12o) étaient préférables aux atténuations plus élevées; ce qui dépend peut-être de ce que ce médicament perd un peu de sa force médicatrice dans le long trajet qu'il parcourt avant d'arriver jusqu'à nous. Cela s'explique aussi, peut-être, par la règle généralement adoptée parmi nous, que les substances végétales

acquièrent des vertus potentielles, à moins de frais de dynamisation que les substances minérales.

Quoi qu'il en soit, les dilutions que je viens d'indiquer m'ont toujours suffi, et si j'excepte deux ou trois cas, elles n'ont jamais déterminé ces accidents qui ont obligé mes honorables confrères à suspendre l'usage de l'hydrocotyle.

Ceux donc qui voudront suivre mon exemple, enverront à l'une des pharmacies de MM. Catellan frères; les autres s'adresseront à MM. Dalpiaz et Fournier.

Dr AUDOUIT,

Ex-médecin de la marine militaire.

QUELQUES MOTS DE RÉPLIQUE

A LA RÉPONSE DE M. CRAMOISY.

Je n'ai point l'intention de prolonger la discussion qui vient de s'élever entre mon honorable confrère et moi; aussi le but de ces quelques lignes sera-t-il de résumer le débat plutôt que de l'étendre.

Mon honorable confrère prétend que j'ai nié l'existence des champignons que l'on rencontre dans certaines affections morbides. C'est une erreur. J'ai si peu nié l'existence de ces cryptogames, que j'ai reproduit avec le plus grand soin les remarquables travaux entrepris sur ce sujet par l'honorable M. Bazin, et que je me suis plu à leur rendre toute la justice qu'ils méri

tent.

Ce

que j'ai nié, c'est le rôle tout externe, tout local,

« PreviousContinue »