le fubît le même fupplice. C'eft une 29 maxime des Juifs, que celui qui eft complice d'un crime, eft auffi coupable que celui qui le commet. Il ne faut pourtant pas augmenter les difficultez. Rien ne nous contraint de croire que Dieu ait ordonné, que les perfonnes de la Maifon d'Achan fuffent brulées avec lui; comme il ne paroit pas que la fentence les regardât, nous croyons que ce que l'Hiftoire fainte dit touchant fon exécution, ne les regarde point auffi: & ce n'eft point ici le lieu d'éclaircir ces endroits de nos Ecritures, dans lefquels on voit des innocens envelopez dans le fupplice des coupables. Quoiqu'il en foit, c'étoit participer en partie au fupplice de fon Chef de Famille que d'en être foi-même le témoin : c'est tout ce à quoi Dieu condamna celle d'Achan, pour lui infpirer une jufte horreur du crime qui lui attiroit un fort fi funefte. L'Hiftorien dit que Fofué, & tout Ifraël avec lui fe faifirent d'Achan, Jofué de l'argent, du manteau, du lingot d'or, de fes fils, de fes filles, de fes bœufs, de fes ânes, de jes brebis, de fa tente, & de tout ce qui étoit à lui; que tous les Ifraëlites l'assommérent de pierres, & le brulérent au feu. Il femble qu'on voulut dans cette occafion que le fupplice de la lapidation précedât celui du feu, afin d'exécuter la fentence que Dieu avoit prononcée contre Achan, mais en la prenant dans le fens le plus doux qu'il étoit permis de lui donner. Or Dieu avoit bien ordonné que celui qui auroit été furpris avec de l'interfut brulé, mais non qu'il fut brulé vif. On crut fatisfaire à cet ordre en lapidant Achan a de PIRKE ELIEZER, vant VII. 24. vant que de le bruler. 30 Ceux des Rabins, qui pendant que Jérico fut prife un jour de Sab bat, difent que le malheureux Achan avoit profané la fainteté de cette Fête en retenant ce qui devoit être voué à Dieu: qu'il fut lapidé comme violateur du Sabbat, & brulé comme Sacrilege. Il eft vrai pourtant que les Juifs bruloient vifs certains criminels. Et fi nous nous en raportons à leur tradition, on enterroit jufques au cou celui qui avoit été condamné à ce fupplice, on lui ouvroit la bouche avec un linge, & l'on y jettoit du plomb fondu. Il eft inutile de juftifier Jofué d'une espéce de defpotifme, qu'il femble avoir exercé dans cette occafion. Quand il auroit de fa propre autorité fait mourir Achan d'une mort violente, il l'auroit pû fans outrer le pouvoir, dont il étoit revêtu. Pouvoit-il en faire un meilleur ufage que d'exterminer un homme, qui venoit de donner un exemple fi pernicieux, & dont P'imitation eût été capable d'arrêter les triomphes des Ifraelites? Il ne faudroit pas juger de cet évenement par les cas ordinaires : dans ceuxci il falloit deux témoins pour condamner un homme à la mort: mais le témoignage de l'Oracle valoit mieux que celui de deux hommes, & Achan avoit déjà temoigné contre lui même en confeflant fon crime. D'ailleurs les 32 Juifs difent, que le Roi avoit l'autorité de condamner un criminel fur la de 30 JARCHI in Jofua VII. 25. pag. 19. 31 JOH. HENR. HOTTINGER. jus Hebræorum Lex: 45.46. pag. 58. & Lex 224. 225. pag. 335. SCHIC*A & D. jus Regium Hebræor. Theorem. 14. cap. 4. pag. 264. 2 Sam. dépofition d'un feul témoin. David femble avoir porté fon pouvoir plus loin, lorfqu'il fit. 25. mourir fans aucune formalité de juftice celui, qui avoit hâté la mort de Sail, fous prétexte d'abréger & de terminer fes miferes. Jofué exerçoit par l'ordre de Dieu une puiffance plus que royale fur Ifraël. Mais comme nous l'avons déjà infinué, nous n'avons pas befoin de ces folutions: Jofué ne fit qu'exécuter la fentence, que Dieu lui-même avoit prononcée contre celui qui feroit trouvé coupable du crime, dont Achan venoit d'être convain cu. * 2 Sam. Efaïe Lorfque qu'elle fut exécutée, on voulut en conferver la mémoire. Non feulement les Ifraëlites donnérent le nom d'Achor, c'est à-dire, valée de trouble, au lieu dans lequel Achan avoit été lapidé, mais comme cela fe pratiquoit* Voi. dans d'autres occafions, ils firent avec les pier- XVIII. res, qui avoient fervi à le lapider, un monu- 17. Jofué ment, qu'ils érigérent fur fes cendres: & ce vi11.29. monument fubfiftoit encore dans le temps que Jofué écrivoit cette Hiftoire: peut-être Jer. 1x. auffi ces paroles de fon livre, ils drefferent un 11. monceau de pierres jufques à ce jour, doivent-elles être rangées parmi celles qu'Efdras, ou quelque autre Auteur infpiré, a inferées dans le texte, long temps après Jofué. Le but de ceux, qui drefférent ce monceau, étoit de rappeller fans ceffe à tout Ifraël la mémoire du crime d'Achan, & l'obligation indispensable où 32 Voi. SCHICKARD. ibid. Theorem: 14. cap. 4. pag. 255 MAIMONIDES Hal. Sanhed. cap. 18. & in Hal, Melach. fin. cap. 3. 7 739. XXV. 2. 92 ACHAN PREND DE L'INTERDIT,&c.Difc. III. où ils étoient d'avoir une entiére déférence pour les ordres de Dieu. Heureux s'ils avoient toûjours fuivi cette leçon, & s'ils n'avoient, en furpaffant Achan par leurs crimes, attiré fur leur nation de plus grands malheurs! DIS L E fupplice d'Achan fut bientôt fuivi de la prise d'Haï. Dieu ordonna aux Ifraëlites de traiter cette ville comme ils avoient traité celle de Jérico. Atterrez par l'exemple d'Achan ils fe foûmirent à l'ordre qui leur avoit été donné, & ce fut là une de ces rares occafions, dans lesquelles ils eurent pour les loix de Dieu une obéiflance fans referve. La prife d'Haï, & la rigueur qui avoit été exercée contre fes habitans redoublerent la fraieur des Cananéens, & firent évanouir la joie, que le foible avantage qu'ils avoient remporté leur avoit caufée. Ils réunirent leurs efforts contre des ennemis fi redoutables. Tous les Rois du païs de Canaan formérent une Ligue. Six nations entiéres, à favoir les Héthiens, les Amorrhéens, les Cananéens, les Phéréfiens, les Héviens, les Jébufiens, fe joignirent ensemble, comme s'ils n'avoient été qu'un feul peuple,& refolurent de concert de s'opposer aux progrès des lfraëlites. T Il n'y eut que quatre villes des Héviens, à favoir Gabaon, Kephira, Beeroth, & Kirjathjeharim, qui refeferent d'entrer dans cette Li gue |