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dans une plus longue digreffion: ce que nous en avons dit fuffit pour nous porter à donner Jofué V. au térme de l'Original fa fignification la plus naturelle, & à traduire cailloux, au lieu de couteaux tranchans.

5.

Il n'eft pas difficile de découvrir pourquoi Dieu voulut que la Circoncifion fût adminiftrée aux Ifraëlites après le paflage du Jourdain. La chofe eft décidée dans les paroles que nous avons citées, par où il paroit que l'ordre, que Dieu donné dans cette occafion, regarde les Ifraëlites qui n'avoient pas été circoncis dans le Defert. Cette raifon, marquée d'une maniére fi expreffe, éclaircit tout ce qui femble équivoque dans ce paffage. Elle fait voir manifestement, que ces termes, circoneis de nouveau & une feconde fois les Ifraëlites, ne fignifient pas qu'on dût adminiftrer la Circoncifion à ceux qui l'avoient déjà reçûe. Les Juifs ont donné ce faux fens à ce texte. Et pour lever la difficulté qu'ils trouvent dans l'ordre inoui d'une feconde Circoncifion, ils difent que quand on l'avoit adminiftrée pour la premiére fois aux Ifraelites, auxquels ils prétendent qu'il eft ordonné de la réiterer, apertio partis circumcifa, quam vocant Perigna, non fatis magna fuerat: fecundum eos, ut vidimus fupra, qui circumcidit & non denudat, idem agit ac fi non circumcideret, imò qui præputium iterum attrahit fecundâ circuncifione eget. Nous fuppofons donc comme un principe inconteftable, que l'ordre, qui eft ici donné d'adminiftrer la Circoncifion, ne regarde que ceux qui étoient nez dans le Defert.

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Mais

12. JALCUT Part. II. fol. 4. pag. 1. col. 1. voi, auf PIRKE ELIEZER cap, 29. pag. 67.

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Mais pourquoi avoit - on négligé pendant quarante années l'adminiftration d'un Sacrement, dont l'obfervation devoit être éternelle, & qui étoit prefcrite fous de peines fi rigoureufes ?

&c.

*Nous avons déjà dit dans un autre endroit,que nous adoptions la penfée de ceux qui croyent que ce fut, non le mépris de cette cérémonie, mais l'iné certitude du temps des décampemens, les incommoditez du voyage, la ftérilité des lieux où féjournoient les Ifraëlites, qui les empêchérent de circoncire leurs enfans dans le Defert. Il ne nous femble pas qu'ils ayent péché dans cette conduite: du moins elle ne leur eft reprochée dans aucun endroit des Ecrits facrcz. Les cenfures, qui leur font faites dans le Pleaume XCV. & dans les Revelations du Pro- Pleau. phete Amos, ne nous paroiflent pas tomber fur XCV. 8. le mépris qu'ils auroient eu de la Circoncifion. Ames V. Ils ne firent que fuivre alors une maxime qu'ils 25. &c. ont toûjours retenue, c'eft que l'on peut differer Padminiftration de ce Sacrement, quand on ne peut le recevoir fans péril. C'est même une de leurs régles générales, que les Ifraëlites ne font tenus à aucun précepte, dont l'oblervation cauferoit la mort (ce qui doit s'entendre des préceptes cérémoniels, & qui feroit infoutenable s'il étoit queftion de ces loix morales, dont il n'eft pas permis de s'éloigner, quand même on ne pourroit les obferver qu'aux dépens de fa vie:) ils rendent une raison finguliére de cette régle: c'eft que l'Ecriture dit P'Ecriture dit que celui qui

obfer

13. Dans le Difcours XV. du Í. vol. pag. 257. 218. 14. Voi. LEIGHFOOT. Hora Hebr. in I. Cor. VII. i. tom. 2. pag. 900.

Marc.

11. 41.

I Mac

obfervera ces loix vivra, non qu'il mourra par elles. Si cette raifon eft frivole, la régle, qu'el le établit à l'égard de la Circoncifion, n'en eft pas moins folide, & Jefus Chrift femble l'avoir eue en vûe, quand il dit, que le Sabat eft fait pour l'homme, & non l'homme pour le Sabat.

Ce fut en vertu de cette régle que les Juifs déchab. II. cidérent fous la perfécution d'Antiochus, qu'il 40. 01. n'étoit point néceflaire de fuivre l'exemple de

leurs frères, qui par un fcrupule fuperftitieux s'étoient laiflé immoler fans défense un jour de Sabat, & qu'il étoit permis de faire tête à l'ennemi dans ce jour-là. "Les Juifs portent fi loin la difpenfe de fe circoncire en cas de péril, qu'ils exemptent de ce Sacrement ceux, dont le frére feroit mort de la plaie qu'il en auroit reçûe: ils prétendent que dans ce cas un Sacrificateur peut avec le prépuce, faire dignement toutes les fonctions de fon miniftére.

Quoique j'aie allégué l'opinion qui paroit la plus raifonnable, & qui eft celle de plufieurs Rabins, fur la fufpenfion de la Circoncifion dans le Defert, je raporterai hiftoriquement deux autres penfées des Interprétes fur ce fujet.

16

La premiére eft celle que des Docteurs Juifs ont imaginée, c'eft que le vent d'Aquilon, néceflaire pour la guérifon des playes de la Circoncifion, ne foufioit point dans le Defert, de peur qu'il n'eût fait évanouir la Colomne de nuée. Ils ajoûtent que pendant le féjour que les Ifraëlites y firent, ils furent pres

15. Idem ibid.

que

16. JALCUT Part. II. fol. 4. gag. 1. col. 1. voi. auffi Talmud Jebamot. fol. 71. pag. 1. & tract. Githin cap. 3. voi. BUXTORF. Synagog. Juda, cap. 4. pag.

que toûjours fous l'anathéme à caufe des differens crimes dont ils fe rendirent coupables: & ils croyent que ç'auroit été profaner le Sacrement de la Circoncifion que de l'adminiftrer à des rebelles.

La feconde pensée eft celle de 17 Théodoret, de Damafcius, & de " Mr. le Clerc: une des principales caufes, difent-ils, des loix cérémonielles étoit de diftinguer les Ifraëlites d'avec les peuples idolatres. C'étoit là particuliérement le but de la Circoncifion. Dieu avoit dit en la prefcrivant à Abraham: Ce fera le fi- Genf. gne de l'Alliance que je contracte avec vous. Or les XVII, Ifraelites étoient feuls dans le Defert: il n'étoit pas à craindre qu'ils fe mélaffent avec des Nations idolatres, & qu'ils participaffent à leur idolatrie. L'obfervation de la Circoncifion étoit auffi peu néceffaire que celle des Sacrifices, qui purent être négligez fans crime par une même raison.

Les paroles, que Dieu prononça après que les Enfans d'Ifraël eurent été circoncis, font obfcures, aujourd'hui j'ai roulé de.deffus vous Popprobre des Egyptiens.

20

Les Juifs les ont expliquées d'une maniére bifarre: ils ont dit que quand le peuple d'Ifraël témoigna vouloir fortir d'Egypte, Pharao leur avoit dit pour les retenir, que fa fcience dans l'Aftrologie judiciaire lui découvroit, qu'un fleau général fondroit fur eux quand ils feroient hors de fes Etats. Selon ce commentaire

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17. THEODORE T. quæft. 3. in Jof. Tom. I. pag. 199. 18. DAMASCENUS de fide orthodox. Lib. IV. cap. 25. pag. 298.

19. CLERICUs in Jos. V. 3. pag. 10.
20. JALCUT Part. II. fol. 4. pag. 1, col. 2.

II.

Popprobre des Egyptiens feroit cette funeste pré diction de Pharao: Dieu avoit roulé par la Circoncifion Popprobre des Egyptiens, c'est-à-dire, que par ce Sacrement il avoit mis fon peuple en état de prévenir la ruine qui leur avoit été annoncée.

11 y a plus de vraisemblance, quoique felon nous il n'y ait pas plus de vérité, dans la penfée de ceux qui fupofent, que la Circoncifion étoit en ufage chez les Egyptiens avant Moyfe, & qui parafrafent ainfi ces paroles, j'ai ôté de deffus vous ce qui vous rendoit odieux aux Egyp

tiens.

22

Nous avons raporté ailleurs les raifons, qui nous perfuadent que la Circoncifion eft plus ancienne chez les Juifs que chez les Egyptiens: nous avons tâché de prouver, que le cérémoniel religieux, qui fut prefcrit au peuple Juif, n'étoit point une imitation de celui qu'il avoit vû en Egypte. Il eft vrai qu'un favant homme a propofé avec beaucoup d'érudition & de politeffe des objections contre ce que nous avons avancé fur cette matiére. Nous ne croyons pourtant pas devoir abandonner notre opinion quelque refpect que nous ayons pour celui qui l'a attaquée: fi les grandes occupations de ce célébre Auteur lui avoient permis de pefer nos preuves, ou plûtôt fi nous les avions exprimées avec plus de clarté, il auroit peut-être fenti qu'elles ne font pas toûjours énervées par les difficultez qu'il allégue pour les refuter. Il a quelquefois combattu comme des argumens ab

21. SPENCER de Legibus Hebr. Tom. I. Lib. I. cap. 4. fect. 4. pag. 27. &c.

22. Dans notre I. Vol. Difcours XV. pag. 245.

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