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vant les régles de la Poéfie des Hébreux, telles qu'elles avoient été conçues par Gomar. 35 Louis Cappel va plus loin encore: il dit qu'en fuivant cette méthode on pourroit prouver que les Oraifons de Ciceron, & celles de Demofthènes, que l'Hiftoire écrite par TiteLive, & celle de Thucydide, font de véritables Poèmes.

Encore fi ceux, qui veulent nous apprendre à fcander les vers Hébreux, fe contentoient d'en mefurer les fyllabes à leur gré, il n'y auroit peut-être rien d'utile dans leurs recherches, mais il n'y auroit non plus rien de dangereux. Mais on a quelquefois propofé certaines règles pour réuffir dans ce deffein, on leur a enfuite aflujetti le Texte Hébreu, dans lequel on a fait des altérations pour l'accommoder à ces prétendues règles qu'on avoit imaginées. C'est ce 36 qu'on a reproché avec raifon à Meibomius, qui fe vante d'avoir corrigé plus de trois mille fautes dans le Texte.

On a même fait diverfes objections à un favant Homme, que je n'aime pas à nommer, quand je fuis obligé de combattre fes opinions, qui a avancé que quelques-uns des Cantiques de nos Ecritures font rimez, & qui en a marqué les rimes. Nous ne prendrons aucun parti dans cette querelle. Nous reconnoiffons pourtant qu'il a fallu fe donner beaucoup de gêne pour trouver dans le Cantique de Débora des rimes proprement dites. 37 Il a fallu quelquefois que

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36 Idem ibid.

le

37 CLERICUS in Jof. 5. 5. 6.7. le 14. & le 15. le 21. & 22. 27. & 28. le 70. au 71. le 18. au 80. le 97. au 98. & 99.

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le même terme, placé à la fin de deux ou de trois vers confécutifs en fit la rime. 38 Il a fallu qu'un feul mot de peu de fyllabes fit un vers entier. 39 ll a fallu fuppofer ou du moins laiffer foupçonner, qu'il y avoit des omiffions dans l'Original, parce qu'on ne pouvoit point trouver de rime dans certains endroits. Je ne fai fi en appliquant ces règles à des Ouvrages d'un tout autre genre, & en ufant des mêmes licen-, ces, on n'y trouveroit pas auffi des rimes. Faifons en l'effai fur la traduction Françoise du Cantique de Débora, telle qu'elle eft en ufage parmi les Proteftans. Il me femble que pourvû qu'on fe donne la même liberté, que l'Auteur, dont j'ai parlé, a prife en mefurant ce Cantique dans l'Original, fi l'on fait la rime du même mot répété, fi l'on forme un vers d'un feul mot, fur-tout fi l'on fuppofe quelque omiffion dans cette traduction, elle paroitra un véritable Poème, quoique nos Traducteurs n'ayent eu rien moins en vûe en la publiant que de faire un Ouvrage de ce genre.

Béniffez l'Eternel

De ce qu'il a fait de telles vangeances en Ifraël,
Et de ce que le Peuple a été

Porté

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38 Voi. le verf. 79. & le roo.

39 Voi. le io. verf. où l'on n'a pû trouver de rime, & où l'on a marqué par une étoile la prétendue omis fion, & le 41. verf.

C'est

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C'est moi,

Qui chantera à l'Eternel,
Je pfalmodierai à l'Eternel,
Le Dien d'Ifraël.
O Eternel, quand tu
Sortis de Sehir, quand tu
Marchas du territoire

D'Edom, la Terre

Fut ébranlée, & même les Cieux fondirent,
Même les Nuées fondirent,&c.

C'eft affez fur cette matière. Mais comme le Cantique de Débora eft obfcur en divers endroits, & que la fcrupuleufe fidélité de nos Interprètes les rend fouvent inintelligibles, nous placerons ici la traduction qu'ils ont faite de ce Cantique, nous y joindrons une Paraphrafe, & nous mettrons à côté des endroits, qui paroitront le plus changez, les raifons des altérations que nous y avons faites, & les éclairciffemens, dont ils ont encore befoin.

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a Il y a dans l'Hébreu, de s'offrir volontairement. J'avoue que le Texte eft difficile dans cet endroit. Je l'ai paraphrafé de la maniére qui m'a paru la plus convenable au fujet. On ne peut prefque pas douter qu'il n'y ait une allufion à l'hiftoire, qui eft racontée dane le Chap. XX. 21. des Nombres, dont peut-être on favoit par tradition du temps de Débora

quel

TEXTE.

les vangeances en Ifraël, & de ce que le peuple a été porté de bonne volonté.

Verf. 3. Vous

Rois écoutez, vous Princes prêtez Poreille c'est moi, c'est moi qui chanterai à l'Eternel, je pfalmodierai à l'Eternel, le Dieu des Ifraëlites.

Verf. 4. 5. O Eternel, quand tu fortis de Sehir, quand tu marchas du territoire d'Edom, la Terre fut ébranlée, & même

PARAPHRASE.

les concuffions exercées con
tre fon peuple, &•
&• d'infpi-
rer aux Ifraëlites le géné
reux deflein d'affronter la
mort pour combattre l'armée
du Tyran.

Le Cantique, que j'entonne à la gloire de notre Libérateur, n'eft pas feulement digne de l'attention de ces Ifraëlites, qui jouiffent du fruit des victoires que je publie : il mérite auffi la vôtre, Princes idolatres. Ecoutez une femme : & ap prenez de la fublimité de fes idées, & de la pompe de fes expreffions, quelle eft la Majefté du Dicu qui l'anime.

Grand Dieu tu fais renaître aujourd'hui ces jours mémorables, dans lesquels tu fignalois en faveur de ton peuple ta force & ta bonté.

Quand les enfans d'Ifraël erroient dans le Defert, quand

REMARQUES.

ils

quelques circonftances, qui nous font inconnues aujourd'hui. Sehir, dont il est fait mention dans le Texte, eft une montagne de l'idumée.

On peut auffi entendre par ces paroles du verf. 5. ce Sinaï; que les montagnes d'Idumée devinrent auffi épouvantables par les fignes de la préfence de Dieu, que l'avoit été Sinaï quand la Loi y fut donnée. iy

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PARAPHRASE.

ils côtoyoient les frontiéres de l'Idumée, à travers la quelle le fier Iduméen refusa de leur donner paffage, tu fis paroitre d'une façon éclatante que tu marchois toimême à la tête de ton peuple. Ta Nuée lui fervit de guide. La Terre sembla témoigner par fes fecouflès, les Cieux par leurs Phénomènes, les Montagnes par leurs tremblemens, Sinaï par les figues formidables de ta préience, toutes les Créatures

par leurs mouvemens, qu'elles vouloient prendre la querelle de ton peuple outragé, & prêter leur ministère pour punir l'injure, que venoient de lui faire les trop dignes defcendans d'Efau.

Les prodiges, que tu opères en notre faveur, ne cèdent en rien à ceux que l'on vit alors. Et tu fais éprouver

aujourd'hui à ceux qui nous

REFLEXIONS.

oppri

& Les grands chemins point battus, il y a ainfi dans le Texte verf. 6. Cela défigne, ou les incurfions des ennemis fur les Ifraëlites, ou peut être les brigandages, que les Ifraëlites eux-mêmes exerçoient contre beurs Frères: nous avons pris le premier fens.

d C'est ainfi que nous traduifons le mot, phezafon, à tout hazard, & entrainé par les Interprètes.

St.

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