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quand j'ai promis d'obéir, mais je fuis coupable d'avoir été rebelle.

Enfin la reffource de la repentance, même après une chute totale, eft une troifiéme folution. Quand nous nous engageons avec exécration d'être fidelles aux claufes de l'Alliance, nous ne prétendons pas nous fermer les portes de la répentance: nous ne confentons pas d'être exclus à jamais des miféricordes de Dieu, après une chute totale, fi nous nous en relevons par la repentance. Ce n'eft que dans la fuppofition de la perfévérance dans nos fautes que nous nous foûmettons à cette funefte condition.

Voici la feconde difficulté. Si l'on peut fans témérité entrer dans un pareil engagement, & promettre avec ferment de remplir une condition fi étendue, il femble qu'il y auroit plus de prudence à ne pas s'engager de cette maniére. Evitez de promettre, & vous éviterez les peines dénoncées aux violateurs de la promeffe: refufez de jurer, & vous ferez à couvert de la punition qui attend ceux qui enfraignent les claufes de leur ferment: travaillez à être charitable fans promettre que vous le ferez: travailJez à être humble fans jurer que vous voulez pratiquer lå vertu de l'humilité : & ainfi du refte.

Je répons, que fi nous fommes libres d'entrer dans l'Alliance de Dieu, ou de n'y point entrer, nous ne fommes pas libres d'y entrer en acceptant certaines claufes, ou en les rejettant. Dieu eft le maître de fon Alliance. Il a voulu qu'elle portât cette claufe, c'eft que tous ceux, qui la contractent, doivent confentir de renoncer pour jamais à fes miféricordes, s'ils

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violent les conditions de cette Alliance. Nous fommes libres de participer aux Sacremens, ou de n'y pas participer; mais nous ne fommes pas libres d'en changer la nature à notre gré. Or celui qui a établi les Sacremens, a voulu qu'ils fuffent des fignes exterieurs du ferment de fidélité, que prêtent à Dieu tous ceux qui y participent. Donc tous ceux qui viennent à enfraindre les claufes de l'Alliance font coupables de la violation d'une promeffe folemnelle: & tous ceux qui violent les engagemens, dans lesquels ils entrent en participant aux facremens, font coupables de parjure. Un homme, qui refuse d'entrer dans l'Alliance, & de participer aux facremens qui en font les fceaux, s'exclut par cela même de toutes les graces, que Dieu promet à ceux qui entrent dans cette Alliance, & qu'il leur fcelle par fes facremens: il confent à être éternellement expofé aux miséres inévitables à ceux qui font étrangers de l'Alliance Ephef. de Dieu, comme parle un Apotre. Mais celui II. 12. qui après y être entré en enfraint les conditions, eft non feulement exclus comme l'autre des graces, que Dieu communique à ceux qui entrent dans fon Alliance; il eft non feulement abandonné à fa mifére naturelle, mais il a encore ce degré de malheur par deffus celui de l'homme, que nous avons d'abord fuppofé, c'est que s'ćtant rendu coupable d'un crime, dont l'autre étoit exempt, il eft fujet à une peine, dans laquelle celui-ci ne fauroit être envelopé : je veux dire qu'il encourt la peine du parjure. C'étoit là le péril que Jofué repréfentoit aux Ifraclites: c'eft le péril auquel s'expofent tous ceux qui entrent témérairement dans l'Alliance de Dicu: Vous ne pourrez fervir l'Eternel, c'est un Dien Jaint,

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faint, c'est le Dieu fort qui eft jaloux, il ne par-
donnera point vos revoltes ni vos péchez. Quand
vous aurez abandonné l'Eternel, & que vous aurez
fervi les Dieux étrangers, il changera à votre égard:
il vous fera du mal,& il vous confumera après vous
avoir fait du bien.

Malgré cette effraiante déclaration les Juifs perfiftérent à vouloir entrer dans l'Alliance de Dieu, & à s'y lier par un ferment. Jofué leur propofe d'abord les diveries Religions qui leur font connues: il les preffe de fe déterminer pour celle qui leur paroitra la plus avantageufe. Ils fe déterminent pour celle du vrai Dieu: ils réJofué pondent, Dieu nous garde d'abandonner l'Eternel, XXIV. 16. pour fervir d'autres Dieux. Jofué leur représente le péril, dans lequel ils vont s'expofer en fe liant de nouveau, il leur fait entendre que fi Dieu leur a infligé des peines févéres, parce qu'ils avoient violé les conditions de l'Alliance après y être entrez, il leur en infligera de plus févéres encore, s'ils la violent après l'avoir renouvellée ils répondent, que cela même ne les empêchera point de la renouveller avec ferVerf. 21. ment: Non, difent-ils, mais nous fervirons. Jofué revient à la charge: il leur repréfente l'exécration, dont leur nouvel engagement eft accompagné, & les malédictions auxquelles ils fe Verf. 22. foûmettent, s'il leur arrive de l'enfraindre: Vous étes témoins contre vous-mêmes, que vous avez choifi vous-mêmes l'Eternel pour en faire l'objet de votre culte & de votre obéiffance. Et ils répondent : Nous en fommes témoins. Se peut-il rien de plus autentique? Ce fixiéme point de vûe fous lequel nous avions confideré le renouvellement d'Alliance entre Dieu & les Ifraëlites, je veux dire la folemnité de l'acceptation, s'offre de lui

:

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même à l'efprit: chaque Chrétien peut s'en faire l'application. Il n'eft pas néceffaire que nous infiftions plus longtemps fur ce fixiéme article.

Le feptiéme concerne la proximité de la conféquence. Dès que les Ifraëlites dirent à Josué: Nous fervirons P'Eternel: Nous sommes témoins contre nous-mêmes, que nous avons choifi l'Eternel pour en faire l'objet de notre culte & de notre obéif fance, Jolué leur dit: Maintenant donc ôtez les Dieux des étrangers qui font parmi vous. S'il y a Verf.23. quelque difficulté dans le fait que ces paroles fuppofent, il n'y en a aucune dans la vérité qu'elles établiffent.

Il peut y avoir de la difficulté dans le fait que ces paroles fuppofent. Comment fe peut-il qu'il y eût alors des Dieux étrangers parmi les Ifraëlites? Comment fe peut-il que Dieu, qui avoit tant de fois & d'une maniére fi terrible puni les rebellions dont ce Peuple s'étoit rendu coupable dans le Defert, Dieu qui avoit quelquefois appefarti fon bras fur toute la nation, pour la faute d'un de fes membres, eût toleré jufques alors des hommes, qui avoient été ainsi criminels au premier chef? Que fi quelque fleau de fa juftice a puni cette idolatrie, comment fe peut-il que l'Hiftoire n'en faffe aucune mention, & qu'elle garde un profond filence fur une circonftance fi intéreflante & fi inftructive?

Mais ne pourroit-on pas revoquer en doute cela même, qui fait le fondement de la difficulté, c'eft que Jofué fuppofe qu'il y avoit des Idoles au milieu du peuple d'Ifraël? C'est le parti qu'a pris un fameux 6 Rabin,

16 SELDEN, ubi fuprà,

&

& 7 St. Auguftin après lui. Ils croient que quand Jofué exhorte les Ifraelites à ôter les Dieux, qui étoient au milieu d'eux, il attaque certains panchans qu'ils avoient pour l'idolatrie, non une idolatrie, dont ils fuffent actuellement coupables. Outre la raifon de convenance, qui femble favorifer ce commentaire, il eft appuié fur le filence de l'Hiftoire, qui ne fait mention d'aucun acte d'Idolatrie commis par les Ifraëlites dans le Defert, & qui dit expreffément, quelques verfets après celui dont nous cherchons l'explication, qu'Ifraël fervit l'Eternel pendant la vie de Fofué, & pendant la vie des Anciens qui lui furvécurent, & qui avoient vû comme lui les merveilles, que Dieu avoit faites en faveur de fon peuple.

Cependant le terme de l'Original eft trop pofitif, pour être expliqué des penfees de l'efprit feulement il fuppofe, ce me femble, une action réelle & extérieure: c'est le même mot qu'employa Jacob, lorsqu'il exigea de fa famille qu'elle fe défit des Idoles, qu'elle avoit apportées de Méfopotamie.

D'ailleurs toutes les objections, qu'on allégue contre la vérité que Jofué fuppofe, fe réfutent fans peine.

Une raifon de convenance ne doit jamais faire douter d'un fait établi fur de bonnes preuves. Si Dieu a toleré dans cette occafion un plus grand crime dans le temps qu'il en puniffoit de moindres, ce n'eft pas la premiére fois qu'il a tenu cette conduite. La maniére, dont il dispenie les châtimens & les recompenfes dans cet

te

17 AUGUST. tom. IV. quæft. 29. in Jofuam pag. 127. &c.

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