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rez de chaux, vous les drefferez fur la montagne de Hébal. Ils ont dit qu'en vertu de cet ordre les Juifs allérent fur cette montagne, incontinent après qu'ils furent entrez dans la Terre de promiffion, & qu'ils y érigérent un Monument conftruit de ces douze pierres. Il est pourtant démontré, que l'ordre qui fût donné à Moyfe, & celui qui fut donné à Jofué, portoient des chofes différentes. Le premier, je veux dire celui qui fût prefcrit à Moyfe, ne devoit s'exécuter que lorfque le peuple feroit parvenu à la montagne de Hébal, ce qui ne pouvoit arriver qu'après la conquête de Jérico, & celle de Hai: le fecond devoit l'être dès qu'on auroit paffé le Jourdain. On devoit graver le Dé, calogue fur le premier de ces monumens, conformément à la coutume qu'on a eue de tout temps, mais fur tout avant l'invention du papier, de graver fur des pierres les chofes les plus mémorables & les plus intéreffantes: & fi nous nous en raportons aux Juifs, la loi de Dieu étoit gravée en LXX. Langues fur le monument de la montagne de Hébal: au lieu qué celui, que Jofué devoit dreffer, n'étoit deftiné qu'à conferver la mémoire du paffage du Jourdain.

V. Jofué commanda aux Ifraëlites, probablement par l'ordre de Dieu, quoique l'Hiftoire Ste. ne marque pas cette derniére circonftance, qu'outre le monument, qui devoit être é

rigé

48. Voi. DUPIN Bibliothéque univerfelle des Hiftoriens Lib. I. fect. 2. pag. 4. col. 2.

49. WAGEN SEIL in Sota pag. 667. JARCHI in Deuter. 27. 2. pag. 1459.

50. FRANCISC, QUARESMIU s elucidatio Terra fancTom. I. lib. 3. cap. 43. pag. 88. col. 2. On non

rigé dans le Camp, on en conftruifit un autre d'un pareil nombre de pierres dans l'endroit même du lit du Jourdain, où l'Arche fe feroit Jofué arrêtée. Ce qui fut exécuté. Quelques VoyaIV. 9. geurs raportent avec plus de merveilleux que de vaifemblance, que ces pierres se voyent ençore aujourd'hui lorfque le lit de ce fleuve fe découvre. St. Jerôme dit que que Ste. Paule les avoit vues. Et il y a des Interprétes, qui croyent que St. Jean-Baptifte les montroit au doigt, lorsqu'il difoit aux Juifs: Ne préfumez Matth. pas de vous-mêmes, lorsque vous pouvez dire, nous III. 9. Jommes les Enfans d'Abraham, car je vous dis que Dieu peut faire naitre de ces pierres mêmes des Enfans à Abraham.

Jofué aiant ainfi annoncé aux Ifraëlites les loix qu'ils devoient obferver dans le paffage du Jourdain, & les Ifraelites s'étant difpofez à les remplir, ils s'abandonnérent à cette Providençe miraculeufe, qui alloit forcer les loix de la nature, & faire remonter les eaux vers leur fource, en faveur de fon Peuple. Les Sacrificateurs marchérent les premiers felon le commandement qu'ils avoient reçû. Il étoit jufte que ces Hérauts des loix divines fuffent les premiers à affronter le péril, & qu'ils donnaffent à tout le peuple un exemple de la confiance qu'ils avoient en la promeffe de ce Dieu, dont ils avoient l'honneur de porter la parole à toute la congregation d'Ifraël. Un Miniftre de la Re

tre auffi les prémiéres pierres. Voi. A DAMNANUS de Locis S. Lib. II. cap. 12. cité ibid.

51. COSME MAGALLAN fur Jofué IV.9. voi. S ALIAN. Annal, fur l'an du monde 25 84. fect. XLVI. pag. $322. fol. 2.

HIERON. Tom. IV. part. 2. pag. 676.

Religion, qui recule lorsque la Providence l'appelle à entrer dans une carrière périlleuse, trahit lui-même fon Ministére: il témoigne par, fa lâcheté qu'il l'a exercé moins par un principe de vénération qu'il porte aux loix qu'il annonce, que pour remplir certaines fonctions auxquelles la focieté l'engage. La foi, que les Sacrificateurs, marquérent dans cette occafion, eft d'autant plus digne de louange, que les eaux du Jourdain reftérent dans leur lit jufqu'à-ce qu'ils s'en fuflent approchez. Mais dès que les plantes de leurs pieds les eurent touchées, elles fe retirérent incontinent. Celles qui étoient dans la partie inférieure du fleuve s'écoulérent dans la Mer morte: les autres demeurérent comme fufpendues à une diftance affez confidérable, pour que cette grande multitude pût laifier dans fon paffage un efpace de deux mille coudées entre elle & l'Arche. Le texte porte que les eaux qui defcendoient d'enhaut s'élevérent en un monceau fort loin,depuis la ville d'Adam, qui eft à côté de Tfartan: Mais en raportant le nom de ces deux villes il n'en a pas qu'il n'en marqué la fituation: & les Géografes ne nous foit ques- fourniffent aucun fecours pour remplir ce vuition dans de de l'Hiftoire. Il n'eft parlé de cette ville Jolué * que dans ce feul endroit du livre de Jofué. 36. L'Auteur du premier livre des Rois fait menRois tion d'une ville de Tfartan, " qu'Eufébe & $4 AIV. 12. drichomius après lui placent dans la Tribu de Manaffé; mais quelques " Géografes au fentiment desquels nous nous rangeons, croyent

Tofué
III. 16.

* A moins

XIX. 33.

VII. 46.

que

53. EUSEB. Onomaftic. in voce Saredatha pag. 137.
34. ADRICHOMIUS tit. Manassé pag. 74.
15. Voiez RELA N D Palaftina Lib. III. au mot n

que c'eft là une autre Tfartan. Si c'est la même dont il eft ici queftion, ces eaux fupérieures fe feront arrêtées à quinze lieues de l'endroit où les Ifraëlites pafférent le Jourdain, & elles feront rentrées dans le Lac de Tiberiade, qui eft proche de cette ville: au lieu que les eaux inférieures n'auront laiffé que l'efpace d'une licue à découvert, car c'eft là précisément la diftance qu'il y a entre Guilgal, où arrivérent les Ifraëlites aprés ce paflage, & la Mer morte, dans laquelle nous avons dit que ces eaux inféricures s'écoulérent. 11 eft plus vraisemblable ce me femble, que Tfartan, dont parle Jofué dans l'Hiftoire que nous racontons, eft auffi pcu connue que celle d'Adam. Les Juifs expliquent à la lettre ce que dit P'Hiftoire, que les eaux s'élevérent en un monceau fort loin: ils difent qu'il y avoit des monceaux d'eau les uns fur les autres, de trois cens milles de hauteur: que tous les Rois d'Orient les virent, & que ce fût ce qui jetta la terreur dans leur efprit. C'eft ainfi qu'ils expliquent ces paroles du Pfeaume XXIII. verf. 5. Tu dreffes matable à la vie de ceux qui me preffent.

Jamais les leçons de vertu données par les Miniftres du Dieu vivant ne font d'une plus grande efficace, que lorfqu'ils les reduifent euxmêmes en pratique. L'exemple d'un Pasteur, qui entre avec courage dans les gouffres de la mort, eft d'un plus grand poids pour porter les chrétiens à bien mourir, que les difcours les plus patétiques fur le mépris de la vie. Le

pag. 1058.

peu

56. Voi. WAGENSEIL in Sota Cap. 8. fect. 3. & notą ibid. pag. 694.

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peuple d'Ifraël marcha fans repugnance fur les traces des faints hommes que Dieu leur avoit donnés pour guides. " Les Thalmudistes difent que ce fût pendant que les Ifraëlites étoient encore dans le lit du Jourdain, que Jofué leur fit promettre d'exterminer à la façon de l'interdit les Cananéens, & qu'il les menaça s'ils refufoient de s'y engager, que les eaux alloient les engloutir. La foi fût couronnée. Les eaux de ce fleuve ne reprirent leur cours naturel, que lorsque tout Ifraël fût arrivé fur les frontiéres de la Terre promife.

58

En vain pour extenuer ce Miracle prétendon lui comparer certains évenemens extraordinaires qui femblent l'égaler, & qui font raportez dans l'Hiftoire profane. En vain allégue-ton les exemples, dont " Pline, 19 Denis d'Halicarnaffe, & Horace ont fait mention. Quel de ces exemples pourroit être mis en paralléle avec celui que nous venons de raconter, fur le témoignage d'un Auteur incomparablement plus digne de foi que tous les Hiftoriens profanes? Quand même les évenemens qu'on nous oppofe à les confidérer en eux-mêmes, auroient quelque raport avec celui que nous venons de raporter ils devroient toûjours en être diftingués par leurs circonftances. La prédiction de Jofué, les promeffes de Dieu, le raport du

57. Idem ibid. pag. 695./

8. PLIN. Hift. Lib. II. Cap. 103 pag. 31.

pas

59. DIONYS. HALICAR N. Antiq. Rom. Lib. VI, pag. 351. Lib. 7. pag. 409.

60. Horat. Lib. I. 2. Carm. vers. 13.

Vidimus flavum Tiberim retortis

Littore Etrufco violenter undis,
Ire dejectum monumenta Regis,
Templaque Vesta.

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